Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15, 29 mars et 26 décembre 2016, M. A..., représenté par la Selarl Kihl-Drié, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1432089/1-2 et 1511534/1-2 du 26 janvier 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et des intérêts de retard et pénalités correspondants ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal s'est fondé sur un motif qui ne lui était pas soumis pour rejeter ses conclusions relatives à la remise en cause de la réduction d'impôt au titre de l'investissement outre-mer ;
- il avait la qualité de loueur en meublé professionnel dès l'année 2008 au motif qu'il a commencé à exercer son activité le 30 décembre 2008 et a perçu des revenus pour la journée du 31 décembre dont le montant est supérieur à celui exigé par l'article 151 septies VII du code général des impôts ;
- la SEP DOM SEP 357 n'ayant fait l'objet d'aucune vérification de comptabilité, les redressements qui lui ont été adressés sont irréguliers au regard des dispositions de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales ;
- les premiers juges ont considéré à tort que la réalité de l'investissement n'était pas établie ; la SEP DOM SEP 357 étant occulte, la SNC Nordy Gest, gérant de la SEP et propriétaire du bateau, a régulièrement conclu le contrat d'affrètement avec l'exploitant du bateau ; la SNC Nordy Gest a regroupé les opérations relatives à la SEP sur les mêmes déclarations qu'elle était tenue de souscrire au titre de ses propres activités.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 septembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu des années 2009 et 2010 sont irrecevables, en l'absence de moyen présenté dans le délai de recours contentieux, en application des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;
- les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office et tiré de la méconnaissance du champ d'application du VII de l'article 151 septies du code général des impôts dans sa rédaction issue des lois n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 et n° 2008-1425 du 27 décembre 2008, déclaré contraire à la Constitution par une décision n° 2017-689 QPC du Conseil constitutionnel du 8 février 2018 applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date du 9 février 2018.
Par des observations enregistrées le 19 février 2018 le ministre de l'action et des comptes publics a répondu au moyen d'ordre public susceptible d'être relevé d'office du 13 février 2018.
Par des observations enregistrées le 21 février 2018 M. A...a répondu au moyen d'ordre public susceptible d'être relevé d'office du 13 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-689 QPC du 8 février 2018.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stoltz-Valette,
- et les conclusions de M. Platillero, rapporteur public.
1. Considérant que M. A...est associé de la société en participation (SEP) DOM SEP 357 dont la gérance a été confiée à la société en nom collectif (SNC) Nordy Gest constituée en vue d'acquérir et de donner en location des biens éligibles à la réduction d'impôt à raison d'investissements productifs neufs, prévue par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts ; que M. A...a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 à l'issue duquel le service a remis en cause la réduction d'impôt dont a bénéficié le foyer fiscal au titre de l'année 2008 à raison de ses parts dans l'investissement réalisé outre-mer par la SEP DOM SEP 357 et consistant en l'acquisition d'un navire de plaisance donné en location, ainsi que l'imputation du déficit de l'activité de loueur en meublé sur son revenu global au titre des années 2008 à 2010, en application de l'article 151 septies VII du code général des impôts ; que M. A...ayant en vain demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 2008 à 2010 à la suite de ce contrôle, il relève appel du jugement de ce tribunal rejetant sa demande ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que, par une décision du 7 mars 2018, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé un dégrèvement d'un montant total, en droits et pénalités, de 24 644 euros, correspondant à la fraction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à la charge de M. A...au titre de l'année 2008 en conséquence du refus du service d'imputer sur le revenu global de l'intéressé le déficit industriel et commercial lié à son activité de loueur en meublé ; que, par suite, les conclusions de la requête afférentes à ces impositions et pénalités sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant que M. A...conteste la régularité du jugement attaqué en faisant valoir que le tribunal se serait fondé sur un motif qui ne lui était pas soumis pour rejeter ses conclusions relatives à la remise en cause de la réduction d'impôt au titre de l'investissement outre-mer ; que, cependant, en jugeant que M. A...ne justifiait pas de la réalité de l'investissement, de l'identité des propriétaires du bien objet de cet investissement et des modalités de son exploitation, les premiers juges ont repris un motif qui était expressément opposé dans le mémoire en défense de l'administration ; que, par conséquent, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait irrégulièrement soulevé d'office un motif pour rejeter les conclusions précitées manque en fait ;
Sur l'imputation du déficit de l'activité de loueur en meublé sur le revenu global :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...) 1° bis des déficits provenant, directement ou indirectement, des activités relevant des bénéfices industriels ou commerciaux lorsque ces activités ne comportent pas la participation personnelle, continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité. Il en est ainsi, notamment, lorsque la gestion de l'activité est confiée en droit ou en fait à une personne qui n'est pas un membre du foyer fiscal par l'effet d'un mandat, d'un contrat de travail ou de toute autre convention. Les déficits non déductibles pour ces motifs peuvent cependant être imputés sur les bénéfices tirés d'activités de même nature exercées dans les mêmes conditions, durant la même année ou les six années suivantes. Ces modalités d'imputation sont applicables aux déficits réalisés par des personnes autres que les loueurs professionnels au sens du VII de l'article 151 septies, louant directement ou indirectement des locaux d'habitation meublés ou destinés à être meublés " ; qu'aux termes de l'article 151 septies du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : " (...) VII. (...) L'activité de location directe ou indirecte de locaux d'habitation meublés ou destinés à être loués meublés est exercée à titre professionnel lorsque les (....) conditions suivantes sont réunies : (...) ; 2° Les recettes annuelles retirées de cette activité par l'ensemble des membres du foyer fiscal excèdent 23 000 ; 3° Ces recettes excèdent