Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 décembre 2019 et des mémoires complémentaires enregistrés les 16 et 24 février 2021, M. C..., représenté par Me Weinberg, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler l'arrêté du préfet de police en date du 28 septembre 2019 ;
3° à titre principal, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 25 euros par jour de retard ;
4° à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 25 euros par jour de retard, et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
5° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient :
- sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux et préalable de sa situation ;
- elle est entachée d'une erreur de fait dès lors que contrairement à ce qu'elle indique il disposait d'un passeport en cours de validité ;
- le préfet a commis une erreur de droit en prenant une mesure d'éloignement à son encontre sans se prononcer au préalable sur sa demande de titre de séjour ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- sur la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., ressortissant tunisien, né le 15 juillet 1994, qui déclare être entré en France le 1er janvier 2015, a été interpelé le 28 septembre 2019. Par un arrêté du même jour, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit. M. C... relève appel du jugement du 12 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ".
3. En premier lieu, M. C... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqué en première instance et tirés de que la décision attaquée est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
4. En deuxième lieu, M. C... soutient que l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance du principe du contradictoire garanti par l'article 41 paragraphe 2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Cette disposition énonce dans son paragraphe 1 que : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ", et dans son paragraphe 2, que : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ". Le paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte dispose également que : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union ".
5. Selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne C-383/13 PPU du 10 septembre 2013, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal d'audition dressé le 28 septembre 2019, que M. C... a été entendu par les services de police à la suite de son interpellation. A cette occasion, il a communiqué divers renseignements concernant sa situation personnelle et familiale. Il lui a par ailleurs été rappelé qu'il avait fait l'objet en mars 2017 d'une mesure d'éloignement à laquelle il n'avait pas déféré malgré le rejet de son recours contre cette décision. L'intéressé a pu ainsi faire valoir qu'il souhaitait rester en France. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux du préfet de police aurait été pris en méconnaissance du principe général du droit d'être entendu issu du droit de l'Union européenne doit être écarté.
6. En troisième lieu, M. C... établit par les pièces qu'il produit en appel qu'il est titulaire d'un passeport délivré le 7 novembre 2015 par les autorités consulaires tunisiennes. Si l'arrêté du 28 septembre 2019 mentionne ainsi à tort que M. C... est dépourvu de document transfrontière, cette erreur est sans incidence sur la légalité de la décision du préfet de police dès lors que l'intéressé n'établit pas ainsi être entré régulièrement sur le territoire français et pouvait donc faire l'objet d'une mesure d'éloignement sur le fondement des dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précédemment cité. Le moyen tiré de l'erreur de fait doit, par suite, être écarté.
7. En quatrième lieu, M. C... soutient qu'il a formulé en avril 2019 une demande de titre de séjour auprès de la préfecture du Val d'Oise et qu'ainsi le préfet de police ne pouvait prendre une mesure lui faisant obligation de quitter le territoire français sans avoir au préalable statué sur cette demande de titre de séjour. Toutefois, le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative décide de prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger qui se trouve, à l'instar de M. C..., dans l'un des cas mentionnés au I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision en litige doit être écarté.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est célibataire et sans enfant. En outre, l'intéressé n'établit pas être isolé en cas de retour dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 19 ans à tout le moins. Il n'établit pas davantage l'intensité des attaches qu'il a nouées sur le territoire national et ne justifie pas d'une insertion sociale ou professionnelle particulière en France. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas, en méconnaissance des stipulations précitées, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en lui faisant obligation de quitter le territoire français. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. Ces moyens doivent par suite être écartés.
Sur la décision portant fixation du pays de destination :
10. M. C... n'établit pas que la décision portant obligation de quitter le territoire français pris à son encontre est illégale. Dès lors, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination n'est pas fondée et doit être rejetée.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être également rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
N° 19VE04123 2