Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 15 mars 2016, sous le n° 16MA01116 Mme B..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 septembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-de-Haute-Provence du 22 janvier 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai d'un mois à compter la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à défaut, de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me D... en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- les décisions attaquées risquent d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- la décision est entachée d'un défaut de motivation ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision a méconnu le principe du contradictoire ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle a des conséquences d'une particulière gravité sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
- le préfet n'a pas respecté son droit d'être entendue ;
- la décision est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation sur les conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant un départ volontaire de trente jours :
- la décision est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- la décision est entachée d'une erreur de droit ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 mai 2016, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par l'appelante sont infondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de l'entrée et séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gonzales.
1. Considérant que Mme B... est entrée en France le 16 septembre 2012 ; que le 4 octobre 2012 elle a formulé une demande d'asile devant l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides ainsi qu'une demande d'admission au séjour à ce titre devant les services de la préfecture des Alpes-de-Haute-Provence ; qu'à la suite de la décision de rejet de l'Office, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile du 14 octobre 2014, le préfet a pris, le 22 janvier 2015, à l'encontre de l'intéressée une décision de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français ; que Mme B... a introduit un recours en annulation de cette décision devant le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa requête par un jugement du 29 septembre 2015 ; qu'elle demande à la Cour qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-17 du code de justice administrative : " " (...) le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. " ;
3. Considérant qu'il n'appartient pas à la Cour, saisie en application des dispositions précitées de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, d'annuler une décision juridictionnelle ou un acte administratif ; que, par suite, les conclusions de Mme B... contenues dans sa requête à fin de sursis à l'exécution du jugement du 29 septembre 2015 et tendant à l'annulation de cette décision juridictionnelle et de l'arrêté préfectoral du 22 janvier 2015 ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
4. Considérant que pour demander sur ce point le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille, Mme B... soutient que cette décision est entachée d'un défaut de motivation, qu'elle a été prise en violation du principe du contradictoire, et que le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'en l'état de l'instruction, aucun de ces moyens n'apparaît sérieux et de nature à justifier qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ; que, par suite, les conclusions susmentionnées doivent être rejetées ; qu'au surplus et en tout état de cause, le jugement par lequel un tribunal administratif rejette la demande tendant à l'annulation d'une décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, qui ne modifie pas, en droit ou en fait, la situation antérieure de l'intéressé, n'entraîne, en tant que tel, aucune mesure d'exécution susceptible de faire l'objet du sursis à exécution prévu à l'article R. 811-7 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
5. Considérant que pour demander le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la décision du 22 janvier 2015 portant obligation de quitter le territoire français, Mme B... soutient que le préfet a méconnu son droit d'être entendue, ainsi que les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'en l'état de l'instruction, aucun de ces moyens n'apparaît sérieux et de nature à justifier qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la décision fixant le pays de destination :
6. Considérant que le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet qui se serait estimé lié par le refus prononcé par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides paraît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à entraîner l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la décision fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions en injonction :
7. Considérant que le présent arrêt implique seulement que soit délivrée à Mme B... une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente du jugement de l'affaire au fond ; qu'il y a donc lieu d'enjoindre au préfet des Alpes-de-Haute-Provence d'y procéder dans les huit jours suivant la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à verser à Me D..., sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;
D É C I D E :
Article 1er : Il sera sursis à l'exécution du jugement n° 1504723 du 29 septembre 2015 du tribunal administratif de Marseille, en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme B... dirigées contre la décision du 22 janvier 2015 fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement, jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête n° 16MA01115 présentée par Mme B....
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-de-Haute-Provence de délivrer à Mme B..., dans le délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, valable jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande au fond.
Article 3 : L'Etat versera à Me D..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 la somme de 500 euros, sous réserve que cet avocat renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...épouse B..., au ministre de l'intérieur et à Me D....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-de-Haute-Provence.
Délibéré après l'audience du 10 mai 2016, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président-assesseur,
- Mme Baux, premier conseiller.
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N° 16MA01116