Résumé de la décision :
La décision concerne un pourvoi du ministre de l'action et des comptes publics contre un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy, qui avait annulé un jugement du tribunal administratif de Strasbourg. M. et Mme B... avaient demandé une réduction d'impôt sur le revenu lié à des investissements dans des centrales photovoltaïques en Martinique. L'administration fiscale avait contesté l'éligibilité de ces investissements en raison de leur non-raccordement au réseau électrique d'EDF. La cour administrative a conclu que l'administration avait manqué à son obligation d'informer M. et Mme B... des documents que celle-ci avait utilisés pour fonder ses redressements, en occultant des informations couvertes par le secret professionnel. Le Conseil d'État annule l'arrêt de la cour administrative pour une erreur de droit et renvoie l'affaire à cette cour.
Arguments pertinents :
1. Obligation d’information de l’administration fiscale : Le Conseil d'État rappelle que l'administration fiscale doit informer le contribuable des renseignements et documents obtenus de tiers utilisés pour établir l'imposition. L'article L. 76 B du livre des procédures fiscales stipule : « L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers [...]. »
2. Secret professionnel : Il est précisé que les documents occultés par l'administration ne peuvent être communiqués au contribuable que si leur communication respecte le secret professionnel. En l’occurrence, la cour d’appel a exigé du fisc qu'il prouve que les pages occultées l’étaient à juste titre, ce qui a été considéré comme une erreur. Le Conseil d'État estime que : « En exigeant de l'administration [...] qu'elle établisse que les seize pages occultées du procès-verbal de synthèse de la BRDE étaient couvertes par un secret protégé par la loi, la cour administrative d'appel de Nancy est allée au-delà des exigences susceptibles d'être mises à sa charge. »
3. Répercussions des erreurs de procédure : Le Conseil d'État souligne l'importance de la bonne application des règles juridiques dans la procédure de redressement fiscal, établissant que la défaillance dans la communication d’informations ne peut pas remettre en question la régularité du redressement lorsqu’elle est effectuée selon les normes en vigueur.
Interprétations et citations légales :
1. Code général des impôts (CGI) - Article 199 undecies B : Cet article établit les conditions de la réduction d'impôt pour les investissements en faveur de l'énergie solaire. Le litige tourne autour de la conformité de M. et Mme B... aux exigences de raccordement pour bénéficier de cette réduction. L'interprétation des critères d'éligibilité est cruciale, car l'administration estime que l'absence de raccordement empêche le bénéfice de l'avantage fiscal.
2. Livre des procédures fiscales - Article L. 76 B : Cet article impose à l'administration l'obligation de communiquer au contribuable les documents utilisés pour établir une imposition. Il souligne l'importance pour le contribuable d'avoir accès à l'information afin de contester les décisions prises par l'administration. En tant qu'instrument de garantie des droits du contribuable, cet article établit le cadre dans lequel la communication d'informations peut être restreinte.
3. Livre des procédures fiscales - Article L. 103 : Cet article garantit la protection des informations couvertes par le secret professionnel, posant ainsi les limites aux obligations d'information de l'administration fiscale. Le Conseil d'État a clarifié que, même en présence de secrets protégés, les droits du contribuable doivent être respectés, mais il est également vital que l'administration soit en mesure de se défendre avec des éléments justifiant l'occultation.
En conclusion, cette décision renforce l'importance d'une communication transparente dans le cadre de la fiscalité tout en respectant les prérogatives liées à la protection des données sensibles ou confidentielles. La nécessité d’un équilibre entre les droits du contribuable et les obligations de l’administration fiscale est au cœur de cette affaire.