Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 janvier 2015 et le 24 février 2016,
Mme B...épouseC..., représentée par MeD..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1417254/6-1 du 19 décembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 1er juillet 2014 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation au regard de la loi du 11 juillet 1979 et d'un défaut d'examen circonstancié de sa situation ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie en méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'elle établit qu'elle relevait des étrangers mentionnés au 7° de l'article L. 313-11 en tant qu'épouse d'un ressortissant français depuis 2011 ;
- la fin de la communauté de vie ne lui est pas opposable dès lors qu'elle résulte de l'initiative de son époux et de son comportement violent envers elle ;
- elle établit la continuité de son séjour en France depuis plus de six ans, que n'a pas interrompu son retour en 2011 dans son pays d'origine aux seules fins de solliciter le visa de long séjour en qualité de conjointe de français ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle justifie de ses liens familiaux en France, de son activité professionnelle et sa bonne intégration ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle justifiait de considérations humanitaires et de motifs exceptionnels du fait de sa résidence en France de plus de six ans, de la localisation de sa vie privée en France et de sa situation professionnelle ;
- le préfet de police a méconnu l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du
17 mars 1988 ;
- elle était en droit d'obtenir un titre de séjour " salarié " sur le fondement des lignes directrices fixées par la circulaire du 28 novembre 2012, dès lors qu'elle remplissait les critères des paragraphes 2.2.1 et 2.2.3 de cette circulaire ;
- la décision de refus de titre de séjour est entachée dune erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice par le préfet de police de son pouvoir discrétionnaire de régularisation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Notarianni a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B...épouseC..., ressortissante marocaine née le
20 septembre 1981, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjointe de français ; que par un arrêté du 1er juillet 2014, le préfet de police, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme B...épouse C...relève appel du jugement n° 1417254/6-1 du
19 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;
2. Considérant, en premier lieu, que la requérante soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation au regard de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation de la requérante ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " et qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonnée au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences conjugales de la part de son conjoint et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". " ;
5. Considérant, d'une part, qu'il est constant qu'à la date de l'arrêté attaqué, soit le 1er juillet 2014, la communauté de vie entre Mme C... et son époux avait cessé ;
6. Considérant, d'autre part, que si Mme B...épouse C...soutient que la rupture de la vie commune avec son conjoint de nationalité française est intervenue en raison des violences conjugales qu'elle a subies, il ressort des pièces du dossier, et particulièrement des écritures de la requérante, que les violences alléguées ne sont pas à l'origine de la rupture de la communauté de vie, laquelle a pris fin à l'initiative de son époux au plus tard en juillet 2012 ; qu'en tout état de cause, la requérante n'établit pas la réalité de violences qui seraient à l'origine de son départ du domicile conjugal en se prévalant de faits mentionnés par deux mains courantes qu'elle a déposées en décembre 2012, ni par la production d'attestations de membres de sa famille faisant état de ce que son époux se serait opposé devant eux en termes violents à la volonté de la requérante de revenir au domicile conjugal ; que, dans ces conditions, la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que Mme B...épouse C...se prévaut de la présence en France de plusieurs membres de sa famille en situation régulière, de son activité professionnelle ainsi que sa bonne insertion dans la société ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée, qui est séparée de son conjoint de nationalité française et sans enfant en France, y résidait depuis au plus six années à la date de l'arrêté contesté et qu'elle n'établit pas être dépourvue de toutes attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans au moins ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a dès lors méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ;
9. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 / (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers remplissant effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 dudit code ; que Mme C...n'étant pas, contrairement à ce qu'elle soutient, au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le préfet de police n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour ;
10. Considérant, en sixième lieu, que le moyen tiré par Mme B...épouse C...de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par adoption des motifs des premiers juges, en l'absence en appel de tout élément nouveau de droit ou de fait ;
11. Considérant, enfin, que la requérante ne peut utilement se prévaloir de la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, dépourvue de valeur règlementaire, dont les énonciations ne constituent pas des lignes directrices et que, de nationalité marocaine, elle ne peut pas plus utilement se prévaloir des dispositions de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...épouse C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...épouse C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 3 mars 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 mars 2016.
Le rapporteur,
L. NOTARIANNILe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00514