Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 juillet 2014, M. E...B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1307436-1402101 du 15 juillet 2014, du tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions dirigées contre les décisions du 27 février 2014.
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 27 février 2014 pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.
Il soutient que :
S'agissant du refus de délivrance de titre de séjour :
- la décision est entachée d'incompétence, l'identification du signataire étant impossible ;
- l'existence d'une fraude lui ayant permis d'obtenir indument un visa et un titre de séjour du fait de sa qualité de conjoint de Française n'est pas établie par le préfet ;
- la décision méconnaît les stipulations combinées de l'article 5 et du c) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, en exécution de laquelle elle a été prise ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fixant le délai de départ volontaire de droit commun à trente jours ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- la décision est illégale, en raison de l'illégalité des décisions lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français.
Par une lettre en date du 4 décembre 2015 les parties ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.
Par une ordonnance du 4 décembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 décembre 2015.
Un mémoire en défense présenté par le préfet du Rhône a été enregistré le 22 janvier 2016.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du
6 octobre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bourrachot, président.
1. Considérant que, le 26 avril 2011, M.B..., ressortissant algérien né le 11 avril 1985, a épousé une ressortissante française en Algérie ; qu'il est entré sur le territoire français le 7 juillet 2012, muni d'un visa C portant la mention " familleF... " et s'est vu délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 12 juillet 2012 au 11 juillet 2013 ; que, le 30 avril 2013, M. B...a sollicité un changement de statut par la délivrance d'un certificat de résidence algérien en qualité de commerçant ; que, par arrêté du 27 février 2014, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de commerçant ainsi qu'un certificat de résidence algérien de dix ans en qualité de conjoint de Française, l'a obligé à quitter le territoire français sous le délai d'un mois et a désigné le pays vers lequel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ; que M. B... a contesté ces décisions devant le tribunal administratif de Lyon, qui a annulé la décision fixant le délai de départ volontaire et rejeté ses conclusions dirigées contre les autres décisions, par jugement du 15 juillet 2014, dont l'intéressé interjette appel en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;
Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que Mme D...A..., directrice de la citoyenneté, de l'immigration et de l'intégration de la préfecture du Rhône, qui a signé la décision attaquée, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet du Rhône en date du
16 janvier 2014, régulièrement publiée le lendemain au recueil des actes administratifs de la préfecture du Rhône, l'autorisant à signer cet acte administratif ; que la circonstance que la signature figurant sur l'arrêté en litige est similaire à celles apposées sur d'autres documents de la préfecture du Rhône mentionnant des signataires différents n'est pas de nature, par elle-même, à remettre en cause l'identité du signataire de l'arrêté en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 5 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les ressortissants algériens s'établissant en France pour exercer une activité professionnelle autre que salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur justification, selon le cas, qu'ils sont inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel, un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7 bis. ", qu'aux termes du c) de l'article 7 du même accord : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s'ils justifient l'avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité " et qu'aux termes de l'article 9 dudit accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis al. 4 (lettre c et d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. (...) " ;
4. Considérant que si, en vertu de l'article 9 de l'accord franco-algérien susvisé, la première délivrance d'un certificat de résidence algérien sur le fondement de l'article 5 et du c) de l'article 7 du même accord est subordonnée à la production par le demandeur d'un visa de long séjour, il en va différemment pour le ressortissant algérien déjà admis à séjourner en France et qui sollicite le renouvellement, même sur un autre fondement, du certificat de résidence algérien dont il est titulaire ; qu'en l'espèce, si le préfet soutient sans être contredit que M. B... est entré en France le 7 juillet 2012 sous couvert d'un visa C " famille de français ", lequel constitue un visa de court séjour, M. B...a obtenu, en tant que conjoint de Française, un certificat de résidence algérien valable du 12 juillet 2012 au 11 juillet 2013 ;
5. Considérant toutefois, d'une part, qu'un acte administratif obtenu par fraude ne crée pas de droits et, d'autre part, que si un acte de droit privé opposable aux tiers l'est aussi, en principe à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient cependant à l'autorité administrative, lorsque se révèle une fraude, commise en vue d'obtenir le bénéfice de dispositions de droit public, d'y faire échec, même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé ; que ce principe peut conduire l'administration, qui doit exercer ses compétences sans pouvoir renvoyer une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, à ne pas tenir compte, dans l'exercice de ces compétences, d'actes de droit privé opposables aux tiers ;
6. Considérant, qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier, et notamment des déclarations du requérant et de celles de son épouse, que ces derniers n'ont jamais eu de vie commune ; qu'en particulier, M. B...s'est installé, dès son arrivée en France, chez sa tante et non pas avec son épouse qui résidait alors chez ses parents, et n'établit pas avoir recherché un logement pour y établir son couple ; qu'il ressort également des déclarations de la mère de son épouse et des motifs du jugement du 21 novembre 2013, frappé d'appel, par lequel le tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône a prononcé l'annulation du mariage des intéressés, que M. B...s'est comporté en personne célibataire dès son arrivée sur le territoire français et que le mariage n'a pas été consommé ; que M. B...ne produit aucun élément de nature à remettre sérieusement en cause l'ensemble des faits sur lesquels l'autorité préfectorale s'est fondée pour constater que M. B...était dépourvu d'une réelle volonté de s'unir effectivement et durablement à son épouse française et n'avait contracté ce mariage qu'aux fins d'installation sur le territoire français ; qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône apporte la preuve qui lui incombe que M. B...a obtenu la délivrance d'un premier certificat de résidence algérien en tant que conjoint de Française par fraude ; qu'ainsi obtenu, ledit titre de séjour ne saurait avoir créé pour l'intéressé aucun droit ; qu'il ne permet notamment pas de regarder M. B... comme ayant séjourné régulièrement sur le territoire français en vertu d'un certificat de résidence algérien le dispensant de justifier d'un visa de long séjour pour la délivrance d'un titre de séjour en qualité de commerçant sur le fondement des stipulations combinées des articles 5 et 9 et du c) de l'article 7 de l'accord franco-algérien susvisé ; qu'en conséquence, le préfet du Rhône n'a pas méconnu ces stipulations en refusant la délivrance d'un certificat de résidence commerçant à M. B...au motif qu'il n'était pas en mesure de présenter un visa de long séjour ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant que la décision de refus de délivrance de titre de séjour n'étant pas illégale, M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
8. Considérant que M. B...soutient que le délai d'un mois qui lui a été accordé, par décision du 27 février 2014, pour quitter volontairement le territoire français, est inférieur au délai de droit commun de trente jours prévu à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, à l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 27 février 2014, par laquelle le préfet du Rhône a fixé le délai de départ volontaire accordé à l'intéressé ; que, par suite, M.B..., qui a obtenu satisfaction sur ce point en première instance, ne peut pas se prévaloir d'un intérêt à agir à l'encontre de l'article 1er du jugement du 15 juillet 2014 ; qu'en conséquence, il n'est pas recevable à présenter des conclusions et moyens contre cette décision d'octroi de délai de départ volontaire ;
Sur la décision désignant le pays de destination :
9. Considérant qu'il résulte de l'examen ci-avant de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français, que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi ; que cette dernière décision n'ayant pas été prise en application ni sur le fondement de la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence algérien, le requérant ne saurait utilement exciper de l'illégalité de ce refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er mars 2016.
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N° 14LY02339