Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 octobre 2017, M. A...demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'enjoindre au préfet des Yvelines de délivrer à sa famille un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est par une interprétation restrictive des textes que les premiers juges, n'ont pas tenu compte de l'évolution de ses ressources révélée par les documents qu'il produisait ; le juge a commis une erreur de fait et méconnu l'étendue de sa compétence en se fondant sur des données concernant ses revenus professionnelles caduques, ne tenant pas compte de son nouveau contrat de travail et de ses salaires depuis le 11 juillet 2016 ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Vergne a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant sénégalais entré en France le 25 mars 1999 et titulaire d'une carte de résident depuis le 6 avril 2010, a présenté au préfet des Yvelines une demande de regroupement familial au bénéfice de sa femme et de leur fille ; que, par une décision du 7 juin 2017, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande ; que M. A...relève appel du jugement en date du 9 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois (....) peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par les enfants du couple mineurs de dix-huit ans (....) " ; qu'aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales et des allocations (...). Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : / - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes (....) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 421-4 de ce code : " A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente les copies (...) des pièces suivantes : (...) 3° Les justificatifs des ressources du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint, tels que le contrat de travail dont il est titulaire ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur, les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, ainsi que le dernier avis d'imposition sur le revenu en sa possession, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document, et sa dernière déclaration de revenus. La preuve des revenus non salariaux est établie par tous moyens (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période, même si, lorsque ce seuil n'est pas atteint au cours de la période considérée, il est toujours possible, pour le préfet, de prendre une décision favorable en tenant compte de l'évolution des ressources du demandeur, y compris après le dépôt de la demande ;
3. Considérant que M. A...ne conteste pas que, comme le lui a opposé l'autorité administrative, ses ressources étaient inférieures à la moyenne du salaire minimum de croissance au cours des douze mois ayant précédé sa demande de regroupement familial du 5 juillet 2016, soit pendant la période de juillet 2015 à juin 2016 ; que s'il fait état de la conclusion, le 11 juillet 2016, d'un contrat à durée déterminée lui assurant un revenu mensuel brut de 2 300 euros, supérieur au SMIC brut qui était de 1 466,62 euros en 2016 et 1 480,27 en 2017, il ne produit en tout état de cause que 10 bulletins de salaires établis depuis cette embauche, comportant des montants inégaux et ne permettant pas d'établir, au regard de la période de référence de 12 mois définie par les dispositions applicables, que même à la date de la décision litigieuse, il disposait de revenus stables supérieurs aux planchers prévus par cette réglementation, lui permettant d'accueillir sa famille ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet des Yvelines aurait, à la date à laquelle il a statué, commis une erreur d'appréciation de sa situation et méconnu les dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être accueilli ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
5. Considérant que si M. A...fait valoir que la décision litigieuse porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard à son mariage, le 31 mai 2014, sur le territoire français, et à la naissance de sa fille le 29 août 2014, il n'apporte pas d'éléments de nature à établir la gravité de l'atteinte dont il se prévaut ; que s'il s'est marié le 31 mai 2014 en France avec une compatriote, Mme B...D..., alors présente sur le territoire en situation irrégulière, avec laquelle il a eu un enfant, né également en France le 29 août 2014, et s'il a demandé pour eux le bénéfice du regroupement familial, il déclare lui-même que son enfant vit en Espagne avec sa femme, à qui a été délivrée par cet Etat en 2015 une carte de résident valable jusqu'au 29 septembre 2020 ; que la décision litigieuse n'a ainsi, par elle-même, pas eu pour effet de porter atteinte à la cellule familiale, déjà séparée entre la France, où vit et travaille M.A..., et l'Espagne, où réside régulièrement son épouse avec leur enfant ; que, dans ces conditions, le préfet des Yvelines n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris la décision attaquée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision aurait été édictée en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
7. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit été dit au point 5, la décision litigieuse n'est pas à l'origine de la séparation géographique des parents de l'enfant de M.A..., qui vit avec sa mère en Espagne depuis 2015 ; que ce très jeune enfant n'a donc résidé que brièvement en France avec son père ; que la décision litigieuse, prise au motif que les conditions matérielles ne sont pas réunies, permettant l'accueil de cet enfant et de sa mère en France auprès de M. A..., ne peut être regardée comme ayant été prise en méconnaissance de l'intérêt supérieur de cet enfant ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être accueilli ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction, d'astreinte et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
N° 17VE03175 2