Résumé de la décision
La commune d'Evreux a demandé la suspension du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, qui impose la fermeture des commerces jugés non essentiels en raison de la COVID-19. La commune a argué que cette fermeture créera une urgence en diminuant les recettes municipales, qu'il existe un doute sur la légalité du décret, que ce dernier porte atteinte à la liberté de commerce et de l'industrie ainsi qu’à la libre concurrence, et qu'il est manifestement disproportionné. Toutefois, le juge des référés a rejeté la requête, estimant que les arguments n'étaient pas suffisants pour caractériser une situation d'urgence et que l'intérêt public lié à la lutte contre l'épidémie l'emportait.
Arguments pertinents
1. Condition d'urgence : La commune d'Evreux soutient que la fermeture des commerces aura des répercussions financières à moyen ou long terme. Néanmoins, le juge a conclu que cette allégation, sans éléments concrets, ne caractérise pas une situation d'urgence :
> "Cette allégation, qui n'est assortie d'aucun élément circonstancié, n'est pas de nature à caractériser l'existence d'une situation d'urgence".
2. Intérêt public : Le juge a également insisté sur le fait que l'intérêt public en période de crise sanitaire est déterminant :
> "Compte tenu de l'importance de la recrudescence de l'épidémie et de la mise en tension des structures hospitalières, un intérêt public s'attache au maintien du décret contesté".
3. Doute quant à la légalité : Bien que la commune mentionne un doute sur la légalité du décret, le juge n’a pas considéré que cela suffisait pour justifier une suspension :
> "Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence".
Interprétations et citations légales
1. Article L. 521-1 du code de justice administrative : Cet article régit les conditions dans lesquelles un juge des référés peut ordonner la suspension d'une décision administrative. Il stipule que la suspension est possible lorsque "l’urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision".
2. Article L. 522-3 du code de justice administrative : Il permet au juge de rejeter une demande sans instruction lorsque l'urgence n'est pas établie :
> "Le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d’urgence n’est pas remplie".
En appliquant ces dispositions, le juge des référés a conclu que la commune d’Evreux n’a pas démontré un état d’urgence suffisant pour suspendre le décret contesté, et que l'intérêt public, en rapport avec l'épidémie, justifiait la continuité de l'exécution du décret. Ainsi, les décisions administratives prises dans le cadre d'une crise sanitaire peuvent prévaloir sur des préoccupations locales si ces dernières n'ont pas de fondement solide pour justifier une urgence.