Résumé de la décision
Mme B..., avocate au barreau de Paris, a demandé l'annulation pour excès de pouvoir des énonciations du point 1.3 de la fiche n° 1 du guide pratique "lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme", publié par le Conseil national des barreaux. Elle contestait des interprétations concernant les obligations de vigilance imposées par le code monétaire et financier, introduites par une ordonnance de 2020. Le Conseil d'État a considéré que les énonciations litigieuses se limitaient à rappeler le droit applicable et signaler des ambiguïtés sans constituer un acte administratif faisant grief. En conséquence, la requête a été déclarée irrecevable et rejetée, avec une condamnation financière à la charge de Mme B....
Arguments pertinents
1. Dépourvu de portée décisionnelle : Le Conseil d'État a souligné que les énonciations litigieuses ne constituaient pas un acte administratif faisant grief. Elles avaient pour objectif de rappeler le droit en vigueur et d'attirer l'attention sur les ambiguïtés qui pourraient nécessiter des clarifications ultérieures. Le Conseil a affirmé : "ces énonciations... sont en elles-mêmes dépourvues de toute portée et de tout effet".
2. Irrecevabilité de la requête : En raison de l'absence de caractère décisoire des énonciations, la demande de Mme B... a été jugée irrecevable : "la requête de Mme B... est irrecevable et doit, par suite, être rejetée".
3. Frais de justice : Étant donné que l'État n'était pas la partie perdante, le Conseil d'État a décidé de mettre à la charge de Mme B... la somme de 3 000 euros à verser au Conseil national des barreaux, conformément à l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Interprétations et citations légales
Le cadre juridique applicable à cette décision repose principalement sur le Code monétaire et financier, en particulier l'article L. 561-3, et le Code de justice administrative, notamment l'article L. 761-1.
- Code monétaire et financier - Article L. 561-3 : Cet article mentionne les obligations de vigilance applicables aux professionnels, y compris les avocats, en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. L'ordonnance du 12 février 2020 a introduit des modifications augmentant le champ d'application de ces obligations, ce qui a suscité des préoccupations quant à la clarté des nouvelles dispositions.
- Code de justice administrative - Article L. 761-1 : Cet article stipule que dans les litiges administratifs, la partie perdante peut être condamnée à verser une somme à l’autre partie pour les frais engagés. Dans cette décision, il a été précisé que l'État n'étant pas la partie perdante, les frais ont été mis à la charge de Mme B..., affirmant ainsi : "Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État".
Cette décision souligne l'importance d'une interprétation précise des obligations légales en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, tout en clarifiant la portée des documents explicatifs publiés par les instances professionnelles. Elle rappelle également que seules les décisions administratives ayant un caractère contraignant peuvent faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.