Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 août 2015, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 8 janvier et 1er février 2016, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 23 juillet 2015 ;
2°) d'annuler la décision du 22 octobre 2013 par laquelle le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas s'est opposé au raccordement provisoire à l'électricité de sa parcelle cadastrée section BW n° 118 ;
3°) d'annuler la décision du 29 avril 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas s'est opposé au raccordement définitif de cette parcelle ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 29 avril 2014 ne comporte pas l'indication précise des voies et délais de recours ;
- l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme ne vise pas les caravanes mobiles, de sorte que le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas a commis une erreur de droit en refusant le raccordement tant provisoire que définitif de sa caravane mobile en se fondant sur ces dispositions ;
- l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme n'autorise pas le maire à s'opposer à un raccordement provisoire au réseau électrique ;
- la décision portant refus de raccordement provisoire n'est pas motivée, en méconnaissance de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la décision du 19 avril 2014 méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2015, et un mémoire complémentaire, enregistré le 25 janvier 2016, la commune de Saint-Hilaire de Brethmas, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme C... de la somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande d'annulation de la décision du 29 mai 2014 est irrecevable, pour avoir été formée après l'expiration du délai de recours contentieux ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme C... a été a admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 18 janvier 2016.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la lettre du 17 mai 2016 portant à la connaissance des parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, un moyen d'ordre public sur lequel la Cour serait susceptible de fonder d'office sa décision, tiré de ce qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 22 octobre 2013, qui a été retirée par la décision du 29 avril 2014.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Portail,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant Mme C..., et de Me A..., représentant la commune de Saint-Hilaire de Brethmas.
1. Considérant que Mme C... est propriétaire d'une parcelle, cadastrée section BW n° 118, sise chemin de la Lègue, sur le territoire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas ; qu'elle a demandé le raccordement au réseau de distribution de l'électricité d'une caravane stationnée sur cette parcelle ; que la société Electricité et réseaux de France (ERDF), gestionnaire de ce réseau, a procédé au raccordement provisoire de cette caravane ; que, le 22 octobre 2013, le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas a demandé à la société ERDF de procéder à la mise hors service de ce branchement ; que Mme C...ayant confirmé, le 24 avril 2014, sa demande de raccordement de sa caravane au réseau électrique, le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas a refusé, par une décision du 29 avril 2014, ce raccordement ; que Mme C... relève appel du jugement du 23 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 29 avril 2014 :
2. Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, le maire peut s'opposer au raccordement définitif au réseau de distribution d'électricité des caravanes mobiles stationnant irrégulièrement, soit au regard des articles R. 443-1 et suivants du code de l'urbanisme, soit au regard du règlement annexé au plan d'occupation des sols ou du plan local d'urbanisme, sur le territoire de la commune concernée ;
3. Considérant que la parcelle pour laquelle Mme C... a demandé le raccordement au réseau de distribution électrique est située en secteur NDi de la zone ND du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas ; que ce règlement dispose que le secteur NDi est soumis au risque d'inondation des cours d'eau et écoulements, et qu'y sont admis les infrastructures et équipements liés et nécessaires à l'exploitation de la route express RN 106 ainsi que les travaux d'adaptation sur les constructions existantes visant à réduire leur vulnérabilité aux risques d'inondation ; qu'aux termes de l'article ND2 de ce règlement : " sont interdites toutes les formes d'utilisation et d'occupation des sols non mentionnées à l'article ND1 ci-dessus " ; que le règlement du plan d'occupation des sols doit ainsi être regardé comme interdisant le stationnement des caravanes en zone NDi; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas aurait commis une erreur de droit en s'opposant au raccordement définitif de la caravane de la requérante au réseau de distribution électrique sur le fondement des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme doit être écarté ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
5. Considérant que la décision par laquelle le maire refuse, sur le fondement de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, un raccordement d'une construction à usage d'habitation irrégulièrement implantée aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone a le caractère d'une ingérence d'une autorité publique dans le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, si une telle ingérence peut être justifiée par le but légitime que constituent le respect des règles d'urbanisme et de sécurité ainsi que la protection de l'environnement, il appartient, dans chaque cas, à l'administration de s'assurer et au juge de vérifier que l'ingérence qui découle d'un refus de raccordement est, compte tenu de l'ensemble des données de l'espèce, proportionnée au but légitime poursuivi ;
6. Considérant, d'une part, que la parcelle en litige est située en secteur NDi de la zone ND du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas où est interdit le stationnement des caravanes, ainsi qu'il a été dit au point 3 ; que, d'autre part, si Mme C... conteste que le secteur serait exposé à un risque important d'inondation, il ressort des pièces du dossier que sa parcelle est située à proximité du Gardon d'Alès, alors que la commune est régulièrement victime d'importants épisodes cévenols ; qu'enfin, si la requérante soutient être d'une santé fragile, et dans une situation sociale précaire, elle n'apporte aucun élément pour étayer ces affirmations ; que, compte tenu de l'ensemble des données de l'espèce, l'ingérence du maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas dans le droit de Mme C...au respect de sa vie privée et familiale est justifiée par le but légitime que constitue le respect des règles du plan d'occupation des sols et de celles relatives à la sécurité des usagers, et apparaît proportionnée au but légitime poursuivi ;
7. Considérant que la décision en litige n'entraîne aucune dépossession, ni, par elle-même, d'interdiction de construire ; que, dès lors, Mme C... n'est pas fondée à soutenir qu'elle porte atteinte à son droit de propriété ;
8. Considérant que l'absence d'indication des voies et délais de recours dans la décision attaquée est sans influence sur sa légalité ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 avril 2014 ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 22 octobre 2013 :
10. Considérant que par sa décision du 29 avril 2014, refusant le raccordement définitif au réseau de distribution électrique de la propriété de Mme C..., le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas doit être regardé comme ayant retiré, implicitement, mais nécessairement, la décision du 22 octobre 2013 par laquelle il s'était opposé au raccordement provisoire à ce réseau de la caravane de la requérante ; que le présent arrêt rejette les conclusions de Mme C... dirigées contre cette décision du 29 avril 2014, qui est donc définitive ; que, dès lors, les conclusions de la requête dirigées contre la décision du 22 octobre 2013 sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas, qui n'est dans la présente instance, ni partie perdante ni tenue aux dépens, la somme que la requérante demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas fondées sur ces mêmes dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 22 octobre 2013 par laquelle le maire de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas s'est opposé au raccordement provisoire au réseau de distribution électrique de la parcelle cadastrée section BW n° 118 et a demandé à la société ERDF de procéder à la mise hors service de l'installation de raccordement provisoire.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C...et à la commune de Saint-Hilaire de Brethmas.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2016, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Busidan, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 juin 2016.
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N° 15MA03268