3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a présenté sa candidature à une intégration dans le corps judiciaire au titre de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. La commission d'avancement prévue à l'article 34 de l'ordonnance a, lors de ses travaux du 22 au 25 juin et du 29 juin au 2 juillet 2020, donné un avis défavorable à cette candidature, notifié par lettre du procureur général près la cour d'appel de Metz du 23 juillet 2020. M. A... demande l'annulation de cet avis.
2. Aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : " Peuvent être nommés directement aux fonctions du premier grade de la hiérarchie judiciaire : / 1° Les personnes remplissant les conditions prévues à l'article 16 et justifiant de quinze années au moins d'exercice professionnel les qualifiant particulièrement pour exercer des fonctions judiciaires (...) ". En vertu de l'article 25-2 de la même ordonnance, les nominations au titre de l'article 23 interviennent après avis conforme de la commission d'avancement prévue à son article 34. Enfin, aux termes de l'article 31-1 du décret du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance du 22 décembre 1958, lorsqu'elle statue en application notamment de l'article 25-2 de ce dernier texte " la commission prévue à l'article 34 de cette ordonnance peut, si elle l'estime nécessaire au vu du dossier d'un candidat, procéder à une audition de ce dernier ou désigner à cette fin un ou plusieurs de ses membres ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'elles ne créent pas, au profit des candidats à l'intégration directe dans le corps judiciaire, le droit d'être nommés à des fonctions du premier ou du second grade de la hiérarchie judiciaire et que le législateur organique a entendu investir la commission d'avancement d'un large pouvoir dans l'appréciation de l'aptitude de candidats à exercer les fonctions de magistrat.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., né en 1967, est titulaire d'une maîtrise et d'un diplôme d'études approfondies de droit public de l'université de Nancy, a passé le certificat d'aptitude à la profession d'avocat en 1996 et exerce depuis 1997 la profession d'avocat, d'abord au sein d'un cabinet spécialisé en procédure civile à Thionville, puis dans un cabinet généraliste à Metz, avant d'exercer pour son propre compte depuis 2006, à Metz, en particulier en droit commercial et en droit de la famille. Sa candidature à l'intégration dans la magistrature a reçu, le 2 avril 2019, un avis " favorable " du procureur général et de la première présidente de la cour d'appel de Metz, sous réserve d'approfondir sa réflexion sur des questions relatives au statut de la magistrature et aux évolutions de l'organisation judiciaire prévues par la loi du 23 mars 2019 de réforme de la justice, ainsi qu'un avis " très favorable " du président du tribunal de grande instance de Metz et du procureur de la République près ce tribunal ainsi qu'une dizaine d'attestations très favorables de magistrats en fonction et d'anciens magistrats ou de fonctionnaires l'ayant connu dans l'exercice de leurs fonctions. Malgré la mesure d'instruction diligentée par la 6ème chambre de la section du contentieux, tendant à la production des motifs qui ont fondé l'avis défavorable de la commission d'avancement sur la demande d'intégration directe au premier grade de la hiérarchie judiciaire présentée au titre de l'article 23 de l'ordonnance précitée, aucun élément de nature à justifier cet avis n'a été produit par le garde des sceaux, ministre de la justice. Dès lors, faute d'une telle justification, il ressort des éléments versés au dossier que la commission d'avancement a commis une erreur manifeste d'appréciation et que M. A... est, par suite, fondé à demander l'annulation de l'avis défavorable rendu par la commission d'avancement réunie du 22 au 25 juin et du 29 juin au 2 juillet 2020 en tant qu'il concerne sa demande d'intégration directe sur le fondement de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958.
5. Compte tenu de la situation de M. A..., il est enjoint à la commission d'avancement de prendre, après réexamen de son dossier, une nouvelle décision sur sa demande d'intégration directe dans la magistrature en application de l'article 23 de l'ordonnance précitée, dans un délai de deux mois à compter de la présente décision.
6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'avis défavorable à la candidature de M. A... émis par la commission d'avancement réunie du 22 au 25 juin et du 29 juin au 2 juillet 2020, en tant qu'il concerne sa demande d'intégration directe au premier grade de la hiérarchie judiciaire sur le fondement de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, est annulé.
Article 2 : Il est enjoint à la commission d'avancement de prendre, après réexamen du dossier, une nouvelle décision sur la demande d'intégration directe de M. A... dans la magistrature en application de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 dans un délai de deux mois à compter de la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré à l'issue de la séance du 3 février 2022 où siégeaient : M. Fabien Raynaud, président de chambre, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 10 mars 2022.
Le président :
Signé : M. Fabien Raynaud
La rapporteure :
Signé : Mme Catherine Moreau
La secrétaire :
Signé : Mme C... D...