les revenus du foyer fiscal soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires au sens de l'article 79, des bénéfices industriels et commerciaux autres que ceux tirés de l'activité de location meublée, des bénéfices agricoles, des bénéfices non commerciaux et des revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 (...) " ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les recettes provenant de la location en meublé, d'un montant respectif de 23 347 euros en 2009 et de 23 319 euros en 2010, n'excèdent pas le total des autres revenus tirés de l'activité non commerciale de dentiste de M. A...qui s'élèvent respectivement à 163 722 euros en 2009 et 186 923 euros en 2010 ; que, par suite, en application des dispositions précitées du VII de l'article 151 septies du code général des impôts, c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé qu'au titre des années 2009 et 2010 M. A...ne pouvait être regardé comme un loueur professionnel et qu'elle a remis en cause l'imputation des déficits générés par l'activité de location meublée sur son revenu global des années 2009 et 2010 ;
Sur la réduction d'impôt au titre de l'investissement outre-mer :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales : " En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration des impôts et la société elle-même. (...) " ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le supplément d'impôt mis à la charge de M.A... résulte exclusivement de la remise en cause de la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts dont il se prévalait à titre personnel à raison d'investissements productifs réalisés outre-mer ; que ce supplément d'impôt ne procède pas du rehaussement du résultat des SEP imposable entre les mains de leurs associés au prorata de leurs parts en application des dispositions de l'article 8 du code général des impôts relatif au régime d'imposition des sociétés de personnes ; que, dès lors, en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires en ce sens, l'administration fiscale n'était pas tenue de procéder à la vérification de comptabilité des SEP préalablement au contrôle dont M. A...a fait l'objet ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'absence de vérification de comptabilité et de rectification du résultat de la SEP est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de M. A...;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis-et-Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C, dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement (...) La réduction d'impôt prévue au présent I s'applique aux investissements productifs mis à la disposition d'une entreprise dans le cadre d'un contrat de location si les conditions mentionnées aux quatorzième à dix-septième alinéas du I de l'article 217 undecies sont remplies et si 60 % de la réduction d'impôt sont rétrocédés à l'entreprise locataire sous forme de diminution du loyer et du prix de cession du bien à l'exploitant. Ce taux est ramené à 50 % pour les investissements dont le montant par programme et par exercice est inférieur à 300 000 euros par exploitant " ; qu'aux termes des quatorzième et seizième alinéas du I de l'article 217 undecies du code général des impôts, auxquels renvoient les dispositions précitées de l'article 199 undecies B : " La déduction prévue au premier alinéa s'applique aux investissements productifs mis à la disposition d'une entreprise dans le cadre d'un contrat de location si les conditions suivantes sont réunies : / (...) 2° Le contrat de location revêt un caractère commercial " ;
9. Considérant qu'en vertu de l'article 8 du code général des impôts, les associés de certaines sociétés n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux sont " personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société . " ; que l'article 60 du même code dispose : " Le bénéfice des sociétés visées à l'article 8 est déterminé, dans les conditions prévues pour les exploitants individuels... - Ces sociétés sont tenues aux obligations qui incombent normalement aux exploitants individuels . " ; qu'enfin aux termes de l'article 238 bis M du même code : " Les sociétés en participation doivent, pour l'application des articles 8 et 60, inscrire à leur actif les biens dont les associés ont convenu de mettre la propriété en commun . " ;
10. Considérant que M. A...est associé de la société en participation (SEP) DOM SEP 357, constituée en vue d'acquérir un navire de plaisance éligible à la réduction d'impôt attachée à la réalisation d'investissements productifs neufs, prévue par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts ; que lors des opérations de contrôle le service a constaté que la SNC Nordy Gest, gérante de la SEP, avait inscrit ce bien à l'actif de son bilan, que la facture d'achat était libellée à son nom et qu'elle avait conclu un contrat d'affrètement le 3 septembre 2008 avec la SNC Maobi ; qu'au vu de ces éléments, estimant que la SEP n'était pas propriétaire du navire, le service a remis en cause le bénéfice de la réduction d'impôt ; que si une société en participation, qui ne jouit pas de la personnalité morale et ne dispose pas de patrimoine propre, ne peut devenir propriétaire des biens que les associés mettent à sa disposition, elle doit obligatoirement inscrire à l'actif de son bilan les biens dont les associés ont convenu de mettre la propriété en commun ; qu'elle a en revanche la possibilité de faire figurer à l'actif de son bilan les biens qui sont affectés à son activité sociale par les associés lorsque le bien n'est pas indivis ou le laisser à l'actif de l'associé propriétaire ; qu'en l'espèce, M. A...fait valoir que la SNC Nordy Gest a agi en qualité de mandataire de la SEP DOM SEP 357 et qu'en raison du caractère occulte de cette dernière la SNC était l'unique interlocuteur de l'exploitant ; que, cependant, il ne résulte d'aucune des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué que le navire litigieux aurait été inscrit à l'actif du bilan de la SEP ou que les statuts de celle-ci auraient révélé de manière suffisamment précise la volonté des associés de mettre le navire en commun et de l'exploiter au travers de la SEP ; qu'ainsi, l'investissement ne pouvant être regardé comme ayant été " réalisé " par la SEP, au sens des dispositions précitées de l'article 199 undecies B du code général des impôts, c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice de la réduction d'impôt dont a bénéficié M. A... ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir soulevée en défense, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. A... à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 3 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Dalle, président,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 mai 2018.
Le rapporteur,
A. STOLTZ-VALETTELe président,
D. DALLE
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA00963