2°) d'enjoindre à la direction départementale des services de l'éducation nationale (DASEN) du Nord de scolariser leur fille Louise dans son école de référence avec l'accompagnement nécessaire à l'aide sur les actes du quotidien afin qu'elle puisse poursuivre son année scolaire en disposant des aménagements nécessaires, notamment l'utilisation de son outil de communication, dans l'attente de la décision d'orientation ULIS prononcée par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) dans le cadre d'un projet personnalisé de scolarisation (PPS) qu'ils auront validé, ou à défaut par le tribunal judiciaire, dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, au besoin sous astreinte ;
3°) de mettre à la charge de la DASEN la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille est entachée d'erreur de droit dès lors que, en premier lieu, l'équipe de suivi de scolarisation (ESS) n'a ni compétence ni légitimité à élaborer un parcours de scolarisation, qui relève de la compétence de la MDPH en vertu du code de l'éducation, en deuxième lieu, la DASEN lui dénie son droit d'aller à l'école alors qu'elle n'a ni compétence ni légitimité pour mettre en place un projet d'accueil en ULIS, toute orientation qui déroge à la scolarité de droit commun ne pouvant être prononcée que par décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) en vertu du code de l'action sociale et des familles, en troisième lieu, la CDAPH ne peut être regardée comme ayant refusé d'autoriser la scolarisation de Louise en milieu ordinaire étant donné que sa décision de mettre en place une scolarité à mi-temps dans une unité d'enseignement d'un établissement médico-social fait actuellement l'objet d'un recours suspensif devant le tribunal judicaire, et, en dernier lieu, l'âge de Louise n'est pas un motif d'exclusion d'une classe de cours préparatoire (CP) conformément à la jurisprudence ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, leur fille Louise, qui a besoin de participer à la vie de l'école pour continuer à progresser, n'est pas retournée à l'école depuis le 18 janvier 2021 et aucune solution pérenne ne se dessine pour la rentrée du lundi 8 mars, en deuxième lieu, l'école et le centre d'éducation motrice (CEM) ont signalé une situation préoccupante à la cellule de recueil des informations préoccupantes (CRIP) mais également à la MDPH, qui l'a transmise au parquet, alléguant du fait qu'ils mettent leur fille en danger et sollicitant une décision judiciaire en assistance éducative et, en dernier lieu, il est porté atteinte à l'exigence constitutionnelle d'égal accès à l'instruction ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit à l'éducation ainsi qu'à l'exigence constitutionnelle d'égal accès à l'instruction ;
- la décision de la DASEN fait obstacle à l'exercice du droit de leur fille d'égal accès à l'instruction et est ainsi constitutive d'une carence de l'Etat dès lors qu'il incombe à celui-ci de mettre en place les moyens financiers et humains nécessaires à la scolarisation en milieu ordinaire de Louise ;
- elle est, à titre principal, entachée d'illégalité en ce que, d'une part, elle est constitutive d'une discrimination dès lors que, en premier lieu, c'est à la DASEN qu'il incombe de mettre en oeuvre les moyens humains nécessaires à rendre la scolarité effective en vertu de l'article L. 112-1 du code de l'éducation, en deuxième lieu, elle n'a pas à s'opposer à l'intervention d'un professionnel de soin alors même qu'elle n'apporte pas elle-même cette aide et, en dernier lieu, la scolarité d'un enfant en situation de handicap n'est pas conditionnée par la présence d'un accompagnant des élèves en situation de handicap et, d'autre part, elle refuse que Louise soit accueillie dans son école de référence alors même qu'elle n'a pas compétence pour imposer d'autres modalités de scolarisation ;
- elle est, à titre subsidiaire, entachée d'illégalité en ce que, d'une part, le dénigrement constant des capacités de Louise porte atteinte à sa dignité et, d'autre part, seuls les parents ont la capacité juridique pour saisir la MDPH de toute demande pour leur enfant afin que celle-ci conduise une évaluation des besoins, des compétences et des mesures mises en oeuvre dans le cadre du parcours de l'enfant tendant à l'élaboration d'un plan personnalisé de compensation incluant un PPS.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2021, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête. Il soutient, à titre principal, que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et, à titre subsidiaire, qu'il n'est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées.
Par un nouveau mémoire, enregistré le 19 mars 2021, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports informe que l'élève Louise C... sera accueillie dans son école de référence, dès le lundi 22 mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de l'éducation ;
- le code pénal ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme D... et M. C..., et d'autre part, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports ;
Ont été entendus lors de l'audience publique du 18 mars, à 10 heures :
- Me Froger, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des requérants ;
- Mme B... D... et M. A... C... ;
- les représentants du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a été différée au 19 mars 2021 à 12 heures.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".
