Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 septembre 2019, Mme C..., représentée par Me de Froment, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler cette ordonnance ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir cette décision du 6 avril 2018 du président du Conseil départemental de l'Essonne ;
3° de mettre à la charge du département de l'Essonne une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance attaquée est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur de droit, d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation dès lors que ses intérêts moraux et matériel se situent en Guadeloupe ;
- la décision en litige est entachée d'erreur de droit, en particulier en violation de la circulaire du 3 janvier 2007 ainsi que d'erreur de fait ;
- elle est entachée d'erreur d'appréciation ;
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 78-399 du 20 mars 1978 relatif, pour les départements d'outre-mer, à la prise en charge des frais de voyage de congés bonifiés accordés aux magistrats et fonctionnaires civils de l'Etat ;
- le décret n° 88-168 du 15 février 1988 pris pour l'application des dispositions du deuxième alinéa du 1° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., pour le département de l'Essonne.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 6 avril 2018 du président du Conseil départemental de l'Essonne rejetant son recours gracieux formé contre la décision du 26 janvier 2018 par laquelle il a rejeté sa demande tendant au bénéfice, au titre de l'année 2018, de congés bonifiés au titre du décret n° 78-399 du 20 mars 1978. Toutefois, par une ordonnance n° 1803947 du 11 juillet 2019, le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en vertu du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Mme C... en relève appel.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Tout d'abord, il ressort de l'examen de l'ordonnance attaquée, que celle-ci est suffisamment motivée en droit comme en fait, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le tribunal administratif n'aurait pas fait état de l'intégralité des éléments développés par la requérante.
3. Ensuite, les moyens tirés de ce que l'ordonnance serait entachée d'erreur de droit, d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation, dès lors que les intérêts moraux et matériel de Mme C... se situeraient en Guadeloupe, se rattachent au bien-fondé de la décision juridictionnelle et non à sa régularité. Ils doivent être écartés pour ce motif.
Sur les conclusions en annulation :
4. Aux termes de l'article 1er du décret du 15 février 1988 susvisé : " Sous réserve des dispositions du présent décret, le régime de congé dont bénéficient les fonctionnaires territoriaux originaires des départements d'outre-mer (...) exerçant en métropole est défini par les dispositions des articles 1er à 11 du décret du 20 mars 1978 susvisé, qui s'appliquent aux fonctionnaires mentionnés au b de l'article 1er dudit décret. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 20 mars 1978 susvisé : " Les dispositions du présent décret s'appliquent aux magistrats et aux fonctionnaires relevant du statut général des fonctionnaires de l'Etat qui exercent leurs fonctions : (...) / b) Sur le territoire européen de la France si leur lieu de résidence habituelle est situé dans un département d'outre-mer. " et aux termes de l'article 3 du même décret : " Le lieu de résidence habituelle est le territoire européen de la France ou le département d'outre-mer où se trouve le centre des intérêts moraux et matériels de l'intéressé ". L'article 4 de ce décret prévoit que : " Les personnels mentionnés à l'article 1er peuvent bénéficier, dans les conditions déterminées par le présent décret, de la prise en charge par l'Etat des frais d'un voyage de congé, dit congé bonifié (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que, pour apprécier la localisation du lieu de résidence habituel d'un fonctionnaire, lieu où se trouve le centre de ses intérêts moraux et matériels, il peut être tenu compte de son lieu de naissance, de celui de sa résidence actuelle et de celle des membres de sa famille, du lieu où le fonctionnaire est propriétaire ou locataire de biens fonciers, titulaire de comptes bancaires, de comptes d'épargne ou de comptes postaux, ainsi que d'autres éléments d'appréciation parmi lesquels le lieu du domicile civil avant l'entrée dans la fonction publique de l'agent, celui où il a réalisé sa scolarité ou ses études, mais aussi la volonté manifestée par l'agent à l'occasion de ses demandes de mutation et de ses affectations ou la localisation du centre des intérêts moraux et matériels de son conjoint, étant rappelé que la République ne reconnaît que le mariage civil. Il incombe ainsi à l'administration d'apprécier le droit d'un agent à bénéficier de congés bonifiés sur la base d'un faisceau d'indices.
6. Mme C... fait valoir qu'elle est née en Guadeloupe en 1980, qu'elle y a été scolarisée, entre 1986 et la fin de l'année scolaire 1998, qu'elle est ensuite entrée dans la fonction publique territoriale, en février 2010, qu'elle a été titularisée en novembre 2012, et s'est mariée civilement le 15 décembre 2012 à Viry-Châtillon (Essonne), où elle habite, puis religieusement en Guadeloupe, en juillet 2013. Elle ajoute que ses parents et ses soeurs résident en Guadeloupe, que ses grands-parents y sont inhumés et qu'elle y retourne " fréquemment voir sa famille grâce à un congé bonifié qu'elle a ... toujours obtenu jusqu'au refus de 2018 ". Elle fait valoir, en particulier, qu'elle a bénéficié d'un congé bonifié en 2015. Toutefois l'intéressée ne dit mot, ni sur sa date d'arrivée en France, ni sur son lieu de résidence habituelle entre juillet 1998 et 2008, date à laquelle son premier enfant est né à Courcouronnes (Essonne). Mme C... s'est mariée civilement à Viry-Châtillon, en 2012. Elle a ensuite donné naissance à des jumeaux en 2016, à Corbeil-Essonnes. Elle doit donc être regardée comme ayant vécu en Guadeloupe jusqu'en 1998 et comme ayant résidé en France métropolitaine à compter de 2008, sans qu'il soit possible d'établir son lieu de résidence habituelle entre 1998 et 2008, ni en tout état de cause, si elle s'est effectivement rendue en Guadeloupe entre 1998 et juillet 2013. Il est enfin constant qu'à la date de la décision en litige, elle ne possédait ni bien foncier ni compte bancaire en Guadeloupe, qu'elle n'était pas non plus inscrite sur les listes électorales de Guadeloupe et qu'elle n'avait pas effectué de demande de mutation ni voyagé hors congés bonifiés vers ce territoire au cours des trois dernières années. Par ailleurs, la circonstance que Mme C... aurait bénéficié d'un congé bonifié en 2015 ne lui ouvre pas un droit à l'attribution d'un second congé de même nature. Il en va de même, enfin, de la circonstance que son époux aurait bénéficié d'un tel congé en 2018, pour s'y rendre avec leurs enfants. Dès lors, les moyens tirés de l'erreur de droit, de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation doivent être écartés, de même, en tout état de cause, que le moyen tiré de la violation de la circulaire du 3 janvier 2007 relative aux conditions d'attribution des congés bonifiés aux agents des trois fonctions publiques dont les énonciations se bornent à rappeler les critères de mise en oeuvre des dispositions citées aux points 3. et 4., telles qu'interprétées par la jurisprudence.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 janvier 2018 du président du Conseil départemental de l'Essonne rejetant sa demande tendant au bénéfice, au titre de l'année 2018, de congés bonifiés, ensemble le rejet de son recours gracieux.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le département de l'Essonne, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à Mme C... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions du département de l'Essonne tendant à l'application de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le surplus des conclusions du département de l'Essonne est rejeté.
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N° 19VE03168