3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de prévoir un motif de déplacement dérogatoire pour toutes les personnes en invalidité et les personnes vulnérables.
Ils soutiennent que :
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aller et venir et au droit des citoyens de résister à l'oppression ;
- l'attestation dérogatoire de sortie de 20 h à 6 h renvoie à l'article 4 du décret n° 2020 - 1310 du 29 octobre 2020, alors que les motifs de sortie mentionnés à cet article sont ceux du confinement, qui ne correspondent pas aux motifs dérogatoires de sortie prévu par le gouvernement pour la plage horaire 20 h - 6 h, ce qui entache de vice de forme l'attestation en question ;
- la mesure contestée est entachée d'illégalité dès lors, en premier lieu, qu'elle n'est pas efficace pour lutter contre la propagation du virus, en deuxième lieu, que les motifs dérogatoires de déplacement prévus ne sont pas adaptés en ce qu'il n'est pas prévu de dérogation pour les personnes en situation d'invalidité non-accompagnées et, en dernier lieu, qu'elle s'applique à l'ensemble du territoire national sans tenir compte des circonstances locales eu égard à la circulation effective du virus.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son préambule ;
- le code de la santé publique ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. L'article L. 511-1 du code de justice administrative dispose que : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais ". Aux termes de l'article 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires a` la sauvegarde d'une liberté´ fondamentale a` laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit prive´ charge´ de la gestion d'un service public aurait porte´, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
Sur le cadre du litige :
2. Aux termes de l'article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 : " L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ". L'article L. 3131-13 du même code précise que " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques. / (...) / La prorogation de l'état d'urgence sanitaire au-delà d'un mois ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19 ". Aux termes de l'article L. 3131-15 du même code : " Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : / (...) 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public. " Ces mesures doivent être " strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. "
3. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou Covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d'urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre chargé de la santé puis le Premier ministre à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Pour faire face à l'aggravation de l'épidémie, la loi du 23 mars 2020 a créé un régime d'état d'urgence sanitaire, défini aux articles L. 3131-12 à L. 3131-20 du code de la santé publique, et a déclaré l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020. La loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ces dispositions a prorogé cet état d'urgence sanitaire jusqu'au 10 juillet 2020. L'évolution de la situation sanitaire a conduit à un assouplissement des mesures prises et la loi du 9 juillet 2020 a organisé un régime de sortie de cet état d'urgence.
4. Une nouvelle progression de l'épidémie au cours des mois de septembre et d'octobre, dont le rythme n'a cessé de s'accélérer au cours de cette période, a conduit le Président de la République à prendre le 14 octobre dernier, sur le fondement des articles L. 131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, un décret déclarant l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre sur l'ensemble du territoire national. Le 29 octobre 2020, le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, le décret dont la suspension de l'exécution de l'article 4 est demandée, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. L'article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire a prorogé l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 16 février 2021 inclus. Toutefois, l'évolution de la situation sanitaire a conduit le Premier ministre à procéder, par deux décrets du 27 novembre et du 14 décembre 2020, à un assouplissement des mesures précédemment prises.
Sur la demande en référé :
5. Les requérants demandant au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'article 4 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 en ce qu'il instaure un couvre-feu à partir du 15 décembre 2020 y compris le 31 décembre 2020.
6. S'ils soutiennent, en premier lieu, que cette mesure porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, ainsi qu'à leur droit de résister à l'oppression et qu'elle est inefficace pour lutter contre l'épidémie de Covid-19, les requérants n'apportent, toutefois, compte tenu du caractère très général de leurs écritures, aucun élément de nature à établir que, au regard à la nette aggravation de la crise sanitaire en France ces dernières semaines, le décret contesté porterait une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale invoquée et, en tout état de cause, au droit de résister à l'oppression dont ils se prévalent.
7. En deuxième lieu, les motifs de sortie figurant sur l'attestation dérogatoire établie par le ministère de l'intérieur reprennent, contrairement à ce qui est soutenu, ceux qui sont prévus par l'article 4 du décret du 24 octobre 2020 susvisé, à l'exception de ceux que la nature même de la mesure de couvre-feu rend sans objet. Cette attestation n'est, ainsi, en tout état de cause, pas entachée du vice dont se prévalent les requérants.
8. Enfin, le moyen tiré de ce qu'un motif dérogatoire de sortie aurait dû être prévu pour les personnes en situation d'invalidité n'est pas assorti des précisions qui permettraient d'en apprécier le bien-fondé.
9. Il suit de là que, sans qu'il soit besoin d'examiner la condition d'urgence, la requête de M. Borr et autres doit être rejetée, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. Borr et autres est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Cédric Borr, premier requérant dénommé.