1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Mireille Le Corre, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, avocat de la société Domaine Porte des Neiges et autre ;
1. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, par un arrêté du 3 mars 2009, le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté la demande d'autorisation présentée, au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, par la société Domaine Porte des Neiges et la société Résidence Porte des Neiges, en vue de la réalisation d'équipements hydrauliques destinés à l'aménagement d'un domaine skiable ; que les deux sociétés ont formé un recours gracieux contre cet arrêté le 5 mai 2009 ; que par un jugement du 11 mars 2011, le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, annulé cet arrêté et la décision implicite de rejet du recours gracieux et, d'autre part, enjoint au préfet de procéder au réexamen de la demande dans un délai de quatre mois ; que, par un arrêt du 24 octobre 2014, contre lequel se pourvoient les deux sociétés, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier et leur demande présentée devant ce tribunal en retenant, par un moyen relevé d'office, que cette demande était tardive ;
Sur les conclusions à fin de non-lieu présentées par le ministre :
2. Considérant qu'en exécution du jugement du 11 mars 2011 lui enjoignant de réexaminer la demande d'autorisation des sociétés requérantes, le préfet des Pyrénées-Orientales a, par un arrêté du 11 juillet 2011, rejeté à nouveau cette demande ; que, si cet arrêté du 11 juillet 2011 a été annulé par jugement du tribunal administratif en date du 5 novembre 2013, la cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt du 13 octobre 2015, a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par les sociétés requérantes devant le tribunal administratif ; que cet arrêt n'ayant pas fait l'objet d'un pourvoi devant le Conseil d'Etat, l'arrêté du 11 juillet 2011 a acquis un caractère définitif ; que, toutefois, l'annulation, par l'arrêt attaqué du 24 octobre 2014, du jugement du tribunal administratif ayant enjoint au préfet de réexaminer la demande d'autorisation et en exécution duquel a été pris l'arrêté du 11 juillet 2011, a eu pour effet de remettre en vigueur l'arrêté du 3 mars 2009 ; qu'ainsi, le caractère définitif de l'arrêté de 2011 n'a pas eu pour effet, dans les circonstances de l'espèce, de priver d'objet le pourvoi formé par les sociétés requérantes contre l'arrêt attaqué ; que, par suite, les conclusions à fin de non-lieu présentées par le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer doivent être rejetées ;
Sur le pourvoi :
3. Considérant qu'il résulte des procédures particulières applicables en vertu des dispositions des articles L. 171-6 à L. 171-11, L. 214-1, L. 214-3, L. 214-10, L. 514-6, R. 214-11 et R. 214-12 du code de l'environnement qui, d'une part, associent le demandeur ou l'exploitant à différentes étapes en le mettant à même de faire valoir ses observations en toute connaissance de cause avant l'intervention des décisions, et, d'autre part, confient au juge des pouvoirs étendus de pleine juridiction, que l'exercice d'un recours administratif, qu'il soit gracieux ou hiérarchique, pour contester les décisions relatives aux installations, ouvrages, travaux et activités entrant dans le champ d'application de l'article L. 214-1 du code de l'environnement, ne peut avoir pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux ; que toutefois, eu égard aux garanties nécessaires à l'exercice effectif du droit au recours, le recours administratif, qu'il soit gracieux ou hiérarchique, interrompt le délai de recours contentieux lorsque la décision contestée mentionne à tort qu'elle est susceptible de faire l'objet d'un recours administratif interrompant le délai de recours contentieux ;
4. Considérant qu'après avoir relevé que le délai de recours contre l'arrêté du 3 mars 2009 commençait à courir à compter du 6 avril 2009 et expirait le 8 juin 2009, la cour a estimé que l'exercice par la société requérante, le 5 mai 2009, d'un recours gracieux contre cet arrêté était sans incidence sur l'écoulement de ce délai " en l'absence de mention contraire dans l'arrêté " et en a déduit que la demande d'annulation de l'arrêté présentée par les deux sociétés devant le tribunal administratif de Montpellier le 4 septembre 2009 était tardive ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'article 2 de l'arrêté litigieux du 3 mars 2009, relatif aux " voies et délais de recours ", mentionnait que le silence gardé par l'administration pendant plus de deux mois sur une demande de recours gracieux emportait décision implicite de rejet de cette demande conformément à l'article R. 421-2 du code de justice administrative ; que cette disposition précise que " sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. / Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. Néanmoins, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux mois, elle fait à nouveau courir le délai du pourvoi. / La date du dépôt de la réclamation à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête. " ; que dans ces circonstances, eu égard aux garanties nécessaires à l'exercice effectif du droit au recours, l'arrêt attaqué ne pouvait regarder comme tardive la demande présentée au tribunal administratif de Montpellier au motif que le recours gracieux n'avait pu interrompre le délai de recours contentieux ; que les sociétés requérantes sont fondées, pour ce motif, à en demander l'annulation ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme globale de 3 000 euros à verser à la société Domaine Porte des Neiges et à la société Résidence Porte des Neiges au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 28 octobre 2014 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : L'État versera à la société Domaine Porte des Neiges et à la société Résidence Porte des Neiges une somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée aux sociétés Domaine Porte des Neiges et Résidence Porte des Neiges et à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.