Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2020, la SASP Olympique de Marseille, représentée par Me Grimaldi, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1815134/6-2 du 21 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 7 mai 2018 de la commission supérieure d'appel de la Fédération française de football ;
3°) d'enjoindre à la Fédération française de football de prendre toutes les mesures utiles auprès de la SASP Paris Saint-Germain afin de lui permettre d'obtenir les éléments permettant de déterminer l'existence et le montant d'un excédent perçu lors de la rencontre PSG/OM du 28 février 2018 par le biais de la bourse d'échanges qu'il a mise en place et en en tirant, le cas échéant, toutes les conséquences ;
4°) d'enjoindre à la Fédération française de football de prendre toutes les mesures utiles en vue de lui permettre de bénéficier de la répartition à parts égales de l'excédent de recette de la billetterie en application de l'annexe 4 du règlement de la Coupe de France 2017/2018 ;
5°) de mettre à la charge de la Fédération française de football la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de ce que les commissions perçues par la SASP Paris Saint-Germain sur les transactions de revente des billets du match du 28 février 2018 devaient être considérées comme des recettes de billetterie ;
- la décision contestée méconnaît le principe d'une répartition à parts égales de l'excédent de recette entre les deux clubs qui ont disputé un match de Coupe de France prévu par l'annexe 4 du règlement de la Coupe de France 2017-2018 dès lors que la SASP Paris Saint-Germain a mis en place un système de bourse d'échanges sur le site de la billetterie officielle du PSG lui permettant de percevoir en tant qu'intermédiaire des commissions sur les transactions et que ces transactions doivent être retenues dans l'assiette des recettes de billetterie donnant lieu à partage de l'excédent de recette entre le club recevant et le club visiteur ;
- il n'est pas contesté que les commissions perçues par la SASP Paris Saint-Germain sont importantes et cette dernière a toujours refusé de communiquer le moindre élément sur le montant de ces commissions ;
- au surplus, ce système spéculatif de revente de billets est illégal dès lors que le PSG n'est pas l'organisateur de l'évènement ;
- elle a subi un préjudice économique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 avril 2021, la Fédération française de football, représentée par la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 4 000 euros soit mis à la charge de la SASP Olympique de Marseille au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la SASP Olympique de Marseille ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code pénal ;
- le code du sport ;
- le règlement de la Coupe de France 2017-2018 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- les observations de Me Belahouane, avocat de la SASP Olympique de Marseille,
- et les observations de Me Poupot, avocat de la Fédération française de football.
Considérant ce qui suit :
1. Le 28 février 2018, dans le cadre d'une rencontre comptant pour les quarts de finale de la Coupe de France, l'équipe du Paris Saint-Germain (PSG) a accueilli celle de l'Olympique de Marseille (OM). A l'issue de cette rencontre, le directeur administratif de l'OM a refusé de signer la feuille de recettes établie par le club du PSG. Le 1er mars 2018, la commission fédérale de la Coupe de France a validé la feuille de recettes de ce match et a demandé au PSG de verser à l'OM sa part de recette toutes taxes comprises s'élevant à la somme de 151 609,42 euros. L'OM a formé un recours contre cette décision devant la commission supérieure d'appel qui, par une décision du 7 mai 2018, a confirmé la décision de la commission fédérale de la Coupe de France du 1er mars 2018. Saisie sur le fondement de l'article R. 141-5 du code du sport par l'OM, la conciliatrice du Comité national olympique et sportif français a, le 17 juillet 2018, proposé à la Fédération française de football de rapporter la décision de la commission supérieure d'appel du 7 mai 2018, afin que cette commission statue à nouveau sur la répartition de la recette de la rencontre du 28 février 2018 en ayant au préalable recueilli de la SASP Paris Saint-Germain (SASP PSG) les éléments permettant de déterminer l'existence et le montant d'un excédent de recettes perçu lors de la rencontre en cause par le biais de la bourse d'échanges qu'elle a mise en place et en tirant, le cas échéant, toutes les conséquences. Le 23 juillet 2018, la Fédération française de football a refusé la proposition de conciliation. Par un jugement du 21 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la SASP Olympique de Marseille (SASP OM) tendant à l'annulation de la décision du 7 mai 2018 de la commission supérieure d'appel. La SASP OM relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort du point 3 du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu de manière suffisamment précise au moyen tiré de ce que les commissions perçues par la SASP PSG sur les transactions de revente des billets du match du 28 février 2018 réalisées par l'intermédiaire de la plateforme Ticketplace devaient être considérées comme des recettes de billetterie. