Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée 19 décembre 2016, Mme B...représentée par Me Julienne, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué, en tant qu'il porte refus d'admission au séjour, est suffisamment motivé en ce qu'il se borne à se référer à la procédure relative au droit d'asile sans aucune considération pour sa situation personnelle ;
- cette décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi qu'en attestent les différentes pièces médicales versées au dossier ;
- cet arrêté, en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, est insuffisamment motivé pour les mêmes motifs que ceux concernant le refus de titre de séjour ;
- cette mesure d'éloignement méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; en effet, en estimant qu'elle était veuve et que de deux de ses enfants vivaient au pays, le préfet a commis une erreur de fait qui n'est pas demeurée sans incidence sur sa décision dès lors qu'elle est sans enfant ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la fragilité de son état de santé et de la présence de nombreux membres de sa famille en France ;
- cette décision contrevient à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle demeure traumatisée par les persécutions subies et souffre de troubles psychiatriques reconnus nécessitant un suivi spécialisé, non disponible dans son pays d'origine ;
- l'arrêté attaqué, en tant qu'il fixe le pays dont elle a la nationalité comme pays de renvoi, méconnaît, pour les motifs sus-relatés, ces mêmes stipulations.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 janvier 2017.
Vu les autres pièces du dossier, notamment les pièces complémentaires transmises
le 7 mars 2017.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Locatelli a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeB..., ressortissante de la République démocratique du Congo, née le 7 novembre 1970, relève appel du jugement du 11 juillet 2016 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Yvelines refusant de lui délivrer le titre de séjour qu'elle avait sollicité sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ;
Sur la légalité de la décision portant refus d'admission au séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué, qui vise, notamment, les articles L. 314-11 8° et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, indique également, après avoir rappelé que Mme B...avait sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 et relevé que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié, que l'intéressée a déclaré être veuve et mère de deux enfants résidant dans son pays d'origine et qu'ainsi, en refusant de l'admettre au séjour, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il précise, par ailleurs, que Mme B...n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de cette même convention ; que, par suite, cette décision est suffisamment motivée au regard de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, sans qu'importe la circonstance, sans incidence en l'espèce, que le préfet n'a pas examiné sa situation personnelle au regard des dispositions, dont la requérante ne s'était pas prévalue dans sa demande, du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'étranger ; que, lorsque le préfet recherche d'office si celui-ci peut bénéficier d'un titre de séjour sur un ou plusieurs autres fondements possibles, l'intéressé peut alors se prévaloir à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de la méconnaissance des dispositions au regard desquelles le préfet a également fait porter son examen ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Yvelines, qui avait été saisi, par MmeB..., d'une demande de délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le seul fondement des dispositions du 8° de l'article
L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a examiné d'office cette demande également au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 de ce code ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en lui opposant un refus de séjour, le préfet des Yvelines aurait méconnu ces dernières dispositions, qu'il n'a pas examinées d'office, ce à quoi il n'était pas tenu, ne peut qu'être écarté comme inopérant ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) : 3° Si la délivrance (...) d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...). / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ;
5. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 2., que la décision portant refus d'admission au séjour est motivée ; qu'en outre, l'arrêté déféré vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permet d'assortir ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, notamment lorsque la délivrance d'un titre de séjour a été refusée à l'étranger ; que, dans la mesure où la situation de Mme B...relevait du cas visé au 3° du I de cet article pour lequel la mesure d'éloignement n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au refus de séjour lorsque celle-ci est
elle-même motivée, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement prononcée à son encontre serait insuffisamment motivée ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., entrée en France en 2014, disposait de moins de deux ans de présence habituelle sur le territoire national à la date de l'arrêté attaqué ; que, célibataire et sans charge de famille, elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales et amicales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans, éloignée des membres de sa famille résidant en France ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, et nonobstant la double circonstance que, d'une part, une partie de sa famille réside régulièrement en France et que, d'autre part, le préfet des Yvelines - dont il n'est pas contesté qu'il s'est conformé aux déclarations de Mme B...- a commis une erreur de fait en estimant que la requérante était veuve et mère de deux enfants, l'obligation de quitter le territoire français dont le refus de séjour a été assorti ne saurait, dans les circonstances de l'espèce, avoir porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que, par suite, elle ne méconnaît pas les stipulations l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date où le préfet des Yvelines a pris à l'encontre de la requérante la mesure d'éloignement contestée, Mme B...avait fait état d'un quelconque problème de santé ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu, à cette date, de saisir pour avis le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé publique d'Ile-de-France, ni d'examiner les conséquences de cette mesure d'éloignement sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au demeurant applicables aux seules décisions portant refus de séjour, ni, en tout état de cause, sur le fondement de celles du 10° de l'article L. 511-4 du même code ; que, de surcroît, les certificats médicaux produits par MmeB..., tous délivrés par le même médecin psychiatre, lesquels se bornent à faire état, sans autre précision, de ce que la patiente fait l'objet d'un suivi régulier, n'établissent pas, dans les termes généraux où ils sont rédigés, que la requérante ne pourrait faire l'objet de soins appropriés dans son pays d'origine ; que, compte tenu de ces éléments et de ce qui a déjà été dit au point 7., le préfet des Yvelines, en obligeant Mme B...à quitter le territoire français, ne peut être regardé comme ayant commis, dans les circonstances de l'espèce, une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement, dont le refus de séjour avait été assorti, sur la situation personnelle et médicale de MmeB... ;
9. Considérant, enfin, que le moyen tiré par un ressortissant étranger des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine est inopérant à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français dès lors que cette mesure d'éloignement ne fixe aucun pays de renvoi ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
10. Considérant, ainsi qu'il a déjà été au point 8., qu'il n'est pas établi, au vu des documents médicaux versés au dossier que Mme B...serait dans l'impossibilité de suivre un traitement médical approprié en République démocratique du Congo, ni que les événements survenus dans ce pays ont été à l'origine d'un syndrome post-traumatique pour l'intéressée ; que, dans ces conditions, le retour de Mme B...en République démocratique du Congo ne saurait, pour ces seuls motifs, avoir pour conséquence de la soumettre à des traitements inhumains et dégradants au sens et pour l'application de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui n'a pas, dès lors, été méconnu ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
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N° 16VE03690