Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 12 décembre 2017, M.B..., représenté par la SELARL Lexnea, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700258 du 19 octobre 2017 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) d'annuler la décision du 6 octobre 2014 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie l'informant de ce que la commission d'aptitude réunie le 26 septembre 2014 avait émis un avis défavorable relatif à l'imputabilité au service de l'accident dont il a été victime le 14 septembre 2012 ;
3°) de faire injonction au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident et de convoquer la commission d'aptitude afin qu'elle se prononce sur le taux d'invalidité ;
4°) de condamner solidairement la Nouvelle-Calédonie et le centre hospitalier du Nord à lui payer une indemnité correspondant au montant des traitements dont il a été illégalement privé du fait de l'absence de reconnaissance de l'imputabilité au service de cet accident et la somme de 4 000 000 de F CFP à titre de dommages et intérêts ;
5°) de condamner solidairement la Nouvelle-Calédonie et le centre hospitalier du Nord à reconstituer sa carrière ;
6°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise sur l'imputabilité au service de l'accident dont il a été victime le 14 septembre 2012 ;
7°) de mettre à la charge solidaire de la Nouvelle-Calédonie et du centre hospitalier du Nord la somme de 400 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la lettre du 6 octobre 2014 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie contient une décision lui faisant grief dès lors qu'elle a eu des conséquences sur sa situation administrative ;
- le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie est son employeur au sens de l'article 13 de l'arrêté du 14 avril 1975 ;
- les certificats médicaux qu'il a produits établissent l'imputabilité au service de l'accident dont il a été victime le 14 septembre 2012, qui constitue une rechute de l'accident du travail dont il a été victime le 25 juillet 2010 ;
- la décision du 6 octobre 2014 est illégale pour avoir été prise au vu d'un avis irrégulièrement émis, la commission d'aptitude étant irrégulièrement composée dès lors qu'il manquait deux représentants du personnel et un praticien hospitalier et qu'aucun spécialiste de l'affection dont il est atteint n'était présent, le procès-verbal de sa réunion, qui n'a pas été signé par son président, ne lui ayant pas été notifié ;
- cet avis ne pouvait légalement retenir son prétendu comportement fautif, sans incidence sur l'imputabilité au service de l'accident du travail ;
- son employeur, qui ne lui a pas proposé un poste adapté à son état de santé, n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail, ce qui a entraîné la rechute du 14 septembre 2012 ;
- la décision du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie n'est pas motivée ;
- il a subi un préjudice financier correspondant au montant des traitements dont il a été illégalement privé depuis le mois de janvier 2013 du fait de l'absence de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 14 septembre 2012 et un préjudice moral dès lors que le refus fautif de son employeur a entraîné un épisode dépressif réactionnel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2018, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la SELARL Milliard-Million, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 1 500 euros soit mis à la charge de M. B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- aucune décision faisant grief à M. B...n'a été prise par le président du gouvernement le 6 octobre 2014, ce dernier s'étant borné à notifier l'avis de la commission d'aptitude ;
- les conclusions indemnitaires sont mal dirigées dès lors que seul le directeur du centre hospitalier du Nord était compétent pour reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 14 septembre 2012.
Par ordonnance du 8 juin 2018, dont le centre hospitalier du Nord a accusé réception le 18 juin 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 juin 2018 à 12 heures.
