1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il se prononce sur les impositions établies au titre de l'année 2012 ;
2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 ;
- le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Ploquin-Duchefdelaville, auditeur,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la société Distribution Sanitaire Chauffage.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes des premier et dix-septième alinéas de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Il est institué une taxe sur les surfaces commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, dès lors qu'elle dépasse quatre cents mètres carrés des établissements ouverts à partir du 1er janvier 1960 quelle que soit la forme juridique de l'entreprise qui les exploite. (...) / Un décret prévoira (...) des réductions pour les professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées (...) ". Aux termes de l'article 3 du décret du 26 janvier 1995 relatif à la taxe sur les surfaces commerciales, pris pour l'application de ces dispositions, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " A. La réduction de taux prévue au dix-septième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 susvisée en faveur des professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées est fixée à 30 p. 100 en ce qui concerne la vente exclusive des marchandises énumérées ci-après : / - meubles meublants ; / (...) - matériaux de construction (...) ". Aux termes de l'article 534 du code civil : " Les mots "meubles meublants" ne comprennent que les meubles destinés à l'usage et à l'ornement des appartements, comme tapisseries, lits, sièges, glaces, pendules, tables, porcelaines et autres objets de cette nature. / Les tableaux et les statues qui font partie du meuble d'un appartement y sont aussi compris, mais non les collections de tableaux qui peuvent être dans les galeries ou pièces particulières. / Il en est de même des porcelaines : celles seulement qui font partie de la décoration d'un appartement sont comprises sous la dénomination de "meubles meublants" ".
2. La société Distribution Sanitaire Chauffage a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des rappels de taxe sur les surfaces commerciales au titre des années 2010 et 2012, procédant de la remise en cause du bénéfice de la réduction de 30 % du taux de cette taxe qu'elle avait appliquée pour le calcul des impositions dues par certains de ses établissements spécialisés dans la distribution de matériels sanitaires et de chauffage. La société se pourvoit en cassation contre le jugement du 20 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à la décharge de ces impositions, en tant qu'il concerne la taxe due au titre de l'année 2012 pour ses établissement situés à Narbonne et à Montpellier. Par un mémoire distinct et à l'appui de son pourvoi, elle conteste la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de la première phrase du dix-septième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 dans sa version applicable à l'année en litige.
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
3. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
4. La société Distribution Sanitaire Chauffage soutient que les dispositions du dix-septième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972, en ce qu'elles s'abstiennent de préciser, d'une part, les activités pour lesquelles la superficie de vente doit être regardée comme anormalement élevée et, d'autre part, la notion d'anormalité de la superficie de vente, et en ce qu'elles confient au pouvoir réglementaire le soin de définir, outre le taux de réduction applicable, les bénéficiaires de la réduction au regard de critères indéterminés, méconnaissent la compétence du législateur prévue par l'article 34 de la Constitution dans des conditions affectant le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
5. La méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence dans la détermination de l'assiette ou du taux d'une imposition n'affecte par elle-même aucun droit ou liberté que la Constitution garantit.
6. Aux termes de l'article 34 de la Constitution : " La loi fixe les règles concernant : / - l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures (...) ". Les dispositions contestées instituent, en faveur des professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées, une mesure de réduction de taux dont les modalités doivent être déterminées par le pouvoir réglementaire. Elles n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre à l'administration de fixer, contribuable par contribuable, les modalités d'application de cette mesure. Ainsi, l'incompétence négative alléguée n'affecte pas, par elle-même, le principe d'égalité devant les charges publiques. Dès lors la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société requérante, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
Sur le pourvoi :
7. En premier lieu, en subordonnant, par le A de l'article 3 du décret du 26 janvier 1995 précité, le bénéfice de la réduction de taux, fixée à 30 %, à la condition que l'activité de vente des marchandises qu'il énumère soit exercée à titre exclusif, le pouvoir réglementaire s'est borné à déterminer le champ d'application de la mesure de réduction de taux prévue par le législateur en faveur des professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées, sans excéder les compétences qu'il tenait des dispositions législatives citées au point 1 ni illégalement restreint leur portée. Par suite, la tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'erreur de droit en jugeant que les dispositions réglementaires en cause n'avaient pas subordonné le bénéfice de la réduction de taux de la taxe sur les surfaces commerciale à une condition ne relevant pas de sa compétence.
8. En deuxième lieu, le tribunal administratif, après avoir relevé par des motifs non argués de dénaturation qu'il résultait de l'instruction que la société requérante commercialisait, outre des meubles meublants, des petits outillages de plomberie, sanitaires et chauffage ainsi que des articles de quincaillerie et de droguerie et relevé, sans entacher son jugement d'inexacte qualification des faits, que ces articles ne constituaient pas de simples accessoires à des matériaux de construction, a pu juger sans méconnaitre les dispositions combinées de l'article 534 du code civil et de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 et sans insuffisance de motivation que la société ne respectait pas la condition de vente exclusive de meubles meublants à laquelle est subordonné le bénéfice de la réduction de taux prévue par les dispositions précitées du A de l'article 3 du décret du 26 janvier 1995.
9. En troisième lieu, le moyen tiré de ce qu'en réservant le bénéfice de la réduction de taux prévue par la loi en faveur des professions nécessitant des surfaces anormalement élevées aux seuls redevables exerçant une activité de vente à titre exclusif de certaines marchandises à l'exclusion de ceux qui vendent ces mêmes marchandises à titre quasi exclusif ou à titre principal, le décret du 26 janvier 1995 méconnaîtrait les principes constitutionnels d'égalité devant la loi et devant les charges publiques garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui n'est pas d'ordre public, ne peut être utilement soulevé pour la première fois en cassation.
10. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la société Distribution Sanitaire Chauffage ne peut qu'être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Distribution Sanitaire Chauffage.
Article 2 : Le pourvoi de la société Distribution Sanitaire Chauffage est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Distribution Sanitaire Chauffage et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.