Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 décembre 2015, M. C...D..., représenté par la Me B...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de résident de dix ans dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision implicite de rejet est entachée d'un défaut de motivation ;
- le courrier de communication des motifs du 9 juillet 2014 ne lui a pas été délivré ;
- en ne saisissant pas pour avis le maire de sa commune de résidence, le préfet a entaché la décision d'un vice de procédure ;
- il a commis une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 314-8 et de l'article R. 314-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il s'est estimé, à tort, lié par la condition relative aux ressources posée par ces articles ;
- il a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2015, la préfète de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 octobre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979, applicable à la date de la décision attaquée : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués " ;
2. Considérant que la demande de M. D...du 5 avril 2014 tendant à la délivrance d'une carte de résident sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été implicitement rejetée par le préfet de la Seine-Maritime ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D...aurait demandé au préfet la communication des motifs de cette décision implicite de rejet ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée est inopérant ; que M. D...ne peut davantage utilement soutenir que le courrier du 9 juillet 2014, par lequel le préfet a communiqué à MmeD..., son épouse, les motifs fondant la décision implicite de rejet prise à l'encontre de cette dernière, ne lui a pas été communiqué ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit, dès lors, être écarté ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour mentionnées aux articles (...) L. 313-11 (...) peut obtenir une carte de résident portant la mention "résident de longue durée - CE" s'il dispose d'une assurance maladie. (...). La décision d'accorder ou de refuser cette carte est prise en tenant compte des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et de ses moyens d'existence. / Les moyens d'existence du demandeur sont appréciés au regard de ses ressources qui doivent être stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues aux articles L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles et L.351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance et sont appréciées au regard des conditions de logement. / Le caractère suffisant des ressources au regard des conditions de logement fait l'objet d'un avis du maire de la commune de résidence du demandeur. Cet avis est réputé favorable à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la saisine du maire par l'autorité administrative " ; qu'aux termes de l'article R. 314-1-1 du même code : " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention "résident de longue durée - CE" doit justifier qu'il remplit les conditions prévues à l'article L. 314-8 en présentant : / (...) / 3° La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance ; lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande (...) " ;
4. Considérant que si M.D..., ressortissant mongol, justifie d'une ancienneté de résidence ininterrompue de cinq années en France, il ne dispose toutefois pas de ressources stables, suffisantes et régulières ; qu'il ne conteste pas ne pas avoir exercé d'activités professionnelles depuis l'obtention de son titre de séjour en 2007 ; qu'il ressort des pièces du dossier que les ressources de M. D...ne proviennent que des allocations familiales composées du revenu de solidarité active, de l'aide personnalisée au logement et, au cours du mois de janvier 2009, de l'allocation aux adultes handicapés ; que, cependant, ces allocations ne font pas partie des ressources à prendre en compte pour l'attribution de la carte de résident de longue durée - CE ; que l'intéressé ne justifie pas davantage de l'évolution favorable de sa situation en ce qui concerne la stabilité et la régularité de ses revenus entre le dépôt de sa demande et la décision attaquée ; que, par ailleurs, M. D...n'est que locataire de son logement ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de lui délivrer une carte de résident longue durée - CE, au regard des articles L. 314-8 et R. 314-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime se serait estimé lié par la condition relative aux ressources posée par les dispositions précitées de l'article L. 314-8 et de l'article R. 314-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser de délivrer la carte de résident de longue durée - CE ; que le moyen tiré de cette erreur de droit doit, par suite, être écarté ;
6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, les ressources de M D...n'étant pas suffisantes, stables et régulières, le préfet de la Seine-Maritime n'avait pas à procéder à la consultation, prévue par les dispositions précitées de l'article L. 314-8, du maire de la commune de résidence du requérant pour apprécier le caractère suffisant de ces ressources au regard des conditions de logement ; que, par suite, l'intéressé ne peut utilement soutenir que la décision aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière ;
7. Considérant que M. D...déclare être entré en France le 5 février 2003 ; que la protection subsidiaire lui a été accordée par la Cour nationale du droit d'asile le 13 septembre 2006 ; que, depuis 2007, il a obtenu le renouvellement de titres de séjour temporaires d'un an sur le fondement de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'à la date de la décision attaquée, son titre de séjour était renouvelé jusqu'au 23 juin 2015 ; que l'intéressé ne fait état d'aucune intégration sociale ou professionnelle sur le territoire ; qu'ainsi, compte tenu de ce qui a été dit au point 4 et en dépit de la durée de son séjour en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle de M.D... ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D..., au ministre de l'intérieur et à Me B...A....
Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 30 juin 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 juillet 2016.
Le président-assesseur,
Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,
Président de chambre rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : S. DUPUIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Sylviane Dupuis
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N°15DA02082 3