2° d'annuler les décisions des 29 avril et 8 juillet 2013 du président du conseil départemental des Yvelines ;
3° de condamner le conseil départemental des Yvelines à lui verser la somme de 30 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral du fait du non-renouvellement de son agrément d'accueillant familial ;
4° de condamner le conseil départemental des Yvelines à lui verser la somme de 81 445 euros au titre de la réparation de son préjudice économique subi depuis le mois de juin 2013 du fait du non-renouvellement de son agrément ;
5° de condamner le conseil départemental des Yvelines à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- la procédure devant le tribunal n'a pas été contradictoire et est donc entachée d'irrégularité ;
- le rapport de la commission d'agrément du 16 avril n'est pas signé, et est donc irrégulier, Mme A... n'a pas eu connaissance de ce rapport, et un des membres de cette commission était partial ;
- la requérante n'a jamais fait l'objet de la moindre remarque ou injonction de la part du conseil départemental ou de l'ADAPEI en plus de cinq années d'activité ;
- le recours est motivé et donc recevable ;
- la motivation du jugement est défaillante, s'étant fondé sur des manquements constatés depuis 2009 ; les griefs retenus par le président du conseil départemental pour refuser de renouveler l'agrément de la requérante ne sont pas établis ;
- la procédure menée par le président du conseil départemental est irrégulière et n'a respecté ni le principe du contradictoire ni les droits des personnes accueillies ;
- la décision de refus d'agrément est illégale car arbitraire.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... A... a obtenu, le 5 juillet 2007, un agrément en tant qu'accueillante familiale, l'autorisant à accueillir deux personnes âgées ou handicapées. Le 5 juin 2008, cet agrément a été étendu par le président du conseil départemental des Yvelines, permettant l'accueil d'une troisième personne âgée ou handicapée. La demande de renouvellement d'agrément déposée par Mme A... le 4 février 2013 a fait l'objet d'une décision de refus par le président du conseil départemental, notifiée par une lettre recommandée avec accusé de réception le 29 avril 2013. Mme A... a alors formé un recours gracieux le 7 mai 2013 contre cette décision. Le président du conseil départemental a rejeté ce recours gracieux par un courrier du 8 juillet 2013. Par un jugement du 30 juin 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de Mme A... tendant, d'une part, à l'annulation des décisions des 29 avril 2013 et 8 juillet 2013 et, d'autre part, à ce que le département des Yvelines soit condamné à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice moral subi et la somme de 81 445 euros en réparation du préjudice économique subi. Mme A... relève régulièrement appel de ce jugement.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposée en défense par le conseil départemental des Yvelines, sur la légalité des décisions attaquées :
Sur la régularité du jugement :
2. Mme A... soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé en ce qu'il indiquerait en son point 4 que le Président du conseil départemental s'est fondé sur des faits constatés en 2009 alors qu'ils ne seraient pas établis. Toutefois, il ressort des termes de ce jugement que le point 4 se borne à mentionner les motifs sur lesquels il s'est fondé pour refuser de renouveler l'agrément de Mme A..., sans développer d'analyse ou d'appréciation sur la situation de Mme A.... Par ailleurs les premiers juges ont écarté le moyen tiré du non-respect du contradictoire de la procédure administrative de renouvellement d'agrément au motif qu'il a été invoqué tardivement. Le moyen tiré d'une insuffisante motivation du jugement doit donc être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, le moyen tiré en première instance du vice de procédure en l'absence de respect du principe du contradictoire a écarté comme irrecevable en première instance au motif que, constituant un moyen de légalité externe, il a été tardivement invoqué dès lors qu'il a été soulevé plus de deux après l'enregistrement de la requête de première instance, dans laquelle n'étaient soulevé que des moyens de légalité interne. Réinvoqué en appel, il relève d'une cause juridique distincte des moyens recevables soulevés en appel. Il est irrecevable et ne peut qu'être écarté. Les moyens tirés de l'irrégularité du rapport de la commission d'agrément du 16 avril en l'absence de signature, de ce qu'elle n'a pas eu connaissance de ce rapport, et de la partialité d'un des membres de cette commission doivent être écartés pour le même motif.