Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 1er février 2016, MmeA..., représentée par Me Maillard, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler la décision du 24 mars 2014 ;
3° de prononcer la décharge de responsabilité solidaire sollicitée ;
Elle soutient que :
- en ce qui concerne la demande de décharge de responsabilité solidaire afférente à la taxe foncière sur le propriétés bâties, si le tribunal a relevé que cette taxe est exclue du dispositif prévu à l'article 1691 bis du code général des impôts, sa demande était également fondée, à titre subsidiaire, sur le moyen tiré de ce qu'en sa qualité de propriétaire indivis du logement familial, les services fiscaux ne pouvaient lui réclamer plus de la moitié du montant de la taxe foncière ; le tribunal n'a pas répondu à ce moyen, ni d'ailleurs à l'argument tiré de ce que le juge civil a condamné M. A... au paiement de l'intégralité de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant la durée de la procédure de divorce ;
- ses revenus, dont le montant s'élève à 300 euros mensuels et à seulement 3 272 euros au titre de l'année 2013, ne lui permettent pas de s'acquitter des impôts qui lui sont réclamés dès lors, en particulier, que M. A...ne s'acquitte pas du paiement des sommes et pensions alimentaires auxquelles il a été condamné ; la production de ses avis d'imposition au titre des revenus déclarés en 2013 et 2014 atteste qu'elle n'a perçu aucune pension alimentaire de la part de son époux et qu'elle ne perçoit que le revenu de solidarité active (RSA) versé par la caisse d'allocation familiale ; enfin, M. A...a reconnu devant le juge aux affaires familiales qu'il ne s'acquittait d'aucune des pensions auxquelles il était tenu ; c'est, par suite, à tort, que le tribunal administratif a estimé qu'elle ne justifiait pas suffisamment de ses revenus à la date de sa demande ;
- enfin, le tribunal affirme, de façon erronée, que l'organisme de Crédit Logement garantit le prêt immobilier relatif au logement familial ; or, un tel organisme est seulement chargé de recouvrer les créances impayées et d'engager des poursuites en lieu et place de la banque, ainsi qu'il résulte des termes de la lettre adressée par cet organisme en date du 10 mars 2014 ; c'est, dès lors, en méconnaissance de la portée des pièces fournies que le tribunal administratif a estimé qu'elle ne justifiait pas de la disproportion entre sa situation financière et patrimoniale au 9 décembre 2013 et le montant des dettes fiscales ;
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Locatelli,
- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public,
1. Considérant que Mme A...relève appel du jugement du 1er décembre 2015 du Tribunal administratif de Montreuil rejetant sa demande d'annulation de la décision du 24 mars 2014 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de la Seine-Saint-Denis a refusé de faire droit à sa demande de décharge de responsabilité solidaire pour le paiement des cotisations d'impôt sur le revenu et de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles son mari et elle-même ont été assujettis au titre, respectivement, de l'année 2010 et de l'année 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, à hauteur d'une somme globale de 5 359 euros ;
Sur l'exception d'incompétence tirée de ce que les conclusions d'appel tendant à la décharge de l'obligation de payer la taxe foncière sur les propriétés bâties ont été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1691 bis du code général des impôts : " I. - Les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont tenus solidairement au paiement : / 1° De l'impôt sur le revenu lorsqu'ils font l'objet d'une imposition commune ; / 2° De la taxe d'habitation lorsqu'ils vivent sous le même toit. / II. - 1. Les personnes divorcées ou séparées peuvent demander à être déchargées des obligations de paiement prévues au I ainsi qu'à l'article 1723 ter-00 B lorsque, à la date de la demande : / (...) d) L'un ou l'autre des époux ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité a abandonné le domicile conjugal ou la résidence commune. / 2. La décharge de l'obligation de paiement est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. (...) / 3. Le bénéfice de la décharge de l'obligation de paiement est subordonné au respect des obligations déclaratives du demandeur prévues par les articles 170 et 885 W à compter de la date de la fin de la période d'imposition commune. (...) " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-1 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, dans les litiges énumérés aux 1°, 4°, 5°, 6°, 7°, 8° et 9° de l'article R. 222-13, le tribunal administratif statue en dernier ressort. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 222-13 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller ou ayant une ancienneté minimale de deux ans statue en audience publique et après audition du rapporteur public : (...) / 5° Sur les recours relatifs aux taxes syndicales et aux impôts locaux autres que la taxe professionnelle ; (...) / 8° Sur les requêtes contestant les décisions prises en matière fiscale sur des demandes de remise gracieuse " ;
