Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code de la route ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ;
- le décret n° 2013-422 du 22 mai 2013 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Cécile Barrois de Sarigny, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public ;
1. Considérant que l'article 28 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a notamment ajouté au code de la route un article L. 221-5 ainsi rédigé : " Dans l'ensemble des départements où le délai moyen entre deux présentations d'un même candidat à l'épreuve pratique du permis de conduire des véhicules du groupe léger est supérieur à quarante-cinq jours, l'autorité administrative recourt à des agents publics ou contractuels comme examinateurs autorisés à faire passer des épreuves de conduite en nombre suffisant pour garantir que le délai n'excède pas cette durée. (...) Les conditions de formation, d'impartialité et d'incompatibilité de fonctions que remplissent ces agents, ainsi que la durée pour laquelle cette habilitation est délivrée, sont définies par décret " ; qu'en application de ces dispositions, le décret attaqué a fixé les conditions permettant à des agents publics, le cas échéant contractuels, de faire passer les épreuves pratiques du permis de conduire, prévoyant notamment que ces agents reçoivent une formation initiale obligatoire qui correspond à celle délivrée aux inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière ;
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
3. Considérant que le Syndicat national des inspecteurs, cadres et administratifs du permis de conduire et de la sécurité routière - Force ouvrière et la Fédération générale des fonctionnaires - Force ouvrière soutiennent que l'article L. 221-5 du code de la route précédemment cité, qui résulte de l'article 28 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, méconnaîtrait le principe d'égal accès aux emplois publics découlant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que toutefois, la disposition législative critiquée n'a ni pour objet ni pour effet de permettre aux agents qu'elle vise d'accéder à l'emploi d'inspecteur du permis de conduire mais se borne à permettre à ces agents de faire passer l'épreuve pratique du permis de conduire des véhicules, dans les départements où le délai moyen entre deux présentations d'un même candidat à l'épreuve pratique du permis de conduire est supérieur à quarante-cinq jours ; que par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article 28 de la loi du 6 août 2015 porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;
Sur les autres moyens de la requête :
4. Considérant que si les syndicats requérants font valoir que le décret attaqué méconnaîtrait les termes du statut général des fonctionnaires, en particulier l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 qui prévoit des cas dans lesquels il peut être recruté des agents contractuels par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983, selon lequel les emplois civils permanents de l'Etat sont occupés par des fonctionnaires, des magistrats ou des militaires, ou l'article 43 de la loi du 11 janvier 1984 qui détermine les cas dans lesquels les administrations de l'Etat peuvent bénéficier de la mise à disposition de personnels de droit privé, les dispositions législatives précédemment citées de l'article L. 221-5 du code de la route ont, en tout état de cause, dérogé aux dispositions de la loi du 11 janvier 1984 pour permettre, dans les cas et sous les conditions qu'elles précisent, à l'autorité administrative de recourir à des agents publics ou contractuels comme examinateurs autorisés à faire passer les épreuves de conduite du permis de conduire ;
5. Considérant que le décret attaqué met en oeuvre ces dispositions législatives dérogatoires ; que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles 4 et 43 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat sont, dès lors, inopérants et ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de ce décret ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Syndicat national des inspecteurs, cadres et administratifs du permis de conduire et de la sécurité routière - Force ouvrière et la Fédération générale des fonctionnaires - Force ouvrière ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 29 octobre 2015 ; que les conclusions qu'ils ont présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le Syndicat national des inspecteurs, cadres et administratifs du permis de conduire et de la sécurité routière - Force ouvrière et la Fédération générale des fonctionnaires - Force ouvrière.
Article 2 : La requête du Syndicat national des inspecteurs, cadres et administratifs du permis de conduire et de la sécurité routière - Force ouvrière et de la Fédération générale des fonctionnaires - Force ouvrière est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national des inspecteurs, cadres et administratifs du permis de conduire et de la sécurité routière - Force ouvrière, à la Fédération générale des fonctionnaires - Force ouvrière et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.