2. Louise C..., fille de Mme B... D... et de M. A... C..., âgée de 7 ans, est affectée d'un handicap ayant conduit à lui reconnaître un taux d'invalidité égal ou supérieure à 80 %. Par une décision du 2 septembre 2020, la CDAPH a approuvé un PPS comprenant, d'une part, un accueil en structure spécialisée pour enfants polyhandicapés et, d'autre part, une orientation en unités d'enseignement. Les parents de Louise C... ont saisi le tribunal judiciaire de Valenciennes d'un recours qui, en vertu des dispositions de l'article L. 241-9 du code de l'action sociale et des familles a eu, dès lors qu'il avait été intenté par la personne handicapée ou son représentant légal, un effet suspensif sur les décisions prises, comme en l'espèce, par la CDAPH ayant désigné en application du 2°) du I de l'article L 241-6 du même code les établissements ou services ou dispositifs correspondant aux besoins de l'enfant. Entre-temps et en conséquence, Louise C... a été accueillie, à raison de quatre matins par jour dans l'école du village de son domicile, bénéficiant à cette occasion du concours d'une AESH. Toutefois, à partir du début de l'année 2020, diverses circonstances ont conduit à la suspension de la scolarisation de Louise C.... Désireux que leur enfant puisse néanmoins rejoindre à nouveau l'école de son domicile, le contact des parents avec l'administration de l'éducation nationale a conduit à la proposition par cette dernière de reprise de la scolarité de Louise dans une ULIS, à compter du 8 mars 2021. Les parents de Louise, maintenant leur intention de scolariser leur fille à l'école de son domicile, ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Lille agissant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, afin qu'il enjoigne à la DASEN de scolariser leur fille dans l'école. Par une ordonnance du 18 février 2021, le juge des référés a rejeté cette demande, en estimant que la proposition d'accueil effective dès le 8 mars 2021, après les congés scolaires d'hiver, ne permettait pas de regarder les agissements de l'administration de l'éducation nationale comme constitutifs d'une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Les parents de Louise C... font appel de cette ordonnance.
3. Entre-temps, par un jugement du 5 mars 2021, le tribunal judiciaire de Valenciennes a statué sur le recours de M. A... C... et de Mme B... D..., en décidant, d'une part, que Louise devait être scolarisée en ULIS, et dans l'attente de son admission, à l'école communale de Hon Hergies, dans les mêmes conditions qu'antérieurement, c'est-à-dire à raison de quatre matinées de trois heures par semaine, avec le bénéfice pour la durée de sa scolarisation mentionnée par l'ordonnance, soit jusqu'au 31 août 2024, d'un AESH.
4. Il résulte des débats à l'audience que l'administration de l'éducation nationale n'a, d'une part, pas l'intention de relever appel du jugement du tribunal judiciaire, pas plus que la CDAPH et, d'autre part, entendant pleinement exécuter ce jugement, a déjà proposé aux parents de Louise C... une place dans deux ULIS entre lesquels ils leur reviennent de choisir. Toutefois, observant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 112-2 du code de l'éducation, le parcours de formation d'un enfant en situation de handicap fait normalement l'objet d'un PPS élaboré par une équipe pluri disciplinaire associant à cette élaboration les parents de l'enfant, les parents de Louise entendent que son admission en ULIS ne soit opérée qu'après l'élaboration de ce PPS, et demandent en conséquence en l'attente de ce document, que leur fille puisse être scolarisée dans l'école de sa commune, conformément au dispositif du jugement du tribunal judiciaire. Les représentants du ministre de l'éducation nationale ont confirmé à l'audience qu'un PPS serait élaboré dans les conditions de droit commun avant l'entrée en ULIS. Dès lors que l'élaboration de ce document pourrait nécessiter de l'ordre d'un mois, interrogé à l'audience sur la possibilité d'admettre Louise C... dès le lundi 22 mars à l'école de Hon Hergies, le ministère de l'éducation nationale a confirmé par un mémoire produit le lendemain de l'audience, d'une part, que Louise C... serait admise dans cette école à cette date et, d'autre part, comme le demande également le dispositif du jugement du tribunal judiciaire, que la scolarisation bénéficierait dans les conditions fixées par ce jugement de la présence d'une AESH.
5. De l'ensemble des considérations qui précèdent, il résulte que la totalité des demandes formulées par Mme D... et M. C... au nom et pour le compte de leur fille Louise, ont ainsi été satisfaites. Il n'y a donc plus lieu, pour le juge des référés au Conseil d'État, de statuer sur les conclusions formulées par les requérants sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
6. M. et Mme D... ont également demandé que l'Etat leur verse une somme d'argent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Toutefois leur requête d'appel n'a pas été introduite par un avocat et ils ne justifient d'aucune autre dépense liée à l'introduction de leur recours. Leur demande sur ce fondement ne peut donc qu'être rejetée.
O R D O N N E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de Mme D... et de M. C....
Article 2 : Les conclusions de la requête fondée sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... D..., M. A... C... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.