Résumé de la décision
Dans cette affaire, la société Logis de Berri, M. B..., et Mme D... ont demandé l'annulation d'injonctions émises par le président du conseil général des Deux-Sèvres, ainsi que la suppression de certains écrits jugés injurieux issus de rapports d’un contrôle. Le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande, décision confirmée par la cour administrative d'appel de Bordeaux. Le Conseil d'État a admis le pourvoi uniquement concernant la demande de suppression d'écrits injurieux. Toutefois, le Conseil a rejeté cette demande, s’appuyant sur le fait que les rapports concernés avaient été produits par les requérants eux-mêmes et, de ce fait, ils ne pouvaient invoquer leur caractère injurieux.
Arguments pertinents
1. Compétence du juge administratif : La décision rappelle que le juge administratif a la faculté de supprimer des propos et écrits jugés injurieux, outrageants ou diffamatoires au sens de la loi du 29 juillet 1881, mais cette possibilité est limitée à des écrits qui ne proviennent pas de la partie qui sollicite cette suppression.
> "Une partie ne saurait toutefois utilement solliciter du juge la suppression d'une injure, d'un outrage ou d'une diffamation qui résulterait d'une pièce qu'elle a elle-même produite."
2. Erreur de droit et substitution de motif : La cour administrative d'appel a commis une erreur de droit en considérant que les dispositions relatives à la suppression ne concernaient que les écritures des autres parties. Néanmoins, le Conseil d'État a justifié la confirmation du rejet de la demande sur la base que les requérants avaient eux-mêmes produit les écrits litigieux.
> "Les requérants ne pouvaient, dès lors, utilement invoquer leur caractère prétendument injurieux, outrageant ou diffamatoire."
Interprétations et citations légales
1. Application de la loi du 29 juillet 1881 : L'article 41 de cette loi précise que les comptes rendus fidèles des débats judiciaires ne donnent pas lieu à action en diffamation, mais le juge peut ordonner la suppression de discours injurieux. En application de cet article, la notion de "discours injurieux" est interprétée de manière stricte.
> Loi du 29 juillet 1881 - Article 41 : "Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux."
2. Limitation de la faculté de suppression : Le Conseil d'État a précisé que seul le juge peut prononcer la suppression des écrits injurieux, et ce, dans la mesure où ces écrits ne proviennent pas de la partie demandant la suppression.
> "Il résulte de ces dispositions que le juge administratif peut exercer la faculté qu'elles lui reconnaissent de prononcer la suppression des propos tenus et des écrits produits dans le cadre de l'instance qui présenteraient un caractère injurieux, outrageant ou diffamatoire."
Conclusions
Dans cette décision, le Conseil d'État a établi une distinction claire entre les écrits produits par une partie et ceux produits par d'autres, en affirmant que les parties ne peuvent pas demander la suppression d'écrits qu'elles ont elles-mêmes présentés, même s'ils sont jugés injurieux. Cette interprétation souligne l'importance de la responsabilité des parties quant aux documents qu'elles choisissent de soumettre dans le cadre d'une procédure judiciaire.