Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2017, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) d'enjoindre à la commune de Rousset de statuer de nouveau sur sa demande, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Rousset une somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'illégalité du refus de permis de construire, par voie de conséquence de l'illégalité de la demande de pièces complémentaires du 22 octobre 2014 ;
- il excipe de l'illégalité de la demande de pièces complémentaires, des pièces autres que celles listées à l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme lui ayant été réclamées ;
- le projet ne méconnaît pas l'article NC 2 du règlement du plan d'occupation des sols et la décision attaquée est entachée sur ce point d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2017, la commune de Rousset conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge du requérant la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gougot,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant M.B..., et de MeD..., représentant la commune de Rousset.
Une note en délibéré présentée par la commune de Rousset a été enregistrée le 9 janvier 2019.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de Rousset a, par arrêté du 13 avril 2015, refusé d'accorder à M. B...un permis de construire aux fins de réhabiliter une bergerie désaffectée sur des parcelles cadastrées AR no 54 et 55 d'une superficie totale de 33 050 m², sur le territoire communal. Celui-ci interjette appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article NC 2 du règlement du plan d'occupation des sols (POS), sont autorisés, dans la zone NC, " les bâtiments fonctionnels nécessaires à l'activité agricole ".
3. Contrairement à ce que soutient la commune, le maire n'est pas tenu de refuser un projet de construction situé en secteur " N " du POS, mais doit apprécier si le projet porte sur une construction " nécessaire à l'activité agricole ", comme telle autorisée par les dispositions dérogatoires de l'article NC 2 du règlement du POS.
4. Et ainsi qu'il a été dit au point 1, il ressort des pièces du dossier que le projet en litige vise à réhabiliter une bergerie désaffectée depuis plusieurs années, située sur une parcelle cadastrée n° 54, en zone agricole du POS, afin d'y réaliser une " remise fermée " d'une superficie de 220 m² sur deux niveaux, pour y stocker la paille nécessaire à une activité de porcherie. M. B... est en effet le gérant de la société civile d'exploitation agricole (SCEA) " SOCAER " pour laquelle il exploite une porcherie de dix bâtiments, autorisés le 29 avril 1969 sur une parcelle cadastrée n° 17 d'une surface hors oeuvre brute (SHOB) de 8 360 m², outre une villa, un bureau, une aire à fumier et deux silos de 832 m² et 267 m² de SHOB. S'il dispose également sur cette parcelle n° 17 d'un hangar de 2 600 m² de SHOB, il soutient que ce hangar ne permettrait pas le stockage de la paille dans de bonnes conditions sanitaires et produit en ce sens une attestation vétérinaire du 29 juin 2015. En outre, le requérant soutient sans être sérieusement contesté par la commune que le projet est à 17 mètres du champ cultivé le plus proche. Ce faisant, le projet de construction en litige doit être regardé comme un " bâtiment fonctionnel nécessaire à l'activité agricole " de M.B..., au sens des dispositions précitées de l'article NC 2 du règlement du POS.
5. Toutefois, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
6. A supposer que la commune de Rousset ait entendu demander à la Cour de substituer au motif illégal tiré de la méconnaissance de l'article NC 2, le motif tiré de la violation de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme car le projet présenterait un risque sanitaire compte tenu de sa localisation à proximité de maisons d'habitation, un tel motif n'est pas de nature à fonder légalement la décision de refus attaquée alors que la commune ne démontre pas l'existence d'un risque qui serait généré par la création de la remise pour stocker de la paille.
7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature, en l'état de l'instruction, à conduire à l'annulation de la décision contestée.
8. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les conclusions en injonction :
9. Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ". Eu égard aux motifs du présent arrêt, son exécution entraîne nécessairement le réexamen de la demande d'autorisation de l'intéressé, dans un délai de deux mois compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de Rousset dirigées contre M. B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Rousset une somme de 2 000 euros, à verser à M. B...en application de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2017 et l'arrêté de refus de permis de construire du 13 avril 2015 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Rousset de réexaminer la demande de permis de construire de M.B..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et suivant les modalités précisées dans les motifs sus indiqués.
Article 3 : La commune de Rousset versera à M. B...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Rousset formées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et à la commune de Rousset.
Copie en sera adressée au Procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence.
Délibéré après l'audience du 3 janvier 2019, où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme Gougot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 janvier 2019.
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N° 17MA03163
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