1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre à la charge du CHU de Rennes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le numéro 427032, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 janvier et 15 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la CPAM d'Ille-et-Vilaine demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge du CHU de Rennes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de Mme M... I... et autres, à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier régional universitaire de Rennes, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine.
Considérant ce qui suit :
1. Les pourvois de Mme I... et autres et de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Ille-et-Vilaine tendent à l'annulation du même arrêt. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme I... a été opérée le 18 octobre 2008 au centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes d'une occlusion de l'intestin grêle. Elle a alors été victime, au cours de l'anesthésie préopératoire, d'un arrêt cardio-circulatoire dont elle conserve d'importantes séquelles. Par un jugement du 9 juin 2016, le tribunal administratif de Rennes a condamné le CHU de Rennes à indemniser l'ensemble des préjudices de Mme I... et de ses proches et à rembourser à la CPAM d'Ille-et-Vilaine et au département d'Ille-et-Vilaine les prestations servies à Mme I.... Par l'arrêt attaqué du 9 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel du CHU de Rennes, réduit les sommes à verser par cet établissement en se fondant sur ce que sa responsabilité n'était engagée qu'au titre d'une perte de chance pour Mme I... d'éviter l'arrêt cardio-circulatoire dont elle a été victime, estimée par la cour à 60%.
3. Dans le cas où une faute commise lors de la prise en charge d'un patient dans un établissement de santé a seulement compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, en raison de ce que le dommage corporel avait une certaine probabilité de survenir en l'absence de faute commise par l'établissement, le préjudice résultant de cette faute n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. En revanche, lorsque le dommage corporel ne serait pas survenu en l'absence de la faute commise par l'établissement, le préjudice qui en résulte doit être intégralement réparé.
4. Il ressort des termes mêmes de son arrêt que, pour juger que les manquements fautifs aux règles de l'art commis par l'anesthésiste lors de l'opération du 18 octobre 2008 n'avaient fait perdre à Mme I... qu'une chance de 60 % de se soustraire aux séquelles dont elle est atteinte, la cour s'est fondée sur la circonstance que les dommages causés par cette erreur d'anesthésie s'expliquaient en partie par l'existence, chez la patiente, de facteurs de risque cardiaque. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que, sans la faute commise par l'anesthésiste, Mme I... n'aurait pas été victime de l'arrêt cardiaque à l'origine de ses séquelles, la cour a commis une erreur de droit. Son arrêt doit, par suite, être annulé.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Rennes le versement, d'une part, d'une somme de 200 euros chacun aux requérants ayant Mme I... comme mandataire commun et, d'autre part, d'une somme de 3 000 euros et à la CPAM d'Ille-et-Vilaine au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 9 novembre 2018 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : Le CHU de Rennes versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'une part une somme de 200 euros chacun à Mme M... I..., Mme E... C..., M. G... I..., Mme J... I..., M. U... I..., Mme B... V..., M. D... I..., Mme T... I..., M. K... I..., M. N... I..., Mme Q... X... R..., M. O... I..., M. H... I..., M. L... I..., M. S... V... et M. P... C... et, d'autre part, une somme de 3 000 euros à la CPAM d'Ille-et-Vilaine.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme M... I..., première requérante désignée, au centre hospitalier universitaire de Rennes, et à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine.
Copie en sera adressée à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et au conseil départemental d'Ille-et-Vilaine.