Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 24 février 2016, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1512460/3-2 du 16 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il résulte de l'avis du médecin-chef que l'état de santé du requérant était stabilisé et qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine, qu'il est célibataire et isolé en France et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins cinquante et un ans et où résident au moins six de ses enfants, dont trois mineurs, et où il indique avoir une concubine, qu'il ne justifiait pas d'une réelle insertion professionnelle dès lors qu'il ne travaillait qu'à temps partiel comme agent de service et a pris sa retraite en février 2015 et qu'il ne justifie pas être entré en France dès le 22 décembre 2004 ;
- s'agissant des autres moyens soulevés devant les premiers juges, il se rapporte à ses écritures de première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2016, M.A..., représenté par Me Benchemam, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa situation familiale est sans incidence sur le bien-fondé du jugement attaqué dès lors que le jugement attaqué est fondé sur une appréciation erronée par le préfet de son insertion sociale et professionnelle et non sur une atteinte à sa situation familiale ;
- les moyens du préfet de police ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Notarianni,
- et les observations de Me Benchemam, avocat de M.A....
1. Considérant que M.A..., ressortissant camerounais né le 11 mars 1953, entré en France le 22 décembre 2004, a, le 28 janvier 2015, sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 16 mars 2015, le préfet de police a rejeté sa demande, qu'il a également examinée au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. A... a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision que le préfet de police a également rejeté par une décision du 29 mai 2015 ; que le préfet de police relève appel du jugement du 16 décembre 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ses deux décisions et lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. A...;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour annuler les deux décisions en litige pour erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de M.A..., le Tribunal administratif de Paris s'est notamment fondé sur le fait que M. A... était célibataire et sans charge de famille et qu'il travaillait à mi-temps comme agent de service ; que, toutefois, le préfet de police fait valoir en produisant une fiche de salle remplie par M. A...le 3 décembre 2008 que l'intéressé avait lui-même indiqué avoir six enfants dans son pays d'origine, dont trois étaient mineurs à la date des décisions annulées, et une concubine, ce que le requérant ne conteste pas ; que le préfet de police fait également valoir, ce qui est au demeurant constant, que M. A...avait pris sa retraite en février 2015 antérieurement à l'arrêté du 16 mars 2015 lui refusant le renouvellement de son titre ; que, dans ces conditions le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a annulé les décisions en litige au motif qu'elles étaient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de M.A... ;
3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris et la Cour ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
5. Considérant que M. A...établit qu'il résidait en France de façon habituelle depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée ; qu'à cet égard, si le préfet de police soutient que M. A...ne justifie pas être entré en France dès le 22 décembre 2004 comme il le soutient, il résulte des mentions mêmes portées sur le titre de séjour délivré à celui-ci le 21 février 2006 qu'il est entré en France à la date indiquée ; qu'il est constant que son titre de séjour a ensuite fait l'objet de renouvellements jusqu'à l'arrêté contesté, lequel est intervenu le 16 mars 2015 alors que M. A...résidait de manière habituelle en France depuis plus de dix ans ; qu'il s'ensuit que, comme le fait valoir M.A..., l'arrêté du 16 mars 2015 a été pris au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet de police d'avoir recueilli l'avis de la commission du titre de séjour avant de rejeter la demande de titre de séjour dont il était saisi ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 16 mars 2015 et sa décision du 29 mai 2015 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros que demande M. A...en remboursement des frais qu'il a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A...et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 mars 2017.
Le rapporteur,
L. NOTARIANNILe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA00780