Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 septembre 2020, Mme E... épouse D..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1809619 du 31 juillet 2020 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-12 alinéa 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile quant aux conséquences sur sa vie privée et familiale.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Par une ordonnance du 9 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 5 janvier 2021 à midi.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord conclu le 17 mars 1988 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E..., ressortissante tunisienne née le 16 mai 1994, est entrée en France le 27 novembre 2014 sous couvert d'un visa de long séjour délivré en qualité de conjointe d'un ressortissant français, valable du 17 novembre 2014 au 17 novembre 2015. Elle a obtenu un titre de séjour dont elle a demandé le renouvellement le 19 juin 2015. Par arrêté du 23 octobre 2018, le préfet du Val-de-Marne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. Par jugement n° 1809619 du 31 juillet 2020, dont elle relève appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de Mme E... tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Aux termes de l'article 10 du même accord : " 1. Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : / a) Au conjoint tunisien d'un ressortissant français, marié depuis au moins un an, à condition que la communauté de vie entre époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé sa nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". Aux termes de l'article 11 de l'accord précité : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative peut accorder le renouvellement du titre. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " (...) ".
3. Mme E... s'est mariée avec M. D..., ressortissant français le 15 août 2013, en Tunisie. Par jugement du 11 avril 2018 du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Créteil, leur divorce a été prononcé aux torts partagés. Elle soutient avoir subi le 1er février 2015 des violences de la part de son ex époux qui ont l'ont conduite à trouver précipitamment refuge chez sa soeur. Toutefois, ni le certificat médical du 1er février 2015 qui ne se prononce pas sur les causes de l'état constaté de la requérante, ni le dépôt de plainte le lendemain le 2 février 2015 auprès des services de police ne permettent d'établir que son époux aurait été à l'origine de ses blessures, le dépôt de plainte n'ayant par ailleurs fait l'objet d'aucune suite pénale. Le certificat médical du 12 mars 2015 révélant l'état dépressif sévère de Mme E..., ainsi que l'attestation établie par le père de celle-ci le 11 décembre 2017, ne peuvent être regardés comme revêtant une valeur suffisamment probante quant à la réalité de violences conjugales que Mme E... soutient avoir subies.
4. Par ailleurs, la production d'un contrat à durée indéterminée en date du 28 août 2018 conclu avec la société Crystal Cleaning Services ne permet pas d'établir l'intensité de l'insertion dans la société française de Mme E..., qui est entrée en France le 27 novembre 2014 sous couvert d'un visa long séjour valant titre de séjour " conjoint de français ", mais est séparée de son époux depuis février 2015 et a divorcé le 11 avril 2018, qui n'a pas de charge de famille en France et qui n'est pas dépourvue de toute attache privée et familiale en Tunisie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 20 ans.
5. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que l'arrêté litigieux serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et de ce qu'il porterait au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris doivent être écartés.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 15 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2021.
La présidente de la 8ème chambre,
H. VINOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
4
N° 20PA02553