Résumé de la décision
Dans cette affaire, deux exploitations agricoles, l'EARL Clos Teddi et l'EARL Cave Lazzarini, contestent le cumul des sanctions prévues par plusieurs articles du Code du travail et du Code de l'entrée et du séjour des étrangers. Elles soutiennent que ce cumul porte atteinte aux principes de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines, garantis par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Le Conseil d'État a décidé de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel concernant la conformité de l'article L. 8253-1 du Code du travail à la Constitution.
Arguments pertinents
1. Applicabilité des dispositions législatives : Le Conseil d'État a jugé que les articles L. 8253-1 du Code du travail et L. 626-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers étaient applicables au litige. Cela souligne l'importance d'établir quel cadre législatif est en jeu dans les litiges administratifs.
2. Caractère sérieux des griefs : Les requérantes soutiennent que le cumul de sanctions enfreint le principe de nécessité, ce qui a été retenu comme une question présentant un caractère sérieux. Le Conseil d'État a expressément noté ce point, ouvrant la voie à une réévaluation de cette question par le Conseil constitutionnel.
> "Le moyen tiré de ce qu'elle porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au principe de nécessité des délits et des peines, en ce qu'elle permet le cumul de la contribution spéciale qu'elle institue avec la sanction pénale prévue à l'article L. 8256-2, soulève une question présentant un caractère sérieux."
Interprétations et citations légales
Article L. 8253-1 du Code du travail : Cet article stipule que tout employeur ayant embauché un travailleur étranger sans titre de travail est soumis à une contribution financière. Le montant de cette contribution peut être déterminé par décret et est susceptible de variations en fonction de diverses circonstances, notamment en cas de non-cumul d'infractions.
> "Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger sans titre de travail, une contribution spéciale."
Article L. 8256-2 du Code du travail : Cet article sanctionne pénalement l'employeur qui recrute un étranger sans titre, pouvant entraîner jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et une amende de 15 000 euros.
> "Le fait pour toute personne, directement ou par personne interposée, d'embaucher, de conserver à son service ou d'employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1, est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 15 000 euros."
La question centrale qui sera examinée par le Conseil constitutionnel sera donc de savoir si le cumul de ces deux régimes de sanctions respecte les principes de nécessité et de proportionnalité stipulés dans la Constitution, et par extension, si cela constitue une violation des droits fondamentaux de l’allocataire. La décision de transmettre cette question souligne l'importance de vérifier la conformité des lois aux principes constitutionnels.