Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2013, MmeB..., représentée par Me Avi Kassi, avocat, demande à la Cour :
1° de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande :
2° de condamner l'État à l'indemniser à hauteur de la somme de 21 000 euros, tous postes de préjudices confondus ;
3° de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance.
Mme B...soutient que :
- la responsabilité de l'État est engagée en raison de la double carence fautive de l'administration, qui a une obligation de résultat pour la mise en oeuvre du droit à un logement décent et indépendant, et qui ne lui a fait aucune proposition de relogement alors que, par décision du 2 février 2011, la commission départementale de médiation du droit au logement de la Seine-Saint-Denis l'a reconnue prioritaire et devant être relogée d'urgence, et que, par un jugement du 6 mars 2012, le Tribunal administratif de Montreuil a enjoint au préfet de procéder à ce relogement, sous astreinte ;
- la somme allouée par le tribunal doit être portée à 21 000 euros dès lors qu'elle est contrainte de vivre depuis plusieurs années avec ses enfants dans un logement inadapté, ce dont elle souffre tant moralement que matériellement.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le décret n° 2008-1227 du 27 novembre 2008 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bergeret,
- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.
1. Considérant que MmeB..., qui avait saisi la la commission départementale de médiation du droit au logement de la Seine-Saint-Denis sur le fondement du droit opposable au logement, a été déclarée prioritaire et devant être relogée en urgence par une décision de cette commission en date du 2 février 2011 ; qu'en l'absence de proposition de relogement dans les six mois ayant suivi cette décision, elle a saisi le Tribunal administratif de Montreuil pour que son relogement soit ordonné en application de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation ; que, par un jugement du 6 mars 2012, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis d'assurer le relogement de Mme B...dans un appartement de type T4, sous une astreinte de 20 euros par jour de retard à compter du 6 avril 2012 ; qu'en l'absence de mesure d'exécution de ce jugement, MmeB..., par courrier du 20 novembre 2012 reçu le 30 novembre suivant, a saisi le préfet en vue d'être indemnisée à hauteur de 21 000 euros, outre intérêts, du préjudice subi du fait de son absence de relogement ; que, cette demande ayant été implicitement rejetée, l'intéressée a réitéré ses prétentions devant le Tribunal administratif de Montreuil ; que Mme B... relève appel du jugement de ce tribunal en date du 9 juillet 2013 en tant qu'il n'a fait droit à cette demande qu'à hauteur de la somme de 1 000 euros sur la période courant du 2 août 2011 au jour du jugement ;
En ce qui concerne la responsabilité :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 300-1 du code de la construction et de l'habitation : " Le droit à un logement décent et indépendant (...) est garanti par l'Etat à toute personne qui (...) n'est pas en mesure d'y accéder par ses propres moyens ou de s'y maintenir. / Ce droit s'exerce par un recours amiable puis, le cas échéant, par un recours contentieux dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent article et les articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 " ; qu'aux termes du II de l'article L. 441-2-3 du même code : " (...) Dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu'elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence. Elle détermine pour chaque demandeur, en tenant compte de ses besoins et de ses capacités, les caractéristiques de ce logement (...) / La commission de médiation transmet au représentant de l'Etat dans le département la liste des demandeurs auxquels doit être attribué en urgence un logement. / (...) Le représentant de l'Etat dans le département désigne chaque demandeur à un organisme bailleur disposant de logements correspondant à la demande. En Ile-de-France, il peut aussi demander au représentant de l'Etat d'un autre département de procéder à une telle désignation (...) / En cas de refus de l'organisme de loger le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département qui l'a désigné procède à l'attribution d'un logement correspondant aux besoins et aux capacités du demandeur sur ses droits de réservation (...) " ; que selon les dispositions de l'article L. 441-2-3-1 du code précité : " I. - Le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence et qui n'a pas reçu, dans un délai fixé par décret, une offre de logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son logement ou son relogement (...) / Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne, lorsqu'il constate que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation et doit être satisfaite d'urgence et que n'a pas été offert au demandeur un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités, ordonne le logement ou le relogement de celui-ci par l'Etat et peut assortir son injonction d'une astreinte " ; qu'aux termes de l'article R. 441-16-1 du même code dans sa rédaction applicable en l'espèce :
" A compter du 1er décembre 2008, le recours devant la juridiction administrative prévu au I de l'article L. 441-2-3-1 peut être introduit par le demandeur qui n'a pas reçu d'offre de logement tenant compte de ses besoins et capacités passé un délai de trois mois à compter de la décision de la commission de médiation le reconnaissant comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence. Dans les départements d'outre-mer et, jusqu'au 1er janvier 2014, dans les départements comportant au moins une agglomération, ou une partie d'une agglomération, de plus de 300 000 habitants, ce délai est de six mois " ;
3. Considérant que les dispositions précitées, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé leur adoption, fixent pour l'État une obligation de résultat dont peuvent se prévaloir les demandeurs ayant exercé les recours amiable ou contentieux prévus à l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation ; que, pour rendre effectif le droit à un logement décent et indépendant, dont l'État est le garant, le législateur a, d'une part, prescrit que le représentant de l'État dans le département du demandeur, ou des autres départements en ce qui concerne la région Ile-de-France, saisisse les bailleurs sociaux en vue du relogement de ce dernier dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision de la commission de médiation et, en cas de refus de ces organismes, procède à l'attribution d'un logement sur ses droits de réservation, et, d'autre part, institué un recours spécifique en faveur des demandeurs prioritaires n'ayant pas reçu d'offre, devant un juge doté d'un pouvoir d'injonction et d'astreinte pour que leur relogement soit assuré ;
4. Considérant qu'il n'est pas contesté que Mme B...n'a pas fait l'objet d'une proposition de relogement adaptée, après la décision précitée de la commission de médiation et après le jugement précité du 6 mars 2012, dans le délai requis ; qu'elle est, par suite, fondée, ainsi que les premiers juges l'ont constaté, à demander l'indemnisation des préjudices subis du fait de la double faute ainsi commise par les services de l'État au-delà du 2 août 2011, terme du délai accordé à l'État pour lui proposer un logement adapté par application de l'article R. 441-16-1 du code de la construction et de l'habitation ;
En ce qui concerne les préjudices :
5. Considérant que pour demander à la Cour de porter à 21 000 euros l'indemnisation à laquelle elle a droit, Mme B...se borne à indiquer qu'elle vit seule depuis plusieurs années avec ses enfants, qui seraient au nombre de deux, dans un logement inadapté, dont le caractère insalubre, évoqué devant le tribunal, compromettrait la santé de ces enfants, et qu'ainsi sa famille " souffre tant moralement que matériellement " ; qu'elle ne présente à la Cour, toutefois, aucune autre précision ni pièce justificative de ce caractère inadapté évoqué, ni de cette insalubrité suggérée, ni encore sur les troubles subis en conséquence par sa famille ; que, dans ces conditions, elle n'établit pas que les premiers juges auraient fait une insuffisante évaluation des préjudices subis du fait de la double carence fautive de l'administration en condamnant l'État à l'indemniser, comme indiqué ci-dessus, à hauteur d'une somme de 1 000 euros tous intérêts compris au titre de la période courant du 2 août 2011 au 9 juillet 2013 ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil n'a que partiellement accueilli sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente, au demeurant sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative alors qu'elle bénéficie de l'aide juridictionnelle totale, ne peuvent qu'être rejetées ; qu'enfin, en l'absence de dépens dans la présente instance, ses conclusions tendant à ce qu'ils soient mis à la charge de l'État ne peuvent également qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
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N° 13VE02919 3