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Il ressort des pièces du dossier que la SASP PSG a mis en place en 2016 sur son site de billetterie officiel une bourse d'échange de billets en ligne, dénommée Ticketplace, qui permet à ses seuls abonnés de revendre des billets pour des matchs disputés à domicile par le PSG à un prix qu'ils fixent librement, la SASP PSG pouvant toutefois fixer un prix minimum et un prix maximum de vente. La SASP PSG perçoit sur ces transactions d'une part, auprès du vendeur, une commission de 12 % sur le prix de revente des billets et, d'autre part, auprès de l'acheteur, des frais de dossier à hauteur de 18 % du prix d'achat des billets. Dans le cadre de la rencontre comptant pour les quarts de finale de la Coupe de France opposant l'équipe du PSG à celle de l'OM le 28 février 2018, il n'est pas contesté que le PSG a fixé le prix de ses billets à un tarif compris entre cinq et dix euros qu'il a vendus exclusivement à ses abonnés. Ces derniers ont ensuite pu revendre les billets achetés auprès du PSG à un prix supérieur au prix d'achat sur la plateforme Ticketplace au " grand public " qui était au demeurant invité par le PSG à réserver des billets sur cette plateforme dès le 22 février 2018. Estimant que la revente des billets du match du 28 février 2018 par les abonnés du PSG sur la bourse d'échange de billets en ligne Ticketplace avait, par l'intermédiaire des commissions prises par le PSG sur ces transactions, généré un excédent de recette qui aurait dû être partagé entre les deux clubs, l'OM a contesté la feuille de recettes du match fondée sur la seule vente des billets par le PSG à ses abonnés et validée par la commission fédérale de la Coupe de France.
4. Aux termes de l'article 313-6-2 du code pénal : " Le fait de vendre, d'offrir à la vente ou d'exposer en vue de la vente ou de la cession ou de fournir les moyens en vue de la vente ou de la cession des titres d'accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant de manière habituelle et sans l'autorisation du producteur, de l'organisateur ou du propriétaire des droits d'exploitation de cette manifestation ou de ce spectacle est puni de 15 000 euros d'amende. (...) Pour l'application du premier alinéa, est considéré comme titre d'accès tout billet, document, message ou code, quels qu'en soient la forme et le support, attestant de l'obtention auprès du producteur, de l'organisateur ou du propriétaire des droits d'exploitation du droit d'assister à la manifestation ou au spectacle ". L'article 6.3, 1 a) du règlement de la Coupe de France 2017-2018 indique que : " A compter du 7ème tour éliminatoire, et jusqu'aux demi-finales incluses, la Fédération gère l'épreuve, l'organisation matérielle de la rencontre restant de la responsabilité du club recevant ". Le paragraphe 1, b) ajoute que le club recevant " supporte la responsabilité matérielle de la rencontre, impliquant la gestion de la logistique et du déroulement de la rencontre et engage son entière responsabilité en cas de carence ou de négligence ".
5. Aux termes de l'article 6.5 de ce même règlement : " Jusqu'au 6ème tour éliminatoire inclus, l'édition de la billetterie se fait sous la responsabilité des clubs recevant. Sur simple demande la ligue d'appartenance a accès à toute information s'y référant. A compter du 7ème tour, la billetterie est éditée sous le contrôle de la Fédération selon les modalités de l'Annexe 4 ". Aux termes du I de l'annexe 4 de ce même règlement : " (...) A compter du 7ème tour, la FFF délivre les fonds de billets ou billets pré-imprimés au club recevant après réception du dossier de billetterie soumis à validation de la FFF : - Demande de billetterie - Déclaration urgente motivée - Déclaration dates et horaires - Arrêté d'ouverture au public ou Arrêté préfectoral d'homologation. Chaque club est responsable de sa billetterie, de la politique tarifaire, de la gestion des places gratuites et de l'organisation billetterie jour de match. Cependant la FFF étant organisatrice de l'évènement, l'ensemble des éléments cités ci-dessus pourront être modifiés par ses services. (...) Le club recevant devra proposer au club visiteur un contingent de billets payants dans un secteur visiteur ou assimilé. Le prix des billets vendus aux supporters de l'équipe visiteuse ne peut excéder le prix du billet de même catégorie vendu aux supporters du club recevant ". Selon le V de l'annexe 4 de ce même règlement : " A compter du 7ème tour éliminatoire et jusqu'aux demi-finales incluses, les frais d'organisation des rencontres sont déduits avant répartition de la recette nette. Ils sont fixés forfaitairement à 25 % de la recette HT ". Aux termes du VI de l'annexe 4 de ce même règlement : " L'excédent de recette est réparti entre les 2 clubs du match, son calcul est le suivant : 1ère étape : TVA. Recettes TTC- TVA = Recette HT ; 2ème étape : frais d'organisation. Recette HT - frais d'organisation = Excédent de recette ; 3ème étape : partage. Répartition à parts égales de l'excédent : -50% pour le club recevant ; -50 % pour le club visiteur. (...) Les indemnités publicitaires et de retransmission télévisée constituent un élément séparé de la feuille de recettes. Leur répartition fait l'objet d'un règlement financier adopté chaque année par le Comité Exécutif ".
