Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 mars 2019 et 20 mars 2020, M. A..., représenté par Me C..., avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et de lui remettre, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi que la somme de 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un défaut de réponse à un moyen ;
- le premier juge a commis une erreur de droit au regard de l'article L. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté en litige est entaché d'incompétence de l'auteur de l'acte ;
- il n'est pas motivé ;
- il n'a pas été précédé d'un examen particulier de sa situation ;
- il a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a été pris en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il contrevient aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... A..., ressortissant bangladais né le 1er mars 1974 à Sylhet, qui a déclaré être entré en France le 1er mai 2013, a sollicité le 1er juillet 2013 son admission au séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-13-1 et L. 314-11-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, par arrêté du 3 décembre 2018, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 5 février 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. A... soutient que le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de l'insuffisance de motivation soulevé à l'encontre de l'arrêté attaqué, il ressort des écritures de première instance que M. A... n'avait pas soulevé ce moyen à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation. Il suit de là que ce moyen doit être écarté.
3. M. A... soutient par ailleurs que le premier juge aurait commis une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce moyen procède toutefois d'une contestation du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. Il doit dès lors être écarté.
Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
4. Aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions administratives individuelles défavorables qui constituent une mesure de police, doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".
5. M. A... soulève en appel des moyens nouveaux, tirés de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée et du défaut d'examen de sa situation personnelle. Il ressort, en effet, des pièces du dossier que, d'une part, l'arrêté en litige comporte des considérations de droit incohérentes, puisqu'il se fonde à la fois sur les dispositions des articles L. 313-13-1 et L. 314-11-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur le règlement n° 604/2013 du parlement européen, ainsi que le règlement de la commission du 2 septembre 2003 n° 1560/2003. D'autre part, l'arrêté litigieux ne comporte aucune considération de fait qui en constitue le fondement. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que l'arrêté en litige est dépourvu de motivation et est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a rejeté ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 3 décembre 2018 du préfet des Yvelines.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision intervienne dans un délai déterminé. ". Aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ".
7. Eu égard aux motifs d'annulation retenus, le présent arrêt n'implique pas qu'il soit délivré à l'intéressé un titre de séjour, mais uniquement qu'il soit enjoint au préfet territorialement compétent de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
8. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 1 000 euros.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 3 décembre 2018 du préfet des Yvelines est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet territorialement compétent de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me C..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 1 000 euros, sous réserve que cet avocat renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
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N° 19VE00912