Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 décembre 2020 et 5 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Atger, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) à titre principal, de constater qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 2018677/8 du 25 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris et de l'arrêté du 3 novembre 2020 du préfet de police ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement n° 2018677/8 du 25 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 3 novembre 2020 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une attestation de demande d'asile en vue de démarches auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, subsidiairement de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux semaines à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à son conseil Me Atger au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- à titre principal, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête d'appel dès lors que le délai de 6 mois prévu par les dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 est expiré ;
- à titre subsidiaire, le jugement attaqué est entaché de deux omissions à statuer dès lors que le magistrat désigné ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré, d'une part, de l'erreur de droit dont est entaché l'arrêté de transfert attaqué au regard de l'article 3 du règlement UE n° 604/2013 et, d'autre part, du vice de procédure tiré de la tardiveté de la date à laquelle les informations prescrites par l'article 4 du règlement UE n° 604/2013 lui ont été transmises ;
- l'arrêté de transfert attaqué est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un vice de procédure au regard de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 11 janvier 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Collet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant afghan né le 11 juin 1994, a présenté le 21 septembre 2020 une demande de protection internationale au guichet unique des demandeurs d'asile de Paris. La consultation du fichier Eurodac a mis en évidence que l'intéressé a sollicité l'asile auprès des autorités hongroises le 2 juin 2015 et suédoises les 18 juin 2015 et 12 août 2016. Par un arrêté du 3 novembre 2020, le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités allemandes. M. A... relève appel du jugement n° 2018677/8 du 25 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'exception de non-lieu à statuer :
2. Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen (...) ". Aux termes de l'article L. 742-4 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) / Lorsqu'une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. Le président du tribunal administratif statue dans un délai de quatre-vingt-seize heures à compter de l'expiration du délai de recours (...) ".
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, a été notifié à l'administration, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article
R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
5. Si le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 a été interrompu par l'introduction, par M. A..., d'un recours contre l'arrêté du 3 novembre 2020, un nouveau délai de six mois a commencé à courir à compter de la notification au préfet de police, le 25 novembre 2020, du jugement attaqué du tribunal administratif de Paris. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ce délai aurait été prolongé, en application du paragraphe 2 de l'article 29, en raison de l'emprisonnement ou de la fuite de l'intéressé ou que la décision de transfert aurait été exécutée à la date d'expiration de ce délai de six mois. Dès lors, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, la France est devenue responsable de l'examen de la demande de protection internationale de M. A..., ainsi que l'admet au demeurant le préfet de police.
6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation du jugement du 25 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris et de l'arrêté du 3 novembre 2020 du préfet de police et à fin d'injonction de la requête d'appel de M. A... sont devenues sans objet. Dès lors, il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme que le conseil de M. A... demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation et d'injonction de la requête de M. A....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 14 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 novembre 2021.
La rapporteure,
A. COLLET Le président,
R. LE GOFF
La greffière,
E. VERGNOLLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA04080