Résumé de la décision
La présente décision concerne le pourvoi de MM. René et Julien Arnaud contre une ordonnance du président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille datée du 2 mai 2018, qui avait rejeté leur appel relatif à l'annulation d'un arrêté du maire d'Antibes retirant leur permis de construire pour fraude. Le Conseil d'État a annulé cette ordonnance, estimant qu'il y avait eu méconnaissance du principe du caractère contradictoire de la procédure, puisque l'ordonnance avait été rendue avant l'expiration du délai imparti pour la réplique des requérants. De plus, une somme de 2 000 euros a été mise à la charge de la commune d'Antibes-Juan-les-Pins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sans que les demandes de la commune à ce titre ne soient acceptées.
Arguments pertinents
Le Conseil d'État a souligné plusieurs points clés dans sa décision :
1. Méconnaissance du principe du caractère contradictoire : La décision du président de la cour administrative d'appel a été annulée sur la base de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, qui stipule que les présidents peuvent rejeter des requêtes d'appel "manifestement dépourvues de fondement" seulement après l'expiration du délai de recours. En prenant une décision avant l’expiration du délai imparti aux requérants pour présenter leur réplique, le président de la cour a enfreint ce principe fondamental. Le Conseil d'État a affirmé que "le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure."
2. Droits des requérants : En raison de cette irrégularité, les requérants ont été jugés fondés à demander l'annulation de l'ordonnance. Cela démontre l'importance accordée par le Conseil d'État à l'équité procédurale dans les affaires administratives.
3. Indemnisation : Le Conseil d'État a également décidé que la commune d'Antibes-Juan-les-Pins devait verser une somme de 2 000 euros à MM. Arnaud, en application de l'article L. 761-1, qui permet de couvrir les frais engagés par une partie dans le cadre d'une procédure, confirmant ainsi que les requérants ne peuvent pas être considérés comme la partie perdante dans ce cas.
Interprétations et citations légales
La décision repose principalement sur une interprétation strictement procédurale des textes qui régissent le fonctionnement des juridictions administratives :
- Code de justice administrative - Article R. 222-1 : Cet article stipule que les présidents des formations de jugement des cours peuvent rejeter des requêtes d'appel "manifestement dépourvues de fondement" uniquement après l'expiration du délai de recours imparti aux parties. Cela place une obligation très claire sur les juges de respecter le principe du contradictoire.
- D'autre part, l'article L. 761-1 du même code prévoit que "la partie qui perd le procès peut être condamnée à verser à l'autre une somme en remboursement de ses frais d'instance". Le Conseil d'État, en refusant la demande de la commune à ce titre, a affirmé que "ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de MM. Arnaud qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante".
Cette décision met donc en exergue le respect des droits des justiciables dans le cadre du procès administratif, renforçant ainsi les garanties procédurales en faveur des requérants. Elle souligne l'importance de la transparence et de l'égalité des armes dans le cadre des procédures judiciaires, spécifiquement dans le domaine administratif.