Résumé de la décision
La société Crédit Agricole a sollicité la révision de son résultat fiscal pour l'exercice 2012, contestando la réintégration des commissions de frais de dossiers dans son imposition, considérant qu'elles devaient être étalées sur la durée des crédits accordés. La Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel contre un jugement du tribunal administratif de Montreuil qui avait déjà refusé cette demande de restitution. La société se pourvoit alors en cassation. La décision finale de la cour confirme le rejet du pourvoi, considérant que les frais de dossier doivent être rattachés à l’exercice où ils sont perçus, conformément à la législation fiscale.
Arguments pertinents
1. Incompatibilité des règles comptables et fiscales : La cour a affirmé que les règles comptables prescrites par le règlement du comité de la réglementation comptable (RCRC) n° 2009-03 étaient incompatibles avec les règles fiscales stipulées dans le Code général des impôts (CGI). En particulier, elle a relevé que « l'article 4 du Regulations RCRC, qui prescrit l'étalement des frais de dossier, est incompatible avec la règle fiscale stipulée par le premier alinéa du 2 bis de l'article 38 du CGI ».
2. Interprétation des commissions de frais de dossier : La cour a jugé que les commissions étaient liées à la prestation unique d'instruction de la demande de prêt, qui se termine à l'issue de cette instruction. Elle a ainsi conclu que ces commissions ne pouvaient pas être considérées comme la contrepartie d'une prestation continue : « les commissions pour frais de dossier perçues par la CRCAM du Centre-Ouest ne pouvaient être regardées comme la contrepartie d'une prestation continue, au sens du a du 2 bis de l'article 38 du CGI ».
3. Rejet de la demande de frais : En application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative, la cour a également précisé que l'État ne pouvait pas être tenu de rembourser les frais exposés par la société Crédit Agricole, car il n'était pas la partie perdante.
Interprétations et citations légales
1. Code général des impôts - Article 38 : Cet article définit comment les revenus doivent être rattachés aux exercices. Le 2 bis insiste sur l'achèvement de la prestation pour rattacher une créance au bon exercice : « Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle... sont rattachés à l'exercice au cours duquel... intervient l'achèvement des prestations ».
2. Code général des impôts - Article 38 quater : Cet article impose le respect des définitions du plan comptable général, sauf incompatibilité avec les règles fiscales : « Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles... ».
3. Règlement du comité de la réglementation comptable n° 2009-03 : Cet acte réglementaire établit les modalités de la comptabilisation des commissions, mais la cour a constaté qu'il contenait des dispositions non conformes aux règles fiscales en vigueur, affirmant que « la prescription prévue par l'article 4 de ce règlement était incompatible avec le mode de comptabilisation des produits prévu au premier alinéa du 2 bis de l'article 38 du CGI ».
Dans l'ensemble, la décision s'appuie sur une analyse détaillée de l'interaction entre les dispositions fiscales et comptables, concluant que les règles fiscales doivent prévaloir dans ce contexte spécifique, et que la société Crédit Agricole ne pouvait pas ignorer ces préceptes pour solliciter un remboursement.