Par un jugement n° 1403913 du 16 juin 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 août 2017, M. et MmeB..., représentés par MeA..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 16 juin 2017 ;
2°) de condamner solidairement la commune du Cannet-des-Maures et le syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues la somme de 101 750 euros au titre des travaux de reprise et la somme de 60 000 euros au titre du préjudice moral ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la commune du Cannet-des-Maures et du syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la responsabilité de la commune du Cannet-des-Maures et du syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues est engagée pour défaut d'entretien normal des ouvrages publics ;
- l'absence d'entretien et de protection de la canalisation par le syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues est à l'origine de l'éboulement du talus ;
- les travaux de réfection du chemin par la commune du Cannet-des-Maures ont aggravé le ruissellement des eaux pluviales sur leur propriété ainsi que l'instabilité du talus ;
- le lien de causalité entre les ouvrages publics et le dommage est établi.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2018, le syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues, représenté par la SELARL LLC et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme B...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- aucun défaut d'entretien de la canalisation souterraine d'adduction d'eau potable traversant les parcelles des requérants ne peut lui être reproché ;
- aucune fuite de cette conduite n'a été détectée ;
- elle fait l'objet d'une protection adaptée ;
- le lien de causalité entre la présence de l'ouvrage public et le dommage n'est pas établi ;
- les divers travaux et aménagements effectués par les requérants sur leur propriété et les fortes précipitations sont à l'origine des désordres.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2018, la commune du Cannet-des-Maures, représentée par la SELARL LLC et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme B...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions à fin d'injonction sont irrecevables dès lors qu'elles n'entrent pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
- le ruissellement des eaux pluviales en provenance de la voie ne présente pas un caractère d'anormalité ;
- la commune n'a pas l'obligation de réaliser des ouvrages de captage des eaux pluviales des chemins ruraux ;
- les travaux de goudronnage du chemin n'ont pas aggravé l'écoulement ;
- aucun défaut d'entretien de la voie publique ne peut lui être reproché ;
- le lien de causalité entre l'ouvrage public et le dommage n'est pas établi ;
- les divers travaux et aménagements effectués par les requérants sur leur propriété et les fortes précipitations sont à l'origine des désordres.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la Cour a désigné Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant le syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues et la commune du Cannet-des-Maures.
Considérant ce qui suit :
1. La propriété des épouxB..., située sur le territoire de la commune du Cannet-des-Maures en contrebas du chemin des Ribas et sur laquelle passe une canalisation enterrée d'adduction d'eau potable dont le maître d'ouvrage est le syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues, a subi trois éboulements successifs du talus de terre la surplombant le 15 juin 2010, les 4 et 5 novembre 2011 et le 26 octobre 2012. Ils relèvent appel du jugement du 16 juin 2017 du tribunal administratif de Toulon en tant seulement qu'il a rejeté leur demande de condamnation solidaire de la commune du Cannet-des-Maures et du syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues à leur verser la somme totale de 161 750 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'effondrement du talus.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la responsabilité du syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues :
2. La mise en jeu de la responsabilité sans faute d'une collectivité publique pour dommages de travaux publics à l'égard d'un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou une opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l'existence d'un dommage anormal et spécial directement en lien avec cet ouvrage ou cette opération. Les personnes mises en cause doivent alors, pour dégager leur responsabilité, établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure, sans que puisse utilement être invoqué le fait du tiers.
3. Il résulte de l'instruction que le profil du terrain de M. et Mme B...a subi de nombreuses modifications consécutives aux travaux de construction de leur maison. Ces travaux réalisés par les requérants ont conduit à la destruction de restanques en pierres sèches, sans mise en place d'un enrochement de soutien des terres supérieures, et à la création d'un talus de terre non stabilisé en aval du chemin des Ribas d'une hauteur de 4,50 mètres à 4 mètres de l'habitation. L'effondrement de ce talus à la suite de fortes pluies a pour origine les travaux de décaissement de la colline. Ces travaux effectués par M. et Mme B...portent en eux l'entier sinistre. Ainsi, la circonstance que les eaux de pluie de ruissellement sont canalisées par le chemin du Ribas avant de se déverser dans la propriété des requérants est sans lien avec la cause du dommage. Il suit de là qu'en l'absence de lien de causalité entre les éboulements et la présence du chemin rural ou de la canalisation enterrée, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que la responsabilité du syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues ou de la commune du Cannet-des-Maures est engagée pour défaut d'entretien normal des ouvrages publics.
En ce qui concerne la responsabilité de la commune du Cannet-des-Maures :
4.. Le riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics, à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers, doit établir le lien de causalité entre cette opération et les dommages allégués. Les riverains sont tenus de supporter, sans contrepartie, les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général.
5. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée le 15 décembre 2012 par le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, que la propriété de M. et Mme B...située en contrebas immédiat du chemin des Ribas se trouve dans l'emprise d'un cône d'éjection naturel des eaux de ruissellement provenant de la voie. Il résulte du courrier de la commune du 7 mars 1985 produit par les requérants, que la commune du Cannet-des-Maures a procédé au goudronnage de ce chemin en 1985. Les requérants n'établissent pas l'aggravation des arrivées d'eau en provenance de la voie depuis les travaux de réfection ni l'existence d'un lien de causalité entre ces travaux et les désordres. Il suit de là que M. et Mme B...ne sont pas plus fondés à rechercher la responsabilité de la commune du Cannet-des-Maures sur le fondement de la responsabilité sans faute pour dommages de travaux publics.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune du Cannet-des-Maures, que M. et Mme B...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs demandes indemnitaires.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Cannet-des-Maures et du syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. et Mme B...une somme de 1 000 euros chacun au titre des frais exposés par la commune du Cannet-des-Maures et du syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.
Article 2 : M. et Mme B...verseront à la commune du Cannet-des-Maures et au syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues une somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C...B..., à la commune du Cannet-des-Maures et au syndicat intercommunal d'adduction des eaux de la source d'Entraigues.
Délibéré après l'audience du 20 décembre 2018 où siégeaient :
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère,
- M. Merenne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 janvier 2019.
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N° 17MA03567
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