4. Considérant que, d'une part, l'article 1691 bis du code général des impôts institue un droit à décharge de la solidarité au bénéfice des contribuables qui remplissent les conditions qu'il énonce ; que, par suite, la demande d'annulation de la décision par laquelle l'administration fiscale rejette la demande de décharge présentée sur le fondement de ces dispositions ne tend pas à la contestation d'une décision prise en matière fiscale sur une demande de remise gracieuse au sens du 8° de l'article R. 222-13 du code de justice administrative ; que, d'autre part, cette décision est prise après une appréciation de la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur, rapportée à sa dette fiscale, quelles que soient les impositions qui la composent ; que, par suite, le recours formé contre cette décision qui ne porte ni sur l'assiette ni sur le recouvrement de l'impôt, ne peut être regardé, alors même que l'impôt en cause est un impôt local, comme entrant dans la catégorie visée au 5° de l'article R. 222-13 ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de Mme A... dirigée contre la décision par laquelle le directeur départemental des finances publiques du Val-d'Oise a refusé de la décharger de sa responsabilité de conjoint solidaire sur le fondement de l'article 1691 bis précité, qui n'a pas été rendu en dernier ressort, en ce compris le paiement de la taxe foncière sur les propriétés bâties, est susceptible d'appel en application des dispositions de l'article R. 811-1 du code de justice administrative et ne peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation ; que la requête ne ressortit donc pas, même pour partie, à la compétence du Conseil d'Etat, mais à celle du juge d'appel ; que, par suite, l'exception d'incompétence opposée par le ministre ne peut être accueillie ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
6. Considérant que le moyen présenté par Mme A...dans sa demande, tiré de ce que, elle-même et son époux étant propriétaires indivis du logement familial, l'administration fiscale ne pouvait exiger qu'elle s'acquittât de l'intégralité de la taxe foncière sur les propriétés bâties, se rattache au bien-fondé ou au recouvrement de cet impôt ; qu'il est, dans cette mesure, inopérant aux fins d'obtenir la décharge de responsabilité solidaire sollicitée sur le fondement de l'article 1691 bis du code général des impôts ; que, par suite, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu d'y répondre expressément, ne saurait avoir entaché le jugement attaqué d'omission à statuer pour ce motif ;
Sur la décharge de responsabilité du conjoint solidaire en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre de l'année 2013 :
7. Considérant que la responsabilité solidaire des époux prévue par les dispositions précitées de l'article 1691 bis du code général des impôts ne s'applique qu'en matière d'impôt sur le revenu et de taxe d'habitation ; que, par suite, en en déduisant que Mme A...ne pouvait demander à être déchargée de la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre de cette solidarité, le tribunal administratif, qui n'a pas statué au-delà des conclusions dont il était saisi, a, à bon droit, soulevé d'office, ainsi qu'il y était tenu, le moyen tiré de la méconnaissance du champ d'application de l'article 1691 bis du code général des impôts ; que, par suite, Mme A...ne saurait être exemptée, sur le fondement de ces dispositions, du paiement de la taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre de l'année 2013 ;
Sur la décharge de responsabilité du conjoint solidaire en matière d'impôt sur le revenu dû par le foyer fiscal que Mme A...formait avec son époux au titre de l'année 2010 :
8. Considérant que si, à la date de sa demande en décharge de responsabilité solidaire, présentée le 9 décembre 2013, Mme A... soutenait ne percevoir que le revenu de solidarité active, avoir déclaré un revenu annuel de 3 272 euros au titre de l'année 2013 alors qu'elle avait deux enfants à charge et que son mari s'était soustrait au paiement des pensions alimentaires mis à sa charge par ordonnances des 28 septembre 2010, 5 juin 2012 et 5 mars 2013 jointes à sa réclamation, il résulte, toutefois, de l'instruction, et n'est pas contesté, que Mme A...était propriétaire indivis, avec son époux, d'un bien immobilier situé à Bagnolet qui, acquis en 2001 pour un prix de 259 163 euros, était constitué de deux logements, dont l'un était donné en location pour un loyer mensuel de 625 euros et avait dégagé un revenu foncier de 3 652 euros au titre de l'année 2010 ; qu'à défaut d'avoir justifié, à la date de sa demande en décharge de responsabilité solidaire, la valeur de l'actif net susceptible de lui revenir au titre de cet immeuble en cas de partage, ni la situation locative du logement précité, alors surtout que les pièces produites autres que celles relatives aux trois ordonnances du juge aux affaires familiales n'ont, ou pas été produites à l'administration, ou l'ont été postérieurement à sa réclamation en méconnaissance de l'article 382 quater de l'annexe II au code général des impôts, lequel dispose expressément que " le demandeur ne peut soumettre au juge des pièces justificatives autres que celles qu'il a déjà produites à l'appui de la demande de décharge de responsabilité qu'il a présentée au directeur départemental des finances publiques ou au directeur en charge du service à compétence nationale, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans cette demande ", MmeA..., dès lors qu'elle ne l'établit pas, n'est donc pas fondée à soutenir qu'il existait une disproportion marquée entre sa situation financière et patrimoniale, nette de charges, et le montant de sa dette fiscale à l'impôt sur le revenu, à la date de sa demande en décharge de responsabilité solidaire ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
N° 16VE00321 4