Résumé de la décision
La décision concerne la société Aquitaine Construction, qui a contesté une amende de 50 % infligée par l'administration fiscale sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts, à la suite de la vérification de sa comptabilité entre 2011 et 2013. L'administration fiscale estimait que la société avait travesti l'identité des personnes ayant perçu la rémunération des prestations de sous-traitance en participant à un système de factures de complaisance. Le Conseil d'État, en cassation, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux, jugeant que l'amende ne pouvait être justifiée sur la base de paiements effectués à des tiers, et a ordonné au ministre de l'économie de verser 3 000 euros à la société au titre des frais de justice.
Arguments pertinents
1. Sur la portée de l'article 1737 : Le Conseil d'État a précisé que l'administration fiscale peut appliquer l'amende si le contribuable a travesti ou dissimulé l'identité de son client ou fournisseur, mais pas simplement pour des paiements effectués à des tiers. Ceci souligne que le texte sanctionne le fait de travestir l’identité, et non le paiement lui-même, affirmant que "l'administration peut mettre l'amende à la charge de la personne qui a délivré la facture... si elle établit que la personne concernée a, soit travesti ou dissimulé l'identité [...]".
2. Sur la qualification des paiements : La cour a établi que l'administration avait confirmé la réalité et le montant des prestations, mais que les paiements incriminés n'impliquaient pas un travestissement selon les exigences légales. Le jugement de première instance n’a pas correctement appliqué les critères définis par la loi, conduisant à "une erreur de droit".
Interprétations et citations légales
Code général des impôts - Article 1737 : Cet article stipule que l’amende est égale à 50 % des sommes en cas de travestissement ou de dissimulation de l’identité des clients ou fournisseurs. La clé de l’interprétation réside dans le mot "travestir", indiquant un acte de dissimuler l’identité ou d’utiliser une identité fictive. Le passage suivant est central : " il résulte de ces dispositions que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue [...] si [elle] établit que la personne concernée a, soit travesti ou dissimulé l'identité, soit accepté l'utilisation [...] d'un prête-nom".
Considération de l'amende : Le Conseil d'État a jugé que la réalité des prestations et l’identité des fournisseurs n’étaient pas contestées, et que la simple mention de paiements en faveur de tiers ne suffisait pas à imputer la responsabilité à la société. L'erreur de la cour se trouve dans l'interprétation trop large de la notion de travestissement, qui aurait dû se limiter à la dissimulation des identités.
Cette décision rappelle l’importance de respecter scrupuleusement les conditions posées par la loi pour l’application de sanctions fiscales. En l’occurrence, la société Aquitaine Construction a eu gain de cause, car l’administration n’a pas pu établir la preuve du travestissement aux yeux du droit.