Par un jugement n° 1810161/6-3 du 20 septembre 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2018, MmeA..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1810161/6-3 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 15 février 2018 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et n'a pas été précédé d'un examen particulier de sa situation personnelle ;
- il est entaché d'un vice de procédure, faute pour le préfet d'avoir saisi la commission du titre de séjour, en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile bien qu'elle justifie d'une résidence habituelle en France de plus de dix ans à la date de l'arrêté ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle apporte la preuve de sa présence habituelle en France de plus de dix ans à la date de l'arrêté ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle justifie de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires de nature à justifier son admission au séjour sur le fondement des dispositions précitées ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle justifie entretenir des liens privés stables et résider depuis plus de dix ans sur le territoire français.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 avril 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme Larsonnier a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., de nationalité malienne, est entrée en France le 15 octobre 2004 selon ses déclarations. Le 17 février 2017, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 février 2018, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A...relève appel du jugement du 20 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".
3. Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que Mme A... ne justifiait pas résider habituellement en France au titre de la seule année 2008. Devant la Cour, le préfet de police ne conteste pas ce point. S'agissant de la seule année 2008 restant en litige, la requérante verse aux débats une attestation d'admission à l'aide médicale de l'Etat en date du 21 novembre 2008, des ordonnances médicales des 6 mars, 23 avril, 28 octobre et 11 et 17 décembre 2008 et des courriers de l'Agence solidarité Transport Ile-de-France en date des 27 juillet, 6 août et 25 septembre 2008, ce dernier courrier précisant au demeurant que les droits à réduction de l'intéressée avaient été accordées jusqu'au 31 décembre 2008. Dans ces conditions, et même si Mme A...serait retournée au Mali en 2012 afin d'obtenir le renouvellement de son passeport, celle-ci justifie résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision de refus de séjour contestée. En conséquence, Mme A...est fondée à soutenir que le préfet de police était tenu de soumettre pour avis à la commission du titre de séjour sa demande de titre de séjour. Il s'ensuit que la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A...doit être annulée. Il en est de même, par voie de conséquence, de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de celle fixant le pays de destination, qui sont ainsi dépourvues de base légale.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer explicitement sur les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par MmeA..., n'implique pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce que lui soit délivré un titre de séjour sous astreinte doivent être rejetées. Il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de police de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressée en saisissant la commission du titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance que Mme A...a exposés.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1810161/6-3 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 15 février 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour présentée par Mme A...en saisissant la commission du titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente de sa décision une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 13 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 juin 2019.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
Y. HERBER La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03359