Résumé de la décision
La décision porte sur une question prioritaire de constitutionnalité relative à l'article L. 863-2 du code de la sécurité intérieure, qui traite du partage d'informations entre les services de renseignement et les autorités administratives. La demande a été introduite par l'association La Quadrature du Net, qui conteste la conformité de cet article avec les droits et libertés garantis par la Constitution, notamment le droit au respect de la vie privée. Le Conseil d'État a décidé de renvoyer cette question au Conseil constitutionnel, considérant qu'elle présente un caractère sérieux. En attendant la réponse du Conseil constitutionnel, le Conseil d'État a sursis à statuer sur la requête de l'association.
Arguments pertinents
1. Applicabilité et non-conformité à la Constitution : Le Conseil d'État a constaté que l'article L. 863-2 est applicable au litige et n'a pas encore été déclaré conforme à la Constitution, ce qui permet de soulever une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
2. Équilibre entre ordre public et libertés individuelles : Le Conseil a souligné que c'est la responsabilité du législateur de trouver un équilibre entre la prévention des atteintes à l'ordre public et la protection des droits et libertés constitutionnels, en particulier celui au respect de la vie privée, en affirmant que "le grief tiré de ce que, faute de déterminer les conditions d'exploitation et de conservation des données, le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence, soulève une question présentant un caractère sérieux."
Interprétations et citations légales
1. Article L. 863-2 du Code de la sécurité intérieure : Cet article établit les modalités par lesquelles les services de renseignement peuvent partager des informations utiles pour l'exécution de leurs missions. Il précise que "Les services spécialisés de renseignement... peuvent partager toutes les informations utiles..." ainsi que la possibilité pour les autorités administratives de transmettre ces informations.
2. Article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 : Cet article fixe les conditions de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité, stipulant que "Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé... à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat..." Ce cadre juridique permet au Conseil d'État de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.
3. Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : Le droit au respect de la vie privée et le secret des correspondances sont explicitement protégés par l'article 2 de cette Déclaration, fournissant ainsi une base légale pour la contestation de l'article L. 863-2.
En résumé, la décision du Conseil d'État a comme conséquence le renvoi au Conseil constitutionnel de la question de la légalité de l'article L. 863-2 face aux droits constitutionnels, et marque ainsi un moment clé dans l'évaluation de la protection de la vie privée en lien avec les activités de renseignement.