Résumé de la décision :
La décision concerne un litige entre la Société nationale d'exploitation industrielle des tabacs et des allumettes (SEITA) et Mme A..., une salariée bénéficiant d'une protection particulière en raison de ses fonctions représentatives. Après que l'inspecteur du travail ait initialement refusé l'autorisation de licenciement pour motif économique, la ministre du travail a annulé cette décision. Le tribunal administratif a rejeté la demande de Mme A... d'annuler la décision ministérielle. Cependant, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé à son tour celle-ci. Se pourvoyant en cassation, la SEITA a obtenu l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel au motif que la réalité du motif économique n'avait pas été correctement établie. L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel pour réexamen.Arguments pertinents :
1. Qualification exacte du motif économique : La cour administrative d'appel a commis une erreur en établissant qu'il n'existait pas de menace sérieuse sur la compétitivité du groupe Imperial Tobacco, ce qui justifiait la réorganisation et donc le licenciement. Le Conseil d'État a souligné que « la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise peut constituer un motif économique, à condition que soit établie une menace pour la compétitivité de l'entreprise ».2. Importance de l'appréciation des faits : Le Conseil d'État a insisté sur le fait que la cour d'appel avait inexactement qualifié les faits, notamment en ne tenant pas compte des tendances structurelles du marché du tabac, malgré une amélioration temporaire des chiffres d'affaires. Cela a conduit à une inexactitude dans l'appréciation de la situation économique de la SEITA et de ses besoins en restructuration.
3. Absence de mise à charge de frais : Considérant que la SEITA n'était pas la partie perdante dans cette instance et que Mme A... n'était également pas condamnée, le Conseil d'État a rejeté les conclusions des parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Cela témoigne d'une application rigoureuse des principes de la responsabilité des coûts en matière contentieuse.
Interprétations et citations légales :
1. Code du travail - Article L. 1233-3 : Cet article définit ce qui constitue un licenciement pour motif économique, stipulant que « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ». Cette définition est cruciale pour déterminer si le licenciement de Mme A... était valide.2. L'autorisation de licenciement : Le texte précise également que l'autorisation de licenciement d'un salarié protégé « est subordonnée à une autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement », indiquant que le besoin d'une autorisation est particulièrement fort lorsque le salarié en question est protégé. Cela renforce le besoin d'une évaluation sérieuse des motifs avancés par l'entreprise pour éviter toute atteinte indue au droit du travail des salariés protégés.
3. Implication des tendances économiques : Le Conseil d'État applique un raisonnement qui insiste sur l'analyse des tendances globales du marché, soulignant que « l’inversion de tendance récente n'était pas de nature à remettre en cause ces tendances structurelles ». Cette approche s'inscrit dans une logique de prise en compte des réalités économiques générales plutôt que de se limiter aux variations ponctuelles des résultats financiers.
En somme, la décision rappelle l'importance d'une évaluation rigoureuse des motifs économiques justifiant un licenciement, en tenant compte des spécificités des salariés protégés et des tendances du marché.