Par un jugement n° 1921441/1-2 du 21 janvier 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées les 14 août 2020, 2 décembre 2020, et 15 janvier 2021, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1921441/1-2 du 21 janvier 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2019 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 15 euros par jour de retard et de lui délivrer en attendant une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ou, à titre subsidiaire d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser à Me D..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sous réserve que son conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
S'agissant du moyen commun à l'ensemble des décisions contenues dans l'arrêté :
- l'arrêté est illégal du fait de la méconnaissance, par l'arrêté de délégation de signature du 1er juillet 2019 sur la base duquel il a été pris, de l'article L. 212-2 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'il ne comporte pas la signature du préfet de police ;
- dans l'hypothèse où l'arrêté portant délégation de signature comporterait une signature électronique, il n'est pas établi que celle-ci réponde aux exigences posées par l'article 1er du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 ;
S'agissant de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
- le préfet et les premiers juges ont commis une erreur de droit dès lors qu'en considérant qu'elle n'était pas démunie d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine, ils ont ajouté une condition légale non prévue par l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012, dont elle peut utilement se prévaloir, dès lors qu'elle remplit tous les critères qui y sont posés ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle a établi en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle réside en France depuis l'âge de treize ans ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'aucun examen propre des effets de cette décision n'a été effectué par le préfet de police.
Par une décision du 26 juin 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a admis Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 55 %.
La requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 ;
- le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les observations de Me E... substituant Me D..., avocat de Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante ivoirienne, née le 20 décembre 1998, entrée en France en 2012 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 4 septembre 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée. Mme C... relève appel du jugement du 21 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est entrée régulièrement sur le territoire français en 2012 à l'âge de 13 ans pour rejoindre sa mère, titulaire depuis 2008 d'une carte de résident et qu'elle a vécu depuis cette date avec elle. Il ressort également des pièces versées que Mme C..., scolarisée dès son arrivée en France au premier trimestre de l'année 2012-2013 en classe de 4ème, a obtenu son brevet des collèges le 9 juillet 2014, son brevet d'études personnelles (BEP) " métiers de la relation aux clients et aux usagers " le 1er juillet 2016 puis son baccalauréat professionnel " commerce " le 13 juillet 2017, et que les notes obtenues durant sa scolarité et les appréciations de ses professeurs et tuteurs de stage témoignent du caractère sérieux de ses études et de sa motivation. En outre, Mme C... établit qu'elle est inscrite en BTS mention " management des unités commerciales " depuis le 9 octobre 2017 et qu'elle était, à la date de l'arrêté contesté, en 2ème année après avoir réussi sa première année après un redoublement et qu'elle a, postérieurement, à la date de l'arrêté attaqué, obtenu son BTS le 10 juillet 2020, ce qui confirme sa motivation et la réalité de son implication dans son projet professionnel. Enfin, si la requérante n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside son père, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle entretienne avec ce dernier, qu'elle a quitté alors qu'elle n'était âgée que de treize ans, des liens affectifs durables et intenses. Dans ces conditions, compte tenu de son jeune âge lors de son arrivée en France, du sérieux de sa scolarité et de la présence de sa mère en situation régulière sur le territoire français, le préfet de police n'a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de Mme C..., rejeter sa demande de titre de séjour et assortir ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination d'une mesure d'éloignement.
3. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
4. L'annulation, pour le motif sus indiqué, de l'arrêté en date du 4 septembre 2019 implique nécessairement que soit délivré à Mme C... un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer ce titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
5. Mme C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 55 %. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat d'une part, la somme de 750 euros à verser à Me D..., avocat de Mme C... et, d'autre part, la somme de 750 euros à Mme C....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1921441/1-2 du 21 janvier 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : L'Etat versera à Me D..., avocat de Mme C..., une somme de 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente,
- Mme B..., première conseillère,
- Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 mai 2021.
La présidente de la 8ème chambre,
H. VINOTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02302