Résumé de la décision
M. A... a demandé au ministre de la défense de lui communiquer les motifs d'une sanction disciplinaire infligée au lieutenant-colonel A. suite aux événements de Thiaroye en 1944. Le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, ce qui a conduit M. A... à se pourvoir en cassation. Le Conseil d'État a annulé le jugement du tribunal administratif en raison d'une irrégularité procédurale, à savoir l'absence de preuve que l'audience avait été publique. Cependant, il a rejeté la demande de M. A... sur le fond, considérant que le ministre de la défense avait légalement refusé de communiquer les documents demandés, en raison de leur modification et de l'application de la loi d'amnistie de 1947.
Arguments pertinents
1. Irrégularité de la procédure : Le Conseil d'État a constaté que le jugement du tribunal administratif ne prouvait pas que l'audience avait été publique, ce qui constitue une violation de l'article L. 6 du Code de justice administrative. Cela a justifié l'annulation du jugement.
2. Refus de communication des archives : Le Conseil d'État a affirmé que le ministre de la défense avait le droit de refuser la communication des documents, car les mentions manuscrites avaient été occultées conformément à la loi d'amnistie. Il a précisé que l'administration n'était pas tenue de reconstituer des documents dans leur version originale.
> "Il excède les prévisions des articles L. 213-1 et suivants du code du patrimoine que l'administration soit tenue, si elle est saisie d'une demande de communication d'archives dans une version qui n'existe plus, de les reconstituer dans leur version d'origine."
3. Inapplicabilité du règlement (UE) 2016/679 : Le Conseil d'État a rejeté l'argument selon lequel les décisions attaquées méconnaîtraient le règlement sur la protection des données, car ce règlement n'était pas en vigueur au moment des décisions.
Interprétations et citations légales
1. Code de justice administrative - Article L. 6 : Cet article stipule que les débats doivent se tenir en audience publique. L'absence de mention de la publicité de l'audience dans le jugement a conduit à l'annulation de celui-ci.
2. Code du patrimoine - Article L. 211-1 et L. 213-1 : Ces articles définissent les archives publiques comme communicables de plein droit, mais précisent également que certaines archives peuvent être soumises à des délais de communication, notamment en raison de la protection de la vie privée ou de la sécurité nationale.
> "Les archives publiques sont, sous réserve des dispositions de l'article L. 213-2, communicables de plein droit."
3. Loi n° 47-1504 du 16 août 1947 - Article 38 : Cet article interdit de rappeler les sanctions disciplinaires effacées par l'amnistie dans les dossiers administratifs. Toutefois, cela ne fait pas obstacle à la communication d'archives publiques, tant que les délais de communication sont respectés.
> "Il est interdit de rappeler ou de laisser subsister, sous quelque forme que ce soit, dans tout dossier administratif ou autre document quelconque, concernant les fonctionnaires, agents, employés ou ouvriers des services publics... les peines disciplinaires effacées par l'amnistie."
En conclusion, le Conseil d'État a annulé le jugement du tribunal administratif pour irrégularité procédurale, mais a rejeté la demande de M. A... sur le fond, confirmant le droit du ministre de la défense à refuser la communication des documents en raison de leur modification et des dispositions légales applicables.