Résumé de la décision
La décision concerne un recours en annulation pour excès de pouvoir introduit par le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure contre un décret du 30 janvier 2017, modifiant le décret du 23 octobre 2002 relatif à l'organisation du travail des fonctionnaires actifs de la police nationale. Le syndicat conteste la légalité des dispositions qui établissent une période de référence fixe de six mois pour le calcul de la durée moyenne hebdomadaire de travail, arguant qu'elles sont contraires aux exigences de la directive 2003/88/CE. Le Conseil d'État a annulé ces dispositions, considérant qu'elles ne respectaient pas les exigences de flexibilité imposées par la directive, qui requiert que la durée moyenne maximale de travail soit respectée sur des périodes de référence glissantes.
Arguments pertinents
1. Incompatibilité avec la directive : Le syndicat requérant soutient que le décret attaqué méconnaît les articles 6 et 16 de la directive 2003/88/CE, qui stipulent que la durée moyenne de travail ne doit pas excéder quarante-huit heures par semaine, y compris les heures supplémentaires. Le Conseil d'État a retenu que la réglementation nationale ne peut pas imposer une période de référence fixe, car cela compromettrait le respect de cette limite.
2. Interprétation de la Cour de justice de l'Union européenne : Dans son arrêt du 11 avril 2019, la Cour de justice a précisé que les États membres peuvent établir des périodes de référence fixes, à condition qu'elles soient accompagnées de mécanismes garantissant le respect de la durée maximale de travail. Le Conseil d'État a conclu que seule l'utilisation de périodes de référence glissantes permettrait de garantir ce respect.
3. Conséquences financières : Le Conseil d'État a également décidé que l'État devait verser une somme de 3 000 euros au Syndicat des cadres de la sécurité intérieure, en vertu de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, pour couvrir les frais engagés dans le cadre de cette procédure.
Interprétations et citations légales
1. Directive 2003/88/CE :
- Article 6 : "Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que, en fonction des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs : (...) b) la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours n'excède pas quarante-huit heures, y compris les heures supplémentaires."
- Article 16 : "Les États membres peuvent prévoir : (...) b) pour l'application de l'article 6 (durée maximale hebdomadaire de travail), une période de référence ne dépassant pas quatre mois."
- Article 19 : "La faculté de déroger à l'article 16, point b), prévue à l'article 17, paragraphe 3 (...) ne peut avoir pour effet l'établissement d'une période de référence dépassant six mois."
2. Décret n° 2000-815 du 25 août 2000 :
- Article 3 : "La durée hebdomadaire du travail effectif, heures supplémentaires comprises, ne peut excéder ni quarante-huit heures au cours d'une même semaine, ni quarante-quatre heures en moyenne sur une période quelconque de douze semaines consécutives."
3. Raisonnement du Conseil d'État : Le Conseil d'État a affirmé que "seule l'utilisation de périodes de référence glissantes permet de garantir que la durée moyenne maximale hebdomadaire de travail de 48 heures est respectée au cours de toute période de six mois." Cela souligne l'importance de la flexibilité dans l'application des règles de durée de travail pour assurer la protection des travailleurs.
En conclusion, la décision du Conseil d'État met en lumière la nécessité de respecter les normes européennes en matière de durée de travail, en insistant sur l'importance de mécanismes flexibles pour garantir la protection des droits des travailleurs.