- l'atteinte est manifestement illégale dès lors que, notamment, les motifs impérieux, dont il faut justifier pour aller et venir entre les Antilles et la Guyane mais aussi entre ces territoires et le territoire métropolitain, ne sont pas suffisamment précis et leur appréciation est faite de façon arbitraire ;
- les restrictions imposées ne sont ni nécessaires ni proportionnées, dès lors que la situation sanitaire de la Martinique et de la Guyane n'est pas préoccupante et qu'il existe d'autres moyens, moins attentatoires aux libertés, de réduire les risques de propagation de la Covid-19 entre ces territoires, et alors que cet isolement a des conséquences négatives non seulement sur le bien-être psychologique et l'état de santé des populations résidant en outre-mer français mais également sur le développement économique de ces territoires.
Elle soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite, dès lors que les dispositions attaquées lui interdisent ainsi qu'à ses trois enfants de rendre visite à ses ascendants en Martinique, ce qui menace leur bien-être psychologique ;
- l'acte attaqué porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, la liberté de réunion, le droit au respect de la vie privée et familiale, le droit de chacun au respect de sa liberté personnelle, le principe d'égalité et le principe d'indivisibilité de la République ;
- l'atteinte est manifestement illégale dès lors que, notamment, les motifs impérieux, dont il faut justifier pour aller et venir entre les Antilles et la Guyane mais aussi entre ces territoires et le territoire métropolitain, ne sont pas suffisamment précis et leur appréciation est faite de façon arbitraire ;
- les restrictions imposées ne sont ni nécessaires ni proportionnées, dès lors que la situation sanitaire de la Martinique et de la Guyane n'est pas préoccupante et qu'il existe d'autres moyens, moins attentatoires aux libertés, de réduire les risques de propagation de la Covid-19 entre ces territoires, et alors que cet isolement a des conséquences négatives non seulement sur le bien-être psychologique et l'état de santé des populations résidant en outre-mer français mais également sur le développement économique de ces territoires.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de la santé publique ;
- le décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020, notamment ses articles 10 et 56-5 ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, notamment ses articles 10 et 57-2 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. La circonstance qu'une atteinte à une liberté fondamentale, portée par une mesure administrative, serait avérée n'est pas de nature à caractériser l'existence d'une situation d'urgence justifiant l'intervention du juge des référés dans le très bref délai prévu par les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Il appartient au juge des référés d'apprécier, au vu des éléments que lui soumet le requérant comme de l'ensemble des circonstances de l'espèce, si la condition d'urgence particulière requise par l'article L. 521-2 est satisfaite, en prenant en compte la situation du requérant et les intérêts qu'il entend défendre mais aussi l'intérêt public qui s'attache à l'exécution des mesures prises par l'administration.
Sur le cadre juridique du litige :
3. Aux termes de l'article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 : " L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ". L'article L. 3131-13 du même code précise que " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques. / (...) ". Aux termes de l'article L. 3131-15 du même code : " Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : / (...) 1° Réglementer ou interdire la circulation des personnes (...). " Ces mesures " sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. "
4. Par un décret du 14 octobre dernier, pris sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, le Président de la République a déclaré l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre sur l'ensemble du territoire national. Les 16 et 29 octobre 2020, le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, deux décrets prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. Mme B... réside en Guyane. Elle demande la suspension du décret du 29 octobre 2020 et plus particulièrement de son article 10, en tant qu'il habilite le représentant de l'Etat à interdire, pour les vols au départ ou à destination des collectivités de l'article 73 de la Constitution, les déplacements de personnes par transport public aérien autres que ceux fondés sur un motif impérieux d'ordre personnel ou familial, un motif de santé relevant de l'urgence ou un motif professionnel ne pouvant être différé, lorsque les circonstances locales l'exigent. Elle demande également que soient " contrôlées " les décisions prises par les préfets de Martinique et Guyane sur son fondement.
Sur la demande en référé :
5. Le Conseil d'Etat n'est pas compétent pour statuer en premier ressort sur des arrêtés préfectoraux. Il y a lieu par suite de rejeter, sur le fondement de l'article R. 522-8-1 du code de justice administrative, les conclusions de Mme B... relatives à de tels arrêtés.
6. En outre, pour justifier de l'urgence à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de sa requête, Mme B... se borne à soutenir que les dispositions litigieuses lui interdisent ainsi qu'à ses trois enfants de rendre visite à ses ascendants domiciliés en Martinique, ce qui menace son bien-être psychologique ainsi que de celui de ses enfants. Toutefois, Mme B..., qui n'indique en tout état de cause pas avoir de projet de déplacement en Martinique à brève échéance, ne fait état d'aucune circonstance particulière de nature à justifier une intervention à très bref délai du juge des référés, et ne remplit dès lors pas la condition d'urgence requise par l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
7. Il résulte de ce qui précède que la requête de Mme B... doit être rejetée, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... B....