Résumé de la décision
Le Syndicat ovin de l'Ariège et d'autres demandeurs ont saisi le juge des référés du Conseil d'État pour faire suspendre l'arrêté du 29 août 2018 autorisant l'introduction de deux ours bruns (Ursus arctos) dans le milieu naturel. Les requérants invoquent un préjudice économique pour les éleveurs et un risque pour la santé publique due à une maladie potentiellement introduite. Le ministre de la Transition écologique conteste cette requête en arguant de l’incompétence du juge des référés et de l'absence d'urgence. Par une ordonnance, le Conseil d'État rejette la requête, considérant que l'arrêté contesté ne constitue pas un acte réglementaire et que la juridiction n'est pas compétente.
Arguments pertinents
1. Incompétence du juge des référés : Le ministre de la Transition écologique soutient que le juge des référés n’est pas compétent car l'arrêté en cause n'est pas un acte réglementaire. Il cite l'article R. 311-1 du code de justice administrative qui définit le champ d’application de la juridiction administrative. Le Conseil d'État confirme : "la décision par laquelle le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, autorise l'introduction... n'entre, par suite, pas dans le champ d’application de l'article R. 311-1 du code de justice administrative".
2. Absence de condition d'urgence : Le juge conclut que la condition d'urgence n'est pas remplie car le préjudice allégué par les requérants n'est pas suffisamment démontré. De plus, l'effet de l'arrêté étant déjà produit, il n'est pas justifié de suspendre son exécution.
3. Doute sérieux sur la légalité : Les requérants font valoir un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté, mais le juge considère que les arguments avancés ne sont pas suffisants pour établir ce doute.
Interprétations et citations légales
1. Interprétation de l'article L. 521-1 du Code de justice administrative :
- Article L. 521-1 : "Quand une décision administrative... fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision... lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer... un doute sérieux quant à la légalité de la décision."
- Le juge souligne que les conditions posées par cet article ne sont pas remplies, notamment en raison de l'incompétence matérielle.
2. Rappel de la procédure administrative :
- Article R. 522-8-1 du Code de justice administrative : Ce texte stipule que "par dérogation... le juge des référés qui entend décliner la compétence de la juridiction rejette les conclusions dont il est saisi par voie d'ordonnance". Cela justifie la décision de rejet par le juge des référés.
3. Conséquences de l'absence d'acte réglementaire :
- Le juge rappelle que l'acte doit être considéré comme ayant été pris en dehors du cadre d'application réglementaire, ce qui le rend incompétent pour statuer sur la demande de suspension, confirmant ainsi l'ordonnance du président de la section du contentieux.
En somme, cette décision illustre les limites de la compétence du juge de référés et la nécessité de démontrer tant l'urgence que le vice de légalité d'une décision administrative pour justifier la suspension de son exécution.