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles, dans sa version en vigueur depuis le 30 décembre 2015 : " Pour accueillir habituellement à son domicile, à titre onéreux, des personnes âgées ou handicapées adultes n'appartenant pas à sa famille jusqu'au quatrième degré inclus et, s'agissant des personnes handicapées adultes, ne relevant pas des dispositions de l'article L. 344-1, une personne ou un couple doit, au préalable, faire l'objet d'un agrément, renouvelable, par le président du conseil départemental de son département de résidence qui en instruit la demande. La personne ou le couple agréé est dénommé accueillant familial. L'agrément ne peut être accordé que si les conditions d'accueil garantissent la continuité de celui-ci, la protection de la santé, la sécurité et le bien-être physique et moral des personnes accueillies, si les accueillants se sont engagés à suivre une formation initiale et continue et une initiation aux gestes de secourisme organisées par le président du conseil départemental et si un suivi social et médico-social des personnes accueillies peut être assuré. Un décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. (...)Toute décision de refus d'agrément est motivée et, lorsqu'elle fait suite à une demande de renouvellement d'agrément, prise après avis de la commission consultative mentionnée à l'article L. 441-2. " ; aux termes de l'article R. 441-1 dudit code : " Pour obtenir l'agrément mentionné à l'article L. 441-1 du présent code, la personne ou le couple proposant un accueil à son domicile, à titre habituel et onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes doit : / 1° Justifier de conditions d'accueil permettant d'assurer la santé, la sécurité, le bien-être physique et moral des personnes accueillies ; (...) ". Enfin, l'article R. 441-7 du même code prévoit que : " (...) La demande de renouvellement de l'agrément est déposée et instruite dans les mêmes conditions que la demande initiale. (...) ".
5.Pour refuser de délivrer à Mme A... le renouvellement d'agrément sollicité, le président du conseil départemental s'est fondé sur des manquements consistant en l'absence des conditions garantissant la protection de la santé, la sécurité et le bien-être physique et moral des personnes accueillies et permettant l'exercice d'un suivi social et médico-social satisfaisant tels que définis dans le contrat d'accueil et à l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles. Le président du conseil départemental des Yvelines a reproché à Mme A..., en matière de bien-être des personnes accueillies, leur sollicitation insuffisante dans la vie quotidienne, de nature à affecter l'évolution de leur état de santé, et le refus de sa part de toute intervention extérieure de nature à répondre aux besoins de stimulation inhérents à leur pathologie. Il a également été reproché à Mme A... un manque de réserve et de discrétion dans les liens familiaux des accueillis, ainsi qu'une ingérence dans leur vie personnelle.
6. Il ressort des pièces du dossier et notamment du compte-rendu du docteur Picon en date du 12 avril 2013, concluant à un avis réservé et précisant qu'il était " souhaitable de réexaminer l'orientation " de l'une des personnes accueillies, du rapport de Mme B..., responsable de l'accueil familial à caractère social du département des Yvelines et du compte-rendu de Mme C..., psychologue auprès de l'accueil familial à caractère social, tous produits devant la commission consultative d'agrément des accueillants familiaux réunie le 16 avril 2013, que plusieurs manquements ont été constatés depuis 2009 de façon concordante. Enfin, il ressort du procès-verbal de la commission d'agrément du 16 avril 2013, qu'il a été demandé à plusieurs reprises à l'intéressée de ne pas s'immiscer dans la vie privée de ses accueillis, consignes qu'elle n'a pas suivies, Mme A... ayant organisé, contre l'avis de la curatrice et des professionnels de l'accueil familial, une rencontre avec l'ami de l'une des personnes accueillies.