Un mémoire en défense, présenté par le centre hospitalier du Nord, a été enregistré le 8 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;
- l'arrêté n° 1065 du 22 août 1953 portant statut général des fonctionnaires des cadres territoriaux ;
- l'arrêté n° 1066 du 22 août 1953 fixant le régime des congés des personnels civils relevant de l'autorité du chef du territoire ;
- l'arrêté n° 75-157/CG du 14 avril 1975 relatif aux modalités d'application de l'article 9 paragraphe II de l'arrêté n° 1066 du 22 août 1953 relatif au congé de maladie et à l'allocation temporaire d'invalidité ;
- la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 portant droits et obligations des fonctionnaires territoriaux ;
- la délibération n° 46 du 21 décembre 1999 relative à la création, à l'organisation et au fonctionnement du centre hospitalier du Nord ;
- la délibération n° 309 du 27 août 2002 relative au fonctionnement et à la composition de la commission d'aptitude ;
- la délibération n° 352 du 7 mars 2014 portant statut particulier des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 septembre 2018 :
- le rapport de M. Jardin,
- et les conclusions de Mme Anne Mielnik-Meddah, rapporteur public.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
1. Considérant que les fonctionnaires soumis aux dispositions du statut général des fonctionnaires des cadres territoriaux de Nouvelle-Calédonie, comme les personnels paramédicaux régis par la délibération du 7 mars 2014, ont vocation, en vertu de l'article 70 du statut général, à servir sous l'autorité des établissements publics de Nouvelle-Calédonie, au nombre desquels figure le centre hospitalier du Nord ; qu'en vertu de l'article 12 de la délibération du 24 juillet 1990, les fonctionnaires sont en principe gérés par la collectivité qui les emploie, sauf dans un nombre de cas énumérés notamment aux a) à f) du § 4 de cet article où c'est " l'Exécutif du Territoire " qui est compétent ; que lorsqu'un de ces fonctionnaires souhaite bénéficier de la conservation de l'intégralité de son traitement en cas de maladie provenant d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, dans les conditions prévues par le II de l'article 9 de l'arrêté n° 1066 du 22 août 1953, le dossier constitué selon les modalités décrites par les articles 2 et 3 de l'arrêté du 14 avril 1975 peut être soumis à l'examen de la commission d'aptitude qui émet un avis sur l'imputabilité au service de l'accident ; qu'en application des articles 4 et 5 de cet arrêté, rapprochées de celles de l'article 12 de la délibération du 24 juillet 1990, il appartient toutefois à l'employeur de reconnaître l'imputabilité au service ; que, dans les cas où un fonctionnaire sert en position d'activité sous l'autorité d'un établissement public, l'employeur, au sens des dispositions de cet arrêté, s'entend de l'établissement public ; que M. B..., aide-soignant titulaire, à son retour de disponibilité, a été placé par le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie en position d'activité pour servir sous l'autorité du centre hospitalier du Nord à compter du 22 mars 2010 ; qu'il appartient par suite au directeur de cet établissement public, qui exerce son autorité sur l'ensemble du personnel en application de l'article 40 de la délibération du 21 décembre 1999, de reconnaître l'imputabilité au service d'un accident de cet agent ;
2. Considérant qu'en vertu de l'article 4 de la délibération du 27 août 2002, la commission d'aptitude est saisie soit sur demande du fonctionnaire adressée au président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie, soit par le représentant de l'établissement dont relève le fonctionnaire ; que les procès-verbaux de ses réunions sont signés par son président, qui est le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie ou son représentant ; que ses avis sont notifiés par le président à l'employeur et à l'agent dont la situation est examinée ; qu'en application de ces dispositions, le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie, par une lettre datée du 6 octobre 2014, a notifié à M. B...l'avis de la commission d'aptitude réunie le 26 septembre 2014 relatif à l'imputabilité au service de l'accident survenu le 14 septembre 2012 en l'invitant à se rapprocher de son employeur pour les suites à donner à son dossier ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, seul le directeur du centre hospitalier du Nord était compétent pour reconnaître l'imputabilité au service de cet accident ; qu'ainsi, comme le soutient en défense le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie, sa lettre datée du 6 octobre 2014 ne contient aucune décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que les conclusions à fin d'annulation de la prétendue décision du 6 octobre 2014 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne peuvent dès lors qu'être rejetée comme irrecevables ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
3. Considérant que le juge administratif ne peut adresser des injonctions à l'administration qu'en vue d'assurer l'exécution d'une de ses décisions, dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; que le rejet des conclusions à fin d'annulation a pour conséquence que le présent arrêt n'implique aucune des mesures d'exécution que demande M.B..., ce qui entraîne le rejet de ses conclusions à fin d'injonction ;
