Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 22 février et 28 mai 2018, M. B..., représenté par Me Laurent, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1703432 du 19 janvier 2018 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 31 mars 2017 du préfet de Seine-et-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- contrairement a ce qu'a jugé le Tribunal administratif de Melun, il justifiait, à la date de l'arrêté du 31 mars 2017 du préfet de Seine-et-Marne, d'une communauté de vie avec son épouse de nationalité française ;
- il réunissait par ailleurs les conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2018, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jardin,
- les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public,
- et les observations de Me Laurent, avocat de M.B....
1. Considérant que, le 21 octobre 2010, M.B..., ressortissant ivoirien né le 31 mai 1978, a épousé MmeA..., de nationalité française ; qu'il est entré régulièrement en France le 30 janvier 2011 sous couvert d'un visa long séjour puis a bénéficié d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en qualité de conjoint de français, dont il a sollicité le renouvellement en dernier lieu le 22 septembre 2016 ; que par un arrêté du 31 mars 2017, le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné ; que M. B...fait appel du jugement du 19 janvier 2018, par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant notamment à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français.(...). " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...et MmeA..., mariés depuis plus de six ans à la date de l'arrêté attaqué, vivent ensemble dans un appartement de deux pièces situé à Mitry-Mory que leur a loué la société d'économie mixte de construction et d'aménagement de Mitry-Mory (Semmy) à partir du 20 août 2012 ; que si Mme A...a informé le sous-préfet de Meaux, par un courrier du 26 juillet 2016, d'une part, qu'elle acceptait de signer le certificat de communauté de vie afin de permettre à son mari d'obtenir le renouvellement de son titre de séjour d'un an en qualité de conjoint de français mais s'opposait à ce qu'une carte de résident de dix ans lui soit délivré dès lors que la communauté de vie avait cessé d'exister depuis deux ans, d'autre part, qu'elle envisageait très sérieusement une séparation, elle a, par un courrier du 28 septembre 2017, demandé au préfet de Seine-et Marne de ne pas tenir compte de son courrier du 26 juillet 2016 dès lors qu'il n'y a jamais eu d'" altération de la communauté de vie ni de façon physique, affective, matérielle et financière " ; que compte tenu de ces déclarations contradictoires de l'épouse de M. B...et dès lors que les époux n'ont jamais cessé de cohabiter, le préfet de Seine-et-Marne, en refusant le renouvellement du titre de séjour de M. B...en raison de la cessation de la communauté de vie, a fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M.B..., sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mars 2017 du préfet de Seine-et-Marne ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté litigieux, et en l'absence de changement dans les circonstances de droit et de fait à la date du présent arrêt, son exécution implique nécessairement que le préfet de Seine-et-Marne délivre une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à M. B...; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir immédiatement l'injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros à M.B..., au titre des frais liés à l'instance ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1703432 du 19 janvier 2018 du Tribunal administratif de Melun ainsi que l'arrêté du 31 mars 2017 du préfet de Seine-et-Marne sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à M.B..., dans le délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera la somme de 1 500 euros à M.B..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., au préfet de Seine-et-Marne et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 25 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.
L'assesseur le plus ancien,
D. DALLELe président-rapporteur,
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00633