7.Il ressort également des pièces du dossier que depuis 2009 les professionnels du département des Yvelines et de l'association départementale de parents et amis de personnes handicapées mentales (ADAPEI) rencontrent d'importantes difficultés pour instaurer des relations stables et de confiance avec Mme A..., entraînant un manque global de coopération dans l'accompagnement de la prise en charge des deux personnes accueillies. Ont également été constatés une sollicitation insuffisante dans la vie quotidienne et une faible activité sociale des personnes accueillies, une négligence quant à leur hygiène, une ingérence dans la vie personnelle, contre l'avis d'une curatrice et des professionnels de l'accueil familial, le refus de la requérante de participer à l'élaboration d'un projet de vie, le refus de la prise en compte des avis émis par les professionnels du département et de toute intervention de professionnels au domicile, des difficultés à accepter les observations et conseils des professionnels du département, des esquives à leurs questions concernant la prise en charge en tant qu'accueillant familial, une attitude défensive ainsi que l'absence de partage des informations nécessaires au suivi des personnes accueillies.
8. Enfin, la piscine de la requérante ne fait pas l'objet d'une protection permanente et présente par conséquent un risque pour la sécurité des personnes handicapées accueillies. En ne produisant aucune attestation de conformité, Mme A... n'a pas établi que sa piscine était protégée en permanence.
9. Si la requérante a produit plusieurs témoignages écrits attestant de son comportement exemplaire et du bien-être apparent des personnes accueillies, ceux-ci ne sont pas de nature à établir de façon suffisamment probante le caractère inexact des faits ayant justifié la décision attaquée.
10. Ces manquements, dont la matérialité n'est pas utilement contestée par la requérante, justifient à eux seuls la décision du président du conseil départemental de refus du renouvellement de l'agrément de Mme A... à l'accueil de personnes adultes handicapées. La requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision de refus de renouvellement de son agrément serait entachée d'erreur de fait ou d'erreur d'appréciation.
11.En troisième lieu, si la requérante soutient que la décision de refus de renouvellement de son agrément est arbitraire, elle ne l'établit pas.
12. En dernier lieu, Mme A... ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L.441-2 du code de l'action sociale et des familles relatives au retrait d'agrément, et non aux refus de renouvellement.
Sur les conclusions indemnitaires de la requérante, et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité :
13. Les décisions des 29 avril et 8 juillet 2013 du président du conseil départemental des Yvelines, n'étant pas illégales, les conclusions de Mme A... tendant à ce que le conseil départemental des Yvelines soit condamné à lui verser les sommes de 30 000 euros et de 81 445 euros, en réparation de ses préjudices moral et économique allégués doivent, en tout état de cause, être rejetées.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions à fin d'annulation des décisions des 29 avril et 8 juillet 2013, et, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'indemnisation.
Sur les conclusions du conseil départemental tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :
15. Aux termes de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 rendu applicable par l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux./ Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts (...) ".
16. Les passages dont la suppression est demandée, notamment ceux alléguant dans la requête d'appel, au sujet de Mme B..., responsable de l'accueil familial pour le département des Yvelines, que celle-ci " est parvenue à ses fins avec M. E... (...) qui est donc parti de chez Mme A... le 30 mai 2014, contre sa volonté " et que Mme A... aurait subi un préjudice moral " du fait du harcèlement et du dénigrement dont elle a été victime de la part de Mme B..., et des répercussions engendrées sur ses accueillis (décès de M. E...) ", n'excèdent pas le droit à la libre discussion et ne peuvent être regardés comme présentant un caractère injurieux, outrageant ou diffamatoire pour Mme B..., agent du département des Yvelines, au sens des dispositions précitées. Il n'y a pas lieu de supprimer ces passages des écritures de la requérante, en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du conseil départemental des Yvelines, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de celle-ci une somme de 1 500 euros à verser au conseil départemental au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... A... est rejetée.
Article 2 : Mme D... A... est condamnée à verser au conseil départemental des Yvelines la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
N° 16VE02843 2