Sur les conclusions indemnitaires :
4. Considérant qu'il suit de ce qui a été dit aux points 1 et 2 que la Nouvelle-Calédonie n'est pas l'employeur de M.B..., au sens et pour l'application du II de l'article 9 de l'arrêté n° 1066 du 22 août 1953 et de l'arrêté du 14 avril 1975 ; que sa responsabilité ne peut dès lors être recherchée en raison de l'illégalité de l'absence de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident de M. B...survenu le 14 septembre 2012 ;
5. Considérant que M. B...a été victime d'un premier accident le 25 juillet 2010, dont l'imputabilité au service a été reconnue par une décision du 28 juillet 2010 du directeur du centre hospitalier du Nord ; que, selon le certificat médical du docteur Southwell daté du 2 février 2005, il présentait à la suite de cet accident une hernie discale ayant motivé une intervention chirurgicale, laquelle a eu lieu le 1er février 2011 selon le certificat médical daté du 20 février 2013 du chirurgien, le docteur Rouvreau ; que, d'après le courrier daté du 5 août 2011 du président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie, la commission d'aptitude réunie le 19 juillet 2011 a estimé que la situation de M. B...était consolidée et sans séquelles " à la date de l'expertise, soit le 15 mars 2011 " ; que M. B...n'avance aucun élément infirmant cet avis ; que, d'après le courrier daté du 20 septembre 2012 adressé par le directeur du centre hospitalier du Nord au directeur des ressources humaines de la fonction publique de Nouvelle Calédonie, dont le contenu n'est pas sérieusement contredit par M. B..., il a été placé à sa reprise du travail le 19 mars 2012 sur un poste d'archiviste avec interdiction de port de charges supérieures à 20 kg, conformément aux recommandations du médecin du travail ; que si M. B...se plaint d'avoir été victime d'un nouvel accident le 14 septembre 2012, il n'est pas contesté que cet événement, dont les circonstances exactes ne sont décrites par aucune pièce du dossier, a eu lieu alors qu'il était en congé ; que le certificat médical du docteur Tardivon, daté du 10 juin 2013, indique qu'il a soigné M. B...le 14 septembre 2012 et que le patient souffrait alors " d'une sciatique droite récidivante, sans cause déclenchante " ; que si ce certificat ajoute qu'une IRM a permis de retrouver " une dicopathie L5 S1 associée à une fibrose intracanalaire sur l'étage opéré dans le cadre de son AT du 1er février 2011 ", il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu de la consolidation constatée au 15 mars 2011 et de l'emploi sur lequel a été placé M. B...après le 19 mars 2012, que la dégradation de son état de santé consécutive à l'accident survenu le 14 septembre 2012 soit imputable au service, comme l'a estimé la commission d'aptitude réunie le 26 septembre 2014 ; qu'en refusant implicitement de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident, le directeur du centre hospitalier du Nord a par suite fait une exacte application des dispositions du II de l'article 9 de l'arrêté n° 1066 du 22 août 1953 et de l'arrêté du 14 avril 1975 ;
6. Considérant que la commission d'aptitude réunie le 26 septembre 2014 pouvait valablement siéger, en dépit de l'absence de deux représentants du personnel et d'un praticien hospitalier, le quorum de la moitié au moins de ses membres prévu par l'article 4 de la délibération du 27 août 2002 étant atteint ; qu'aucune disposition de cette délibération ne faisait obligation au président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie de nommer à cette commission un praticien hospitalier spécialiste de la pathologie dont souffre M.B... ; qu'il ressort du procès-verbal de la réunion du 26 septembre 2014 qu'il a été signé par la présidente de la commission d'aptitude, MmeC..., représentant le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie, conformément aux dispositions de l'article 4 de la délibération du 27 août 2002 ; que si M. B...soutient qu'il n'a pas reçu la lettre datée du 6 octobre 2014 lui notifiant l'avis de la commission d'aptitude et si ni le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie, ni le centre hospitalier du Nord ne prouve le contraire, l'absence fautive de notification de cet avis ne présente pas un lien de causalité direct et certain avec les préjudices dont M. B...demande réparation dès lors que, comme il a été dit au point 5, le directeur du centre hospitalier du Nord a pu légalement refuser de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 14 septembre 2012 et en tirer les conséquences en ne conservant pas à cet agent l'intégralité de son traitement ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande ; que par conséquent, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...la somme que demande le président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie sur ce fondement ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et au centre hospitalier du Nord.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 27 septembre 2018.
L'assesseur le plus ancien,
D. DALLELe président-rapporteur
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne à la ministre des outre-mer, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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17PA03786