Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 mars 2016, le préfet de l'Isère demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 février 2016 ;
2°) de rejeter la demande de M. C...;
Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé qu'un refus de titre de séjour conduirait à une séparation durable des épouxC... ; qu'en ce cas l'épouse de l'intéressé ne sera pas isolée en France ; qu'aucune atteinte effective n'a été portée à son droit à une vie privée et familiale ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 mai 2016, présenté pour M.C..., qui conclut au rejet de la requête, par les mêmes moyens que ceux invoqués en première instance.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 avril 2016 ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 19 mai 2016 :
- le rapport de M. Faessel, président ;
- et les observations de Me Duvergier, avocat de M.C....
1. Considérant que M.C..., ressortissant algérien, a, le 23 octobre 2012, épousé Mme B..., de nationalité algérienne également, et titulaire d'un certificat de résidence de dix ans ; que l'intéressé, qui déclare être entré régulièrement en France le 22 octobre 2014 sous couvert d'un visa de huit jours délivré par les autorités maltaises a, le 24 juillet 2015, présenté une demande de titre de séjour sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé du 27 décembre 1968 ; que par un arrêté du 14 septembre 2015, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à destination de l'Algérie ; que le préfet fait appel du jugement du 9 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté au motif unique d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé ;
2. Considérant que si les parents de l'épouse de M. C...résident régulièrement en France, et si le requérant était, à la date de l'arrêté contesté, père d'un enfant né en France en son absence au mois de janvier 2014, il ressort également des pièces du dossier que les intéressés ont vécu séparés, même après la naissance de leur enfant, depuis leur mariage prononcé le 23 octobre 2012, jusqu'au mois d'octobre 2014, date de l'arrivée en France de M.C... ; que la seule circonstance que l'exécution de l'arrêté est susceptible d'entrainer une séparation temporaire de la famille, dans l'attente d'une autorisation de regroupement familial, ne saurait dès lors suffire à faire admettre que le préfet a entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de celles ci sur la situation personnelle de M.C... ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté litigieux du préfet de l'Isère, le tribunal administratif a estimé que le préfet avait commis une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M.C... ;
5. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Grenoble ;
6. Considérant que par un arrêté du 17 avril 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet de l'Isère a donné à M. Patrick Lapouze, secrétaire général de la préfecture de l'Isère et signataire de la décision contestée, délégation à l'effet de signer "tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception des mesures concernant la défense nationale et celles concernant le maintien de l'ordre, des mesures de réquisition prises en application de la loi du 11 juillet 1938, des déclinatoires de compétences et arrêtés de conflit et des mesures de réquisition prises en application de l'article L. 2251-1 du code général des collectivités territoriales" ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté, celui-ci n'étant pas au nombre des exceptions mentionnées ;
Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :
7. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 4 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié est, en tout état de cause, rédigé en des termes confus qui interdisent à la cour d'en apprécier la pertinence ;
8. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne est dépourvu de toute précision permettant à la cour d'en apprécier le bien fondé ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si l'épouse, et l'enfant du requérant né le 12 janvier 2014, résidaient sur le territoire national à la date de l'arrêté attaqué, il n'est pas contesté que la famille a vécu séparée jusqu'en octobre 2014 ; que M. C...ne se prévaut pas d'autres attaches en France et ne soutient pas avoir perdu tout contact dans son pays, et que l'intéressé ne fait état d'aucune circonstance effective de nature à interdire que la famille s'établisse en Algérie, dès lors en particulier que le requérant lui même souligne que son épouse est sans emploi stable ni ressource propre, en France ; que par suite M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision du préfet méconnait son droit à mener une vie privée et familiale, en violation, en tout état de cause, des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié ou de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'enfant de M.C..., qui d'ailleurs a déjà vécu séparé de son père, sera durablement éloigné de lui à raison du refus opposé par le préfet à sa demande de titre de séjour ; que dès lors l'intéressé n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que cette mesure méconnait l'intérêt supérieur de cet enfant, en violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale susvisée relative aux droits de l'enfant ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. C...n'est pas fondé à invoquer par voie d'exception, au soutient de ses conclusions à fins d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, l'illégalité de celle portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
12. Considérant que les motifs tirés de la violation des stipulations de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus ;
Sur la décision désignant le pays de destination :
13. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. C...n'est pas fondé à invoquer par voie d'exception, au soutient de ses conclusions à fins d'annulation de la décision portant fixation du pays de destination, l'illégalité de celle portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
14. Considérant que les motifs tirés de la violation des stipulations de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus ;
15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de M. C...devait être rejetée ;
16. Considérant qu'en conséquence de ce qui vient d'être dit, les conclusions de M. C...tendant au prononcé d'une injonction, sous astreinte, à l'adresse du préfet de l'Isère, et à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, présentées devant le tribunal administratif de Grenoble, ne pouvaient qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : La demande de M. C...présentée devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2016 à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
M. Segado, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
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N° 16LY00923