6. Aucune disposition du règlement de la Coupe de France 2017-2018, ni aucune autre disposition textuelle n'interdisait au PSG, qui était responsable de l'organisation matérielle de la rencontre du 28 février 2018 l'opposant à l'OM en application des dispositions de l'article 6.3 du règlement de la Coupe de France 2017-2018 citées au point 4 du présent arrêt, de mettre en place une bourse d'échanges de billets sur son site de billetterie officiel par l'intermédiaire de laquelle les billets de cette rencontre sportive ont pu être revendus par ses abonnés. Par ailleurs, il ressort des dispositions du règlement de la Coupe de France 2017-2018 citées au point 5 du présent arrêt, en particulier de l'annexe 4 intitulée Billetterie Coupe de France, que l'excédent de recette qui doit être réparti à parts égales entre les deux clubs s'opposant au cours d'un match de Coupe de France correspond à l'excédent de recette provenant de la billetterie. Or, en prévoyant au I de son annexe 4, comme il a déjà été cité, que " chaque club est responsable de sa billetterie, de la politique tarifaire, de la gestion des places gratuites et de l'organisation billetterie jour de match ", le règlement de la Coupe de France 2017-2018 doit être regardé comme prenant en considération l'excédent de recette provenant de la seule vente par le club recevant des billets de la rencontre sportive. Il s'ensuit, et même si le règlement de la Coupe de France 2017-2018 ne le précise pas, alors même qu'il prévoit que les indemnités publicitaires et de retransmission télévisée constituent un élément séparé de la feuille de recette, que les commissions perçues par la SASP PSG en sa qualité d'intermédiaire mettant en relation sur sa plateforme Ticketplace ses abonnés souhaitant vendre des billets du match du 28 février 2018 comptant pour les quarts de finale de la Coupe de France et les acheteurs ne sauraient constituer, dans l'hypothèse où le montant de ces commissions serait supérieur aux coûts de mise en place et de fonctionnement de cette plateforme, une recette au sens des dispositions du règlement de la Coupe de France 2017-2018 et n'avaient donc pas à être incluses dans la feuille de recettes de ce match comme l'a jugé à bon droit le tribunal. La SASP PSG n'était ainsi pas tenue de reverser à la SASP OM la moitié de l'éventuel bénéfice issu des transactions portant sur les billets du match du 28 février 2018 réalisées sur la plateforme Ticketplace. Si la SASP OM entend contester le tarif des places du match du 28 février 2018, il ressort du I de l'annexe 4 du règlement de la Coupe de France 2017-2018 que le club recevant est responsable de sa billetterie et de la politique tarifaire. Le PSG pouvait ainsi décider de fixer les tarifs des places entre cinq et dix euros.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, que la SASP Olympique de Marseille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Fédération française de football qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SASP Olympique de Marseille demande au titre des frais liés à l'instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SASP Olympique de Marseille une somme de 2 000 euros à verser à la Fédération française de football sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SASP Olympique de Marseille est rejetée.
Article 2 : La SASP Olympique de Marseille versera à la Fédération française de football une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SASP Olympique de Marseille, à la Fédération française de football et à la SASP Paris Saint Germain.
Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président de chambre,
- Mme Collet, première conseillère,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 septembre 2021.
La rapporteure,
V. LARSONNIER
Le président,
R. LE GOFF
La greffière,
C. POVSELa République mande et ordonne à la ministre des sports en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N) 20PA02763