Résumé de la décision
M. A... a contesté une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au motif que la plus-value résultant d'un échange de titres, réalisé en 1997, ne pouvait être imposée par la France après qu'il ait transféré son domicile fiscal en Belgique. La cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa demande, considérant que la France avait le droit de taxer cette plus-value sous prétexte qu'il était résident fiscal français au moment de la réalisation de la plus-value. Le Conseil d'État a confirmé cette décision, soulignant que la réglementation française, ainsi que les dispositions de la convention fiscale franco-belge, ne s'opposaient pas à cette imposition.
Arguments pertinents
1. Mécanisme de report d'imposition : Le Conseil d'État a confirmé que : “le II de l'article 92 B et du I ter de l'article 160 du code général des impôts institue un mécanisme de report d'imposition”, permettant la constatation de la plus-value lors de sa réalisation et son imposition lors de l'événement qui met fin à ce report, tel que la cession des titres.
2. Compétence pour l’imposition : La cour a jugé que la législation de l'État dans lequel la plus-value a été réalisée (France) demeure compétente pour l'imposer, même si le contribuable a transféré sa résidence fiscale par la suite : “la circonstance que le contribuable ait, entre temps, transféré son domicile fiscal dans un autre Etat est sans incidence sur le pouvoir dont dispose l’Etat dont il était le résident au moment de la réalisation de la plus-value d’échange d’imposer celle-ci”.
3. Application de la convention fiscale : Concernant l'interprétation de l'article 18 de la convention fiscale franco-belge, le Conseil d'État a affirmé que cette stipulation n'empêche pas l'État ayant l'imposition de la plus-value d'exercer cette compétence au moment où le fait générateur se produit : “la convention fiscale ne faisait pas obstacle à ce que M. A... soit assujetti… à raison de cette plus-value d'échange”.
Interprétations et citations légales
1. Mécanisme de report d'imposition
- Code général des impôts - Article 92 B, II : Cet article établit que l'imposition de la plus-value peut être reportée : "l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de titres peut être reportée au moment où s'opérera la cession ou le rachat des titres reçus lors de l'échange".- Code général des impôts - Article 160, I ter : Précise que "l'imposition de la plus-value réalisée [...] peut être reportée dans les conditions prévues au II de l'article 92 B".
2. Compétence d'imposition
- CJUE - Arrêt du 22 mars 2018 (C-327/16 et C-421/16) : La Cour avait statué que la plus-value issue d'une opération d'échange de titres peut être constatée lors de l'échange mais son imposition doit être reportée jusqu'à la cession des titres reçus : "les dispositions [de l’article 8 de la directive 90/434/CEE] doivent être interprétées... l'imposition est reportée [...] jusqu'à l'année au cours de laquelle intervient l'événement mettant fin à ce report d'imposition".3. Convention fiscale
- Convention fiscale entre la France et la Belgique - Article 18 : Cet article stipule que “les revenus des résidents de l’un des États contractants ne sont imposables que dans cet État”, mais la cour a relevé que cela ne faisait pas obstacle à la compétence de l'État où la plus-value a été réalisée.En conclusion, l'argumentation du Conseil d'État repose sur l'application des lois fiscales françaises et des conventions internationales, affirmant la validité de l'imposition par l'État où l'événement générateur (réalisation de la plus-value) a eu lieu, respectant ainsi les principes du droit fiscal tant national qu'européen.