Résumé de la décision
La décision analyse la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité des articles 35 et 39 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 relative aux pénitentiaires, ainsi que des articles 145-4 et 715 du Code de procédure pénale. Elle concerne les droits des personnes détenues, notamment leurs possibilités de recevoir des visites et d'effectuer des appels. Le Conseil d'État, après avoir examiné les arguments soulevés, a décidé de renvoyer ces questions au Conseil constitutionnel pour qu'il se prononce sur leur conformité à la Constitution.
Arguments pertinents
1. Applicabilité et antériorité des dispositions : La décision souligne que les dispositions législatives contestées sont applicables au litige et qu'elles n'ont pas été déclarées conformes à la Constitution précédemment, ce qui répond aux critères établis par l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958.
2. Question de sérieux : Les moyens soutenant que les articles en question portent atteinte aux droits garantis par la Constitution, notamment le droit à un recours effectif, révèlent un caractère sérieux. Ceci est fondé sur des affirmations que le législateur n’a pas pleinement respecté ses compétences stipulées par l’article 34 de la Constitution, en raison de l’absence de recours face à un défaut de réponse du juge d’instruction aux demandes de permis de visite (§ 4).
3. Compétence des autorités judiciaires : La décision perçoit la compétence accordée au procureur de la République pour statuer sur les demandes des détenus, ce qui soulève une question sur l’équilibre entre l’autorité judiciaire et les droits des détenus (§ 3).
Interprétations et citations légales
- Ordonnance n° 58-1067 - Article 23-5:
Cet article établit les conditions dans lesquelles une QPC peut être soulevée, stipulant que "le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé". Cela sert de fondation pour la possibilité de contester les articles relatifs aux droits des détenus.
- Code de procédure pénale - Article 715 :
Ce texte précise que les juges et les procureurs ont le pouvoir d’ordonner des mesures dans le cadre d’instructions judiciaires. L'analyse de ce texte permet de questionner la portée de cette compétence et son impact sur le droit des prévenus à être informés et à faire appel des décisions prises concernant leur détention et leur accès aux visites : "Le juge d'instruction, le président de la chambre de l'instruction et le président de la cour d'assises, ainsi que le procureur de la République et le procureur général, peuvent donner tous les ordres nécessaires...".
- Code de procédure pénale - Article 145-4 :
Cet article facilite les conditions dans lesquelles une personne placée en détention provisoire peut recevoir des visites. Cependant, la décision souligne qu'il est critiqué pour son incapacité à garantir un recours effectif en cas de refus, ce qui pourrait interférer avec les droits garantis : "A l'expiration d'un délai d'un mois à compter du placement en détention provisoire, le juge d'instruction ne peut refuser de délivrer un permis de visite à un membre de la famille de la personne détenue que par une décision écrite et spécialement motivée".
Cette décision met ipso facto en exergue l'équilibre délicat entre les prérogatives de la justice pénale et le respect des droits fondamentaux des détenus dans le cadre de la législation française. Les renvois au Conseil constitutionnel soulignent l'importance de la garantie des droits individuels face à l'exercice du pouvoir judiciaire.