Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code du travail ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lesourd, avocat de la société EasyJet Airline Company Limited ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 mars 2021, présentée par la société EasyJet Airline Company Limited ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société EasyJet Airline Company Limited, compagnie aérienne de droit britannique dont le siège social est situé à Luton au Royaume-Uni, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour les années 2008 à 2010 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a estimé que les rémunérations versées à ses personnels navigants rattachés à l'une des trois bases d'exploitation françaises devaient être assujettis aux cotisations prévues au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue et de la participation des employeurs à l'effort de construction. Par un jugement du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la société tendant à la décharge des impositions auxquelles la société a été assujettie à la suite de ce contrôle. Le ministre de l'action et des comptes publics demande l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 24 janvier 2019 qui, faisant droit à l'appel de la société Easyjet Airline Company Limited, a annulé le jugement et prononcé la décharge des impositions en litige.
2. D'une part, aux termes de l'article 235 bis du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " 1. Conformément aux articles L. 313-1, L313-4 et L313-5 du code de la construction et de l'habitation, les employeurs qui, au 31 décembre de l'année suivant celle du paiement des rémunérations, n'ont pas procédé, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat aux investissements prévus à l'article L 313-1 du code de la construction et de l'habitation sont assujettis à une cotisation de 2 % calculée sur le montant des rémunérations versées par eux au cours de l'année écoulée (...) ". Aux termes de l'article L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation : " Les employeurs occupant au minimum vingt salariés (...) doivent consacrer des sommes représentant 0, 45 % au moins du montant (...) des rémunérations versées par eux au cours de l'exercice écoulé au financement d'actions dans le domaine du logement, en particulier du logement des salariés.// Un employeur peut se libérer de cette obligation en investissant directement en faveur du logement de ses salariés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.(...) "
3. D'autre part, aux termes de l'article 235 ter C du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Conformément aux dispositions de l'article L. 6331-1 du code du travail, tout employeur, à l'exception de l'Etat, des collectivités locales et de leurs établissements publics à caractère administratif, concourt au développement de la formation professionnelle continue dans les conditions définies par ce même article ". Aux termes de l'article 235 ter D de ce code: " Conformément aux dispositions de l'article L. 6331-9 du code du travail, les employeurs de dix salariés et plus consacrent au financement des actions de formation professionnelle continue un pourcentage au moins égal à 1,60 % du montant des rémunérations versées ". Aux termes de l'article 235 ter G du même code: " Conformément et dans les conditions prévues à l'article L. 6331-28 du code du travail, lorsque les dépenses au titre du développement de la formation professionnelle continue sont inférieures au montant prévu à l'article 235 ter D, l'employeur effectue au Trésor un versement égal à la différence constatée ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 6331-1 du code du travail: " Tout employeur concourt au développement de la formation professionnelle continue en participant, chaque année, au financement des actions mentionnées aux articles L. 6313-1 et L. 6314-1".
4. Sont assujettis aux cotisations prévues respectivement aux articles 235 bis et 235 ter C du code général des impôts les employeurs établis en France à raison des rémunérations versées aux salariés qu'ils emploient, indépendamment du lieu où ceux-ci exercent leur activité. Ces cotisations sont également dues par les employeurs dont le siège social est situé à l'étranger et qui disposent d'une installation en France, à raison des rémunérations qu'ils versent à ceux de leurs salariés rattachés à cette installation.
5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué non contestées que la société Easyjet Airline Company Limited dispose en France de trois bases d'exploitation, situées à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, à Paris-Orly ainsi qu'à Lyon, de bureaux de vente ainsi que d'une succursale située à Paris. Après avoir relevé que le recrutement, le licenciement, la gestion des congés, la formation et la gestion opérationnelle des personnels navigants rattachés à l'une des trois bases d'exploitation françaises était assurée non par la succursale française mais par le siège de la société situé au Royaume-Uni, la cour administrative d'appel de Versailles a jugé que la gestion des ressources humaines effectuée par la succursale française ne répondait pas au critère d'autonomie permettant de définir un employeur établi en France et que, par suite, la société Easyjet Airline Company Limited n'était pas redevable des cotisations au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction et de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue au titre des années 2008 à 2010 à raison de la rémunération versée à ces personnels.
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus, qu'en jugeant que la société Easyjet Airline Company Limited ne pouvait être regardée, pour ceux de ses personnels navigants rattachés à l'une des trois bases d'exploitation françaises, comme le redevable des impositions en litige au motif inopérant que la gestion des ressources humaines effectuée par la succursale française ne répondait pas au critère d'autonomie permettant de définir un employeur établi en France alors qu'il convenait de rechercher si les bases d'exploitation françaises étaient des installations permettant à la société britannique d'exercer son activité en France, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, le ministre est fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 24 janvier 2019 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 3 : Les conclusions de la société EasyJet Airline Company Limited présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la société EasyJet Airline Company Limited.