Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 10 avril 2015, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 octobre 2014 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 mars 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir en lui attribuant une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour et d'éloignement est insuffisamment motivée ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;
- il remplit les conditions prévues par les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien pour obtenir un titre de séjour ;
- l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la mesure d'éloignement est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 et se trouve dépourvue de base légale ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de droit ;
- le refus d'accorder un délai de départ supérieur à trente jours est insuffisamment motivé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 13 janvier 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Haïli.
1. Considérant que M. A..., de nationalité algérienne, né le 23 mars 1951, relève appel du jugement du 21 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à destination du pays dont il a la nationalité ;
Sur la légalité externe de l'arrêté du 11 mars 2014 :
2. Considérant, en premier lieu, que M. A... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance, tirés de l'insuffisante motivation de la décision de refus de séjour, du défaut de saisine de la commission du titre de séjour et de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire et du refus d'accorder un délai de départ supérieur à trente jours ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens, qui ne comportent aucun élément nouveau par rapport à l'argumentation développée par le requérant devant le tribunal, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
3. Considérant, en second lieu, que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'elles prévoient que la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans certains cas limitativement énumérés, ne sont pas incompatibles avec les dispositions de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 qui imposent que les décisions de retour indiquent leurs motifs de fait et de droit, dès lors qu'en portant à la connaissance de l'étranger les raisons pour lesquelles il n'est pas admis à séjourner en France, l'autorité administrative l'informe par là même et de manière suffisante des motifs pour lesquels il est contraint de sortir du territoire français ;
Sur la légalité interne de l'arrêté du 11 mars 2014 :
En ce qui concerne la légalité interne de la décision de refus de séjour :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ; / 5) au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
5. Considérant, en premier lieu, que M. A..., qui déclare être entré sur le territoire national le 20 septembre 2003, soutient résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée ; que, même en tenant compte des documents d'ordre médical qui attestent de la présence de M. A... en France, les autres pièces produites démontrent au mieux une présence ponctuelle et n'établissent notamment pas la présence du requérant entre mai et octobre 2005, entre janvier et mai 2007, entre janvier et décembre 2008, les factures de vingt nuitées d'hôtel étant seulement produites pour cette période de dix mois ; que la présence en France de l'intéressé ne peut, en outre, être regardée comme justifiée entre le mois d'août et la fin de l'année 2011 et entre mars 2013 et la date de la décision attaquée intervenue le 11 mars 2014 ; que le requérant ne justifiant pas résider habituellement sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée, c'est, par suite, à bon droit que les premiers juges ont estimé que le préfet des Bouches-du-Rhône n'avait pas méconnu les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
6. Considérant, en second lieu, que M. A... conserve en Algérie, où résident son épouse et leurs sept enfants, des attaches privées et familiales ; qu'il ne démontre, par ailleurs, aucune insertion particulière dans la société française alors qu'il est constant qu'il n'a pas déféré aux décisions d'éloignement prises à son encontre le 6 avril 2009, le 7 octobre 2010 et le 30 octobre 2012, respectivement confirmées par des jugements du tribunal administratif de Marseille du 17 septembre 2009, du 11 janvier 2011 et du 18 juin 2013, manifestant ainsi sa volonté de se soustraire aux règles qui régissent le pays au sein duquel il ambitionne de vivre ; que, dans ces conditions, la décision contestée ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a, dès lors, méconnu ni les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la légalité interne de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, en premier lieu, que le requérant n'établit pas que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'illégalité, ainsi qu'il a été dit antérieurement ; qu'il ne saurait soutenir, par voie d'exception, que l'obligation de quitter le territoire français reposerait sur une décision illégale ; qu'il résulte en outre de ce qui a été dit au point 3 que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale doit être écarté ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens tirés de ce que l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs précédemment exposés s'agissant du refus de titre de séjour ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'indépendamment de l'énumération, donnée par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une telle mesure que si l'étranger se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi ou un accord international prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement forcée ; que, toutefois, compte tenu de ce qui a été dit sur le refus de séjour, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet doit être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter également ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 26 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Markarian, premier conseiller,
- M. Haïli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
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N° 15MA01534